Plaire, Aimer et Courir vite (2018) de Christophe Honoré.

par Selenie  -  17 Mai 2018, 07:20  -  #Critiques de films

Actuellement en compétition au Festival de Cannes, ce nouveau film du réalisateur breton (né à Carhaix, études à Rennes) est un retour à un style plus personnel après son interlude plus "populaire" avec "Les Malheurs de Sophie" (2016). L'ex-étudiant rennais se sert de certains de ses souvenirs pour cette histoire qui se déroule en 1990, où un étudiant tombe amoureux d'un écrivain condamné par le fléau du SIDA. Au départ, le cinéaste avait en tête son acteur fétiche Louis Garrel avant que cela ne se fasse plus pour des raisons inconnues. Honoré choisit alors l'acteur Pierre Deladonchamps, la révélation de "L'Inconnu du Lac" (2012) de Alain Guiraudie pour le remplacer dans le rôle de l'écrivain. A ses côtés, pour le rôle de l'étudiant rennais son choix s'est porté sur Vincent Lacoste qui ajoute une nouvelle corde à son arc et qui retrouve ainsi Rennes après ses aventures dans "Les Beaux Gosses" (2009) de Riad Sattouf, le film qui l'a révélé. Enfin, le meilleur ami de l'écrivain est joué par l'excellent Denis Podalydès qui retrouve ainsi Vincent Lacoste après "Camille Redouble" (2012) de Noémie Lvovsky.

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Trop de comparaison ont été faites avec le film "120 Battements par Minute" (2017) de Robin Campillo, en effet rien de plus facile et simpliste de n'y voir que le rapport au SIDA et pourtant ce sont deux films foncièrement différents. Autant y voir des films similaires entre n'importe quels westerns. Il s'agit avant tout d'une simple histoire d'amour, comme l'explique le cinéaste  : "Un premier amour et un dernier amour. Un début dans la vie et une fin dans la vie, à travers une seule et même histoire, celle du jeune provincial Arthur et de l'écrivain agonisant Jacques. Le film voudrait conjuguer cette association de sentiments : l'élan et le renoncement. L'histoire d'amour racontée précipite deux choses : d'une part les débuts dans la vie d'Arthur, d'autre part la fin de la vie de Jacques. Il est possible que sans cet amour Jacques aurait vécu plus longtemps, parce qu'il est précipité dans l'idée que sa maladie, le sida, le rend inapte à cet amour, qu'il n'est plus capable de le vivre. Je crois que le vrai sujet du film est là, dans les effets contraires de l'amour. C'est un film qui assume sa part de mélodrame, mais pas tant du côté de l'amour impossible que de la vie impossible."... Tourné en grande partie à Rennes (on reconnaîtra le Thabor et le Parlement de Bretagne entre autres) Il s'agit avant tout d'une histoire d'amour où l'un des amants est condamné. Dans le genre il y a eu de nombreux teen movies ces derniers temps sur ce même sujet, mais l'adolescence hétérosexuelle et le cancer laissent ici la place à un passé social tout aussi tragique avec le SIDA et un couple homo.

On est très éloigné du côté carte postale du récent "Call Me By Your Name" (2018) de Luca Guadagnino, Christophe Honoré est nettement plus dans un naturalisme réaliste mais qui reste assez léger, ne tombant jamais dans le pathos. C'est bien là sa force, ce mélange savamment dosé entre le drame joué d'avance et cet amour libre et aérien. Le paramètre du sexe lui-même est le plus gênant. Loin de jouer la carte sensuelle on est plus dans un réalisme brut, pour ne pas dire cru, qui ne permet pas un détachement plus émotionnel vis à vis des protagonistes. On a pu lire de ce film qu'il est "sordide et sinistre", c'est loin d'être le cas et ces termes doivent sans doute plus à une gêne qu'à un constat réel. Cependant, il est vrai qu'il manque quelque chose, le film étant dans le parallèle sentiment/sexe justement mis en exergue dans un monologue de Arthur (Lacoste). Les sentiments offrent de jolis scènes intimes sur l'incertitude de demain, il y manque une symbiose avec des scènes de sexe mécanique sans âme. Heureusement, l'osmose est bel et bien là avec les acteurs, le couple Lacoste-Deladonchamps fonctionne à merveille (superbe surprise de Lacoste !) et en prime un Denis Podalydès qui offre la scène les plus justes et touchantes. Un beau et bon film auquel il manque surtout un côté plus subtil les scènes charnelles.

 

Note :                 

14/20

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