A Most Violent Year (2014) de J.C. Chandor
Après l'excellent "Margin Call" (2011) et le moins réussi "All is lost" (2013) le réalisateur J.C. Chandor revient en forme avec un polar new-yorkais, un sous-genre en soi que Lumet ou Scorcese ont amené très haut... Comme ses deux premiers films Chandor aime à changer d'univers mais traite avant tout de son sujet de prédilection, comment survivre à une crise qui devient critique et plus ou moins violente quand une autre défaillance arrive sans crier gare... Entre parenthèse, trois acteurs du film (Chastain, Oyelowo et Gabel) ont déjà joué ensemble cette année dans "Interstellar" de Christopher Nolan...
Reconstitution d'époque aussi sobre qu'envoûtante (Froid, brume et plan large), évitant les hit musicaux éculés le réalisateur préfère insisté sur une époque via l'année 1981 (cette dernière étant considérée comme la plus criminogène qu'est connue la ville de New-York) en passant en arrière plan et tout le long du film des infos radios annonçant les pires faits divers. Cette idée permet un contraste frappant entre la violence environnante, qui semble bien pire et qu'on ne fait qu'imaginer, avec celle à laquelle doit faire face le couple Abel et Anna Morales. Ces derniers est un couple particulièrement intéressant puisqu'on comprend que la droiture de Abel, à priori immigré (jamais ce n'est affirmé), est tout droit inspiré de l'American Way of Life (toujours en contraste avec la vision d'un "Scarface" de De Palma) alors que son épouse Anna est issue d'un famille peu honnête, présente en filigrane. Abel et Anna se complète de leur incroyable différence que seule l'ambition semble soudée. Abel se plaçant en Parrain sans vouloir assurer ni assumer les conséquences, ne désirant finalement que la réussite que son ambition pourrait lui offrir. Le couple Morales est interprété par Oscar Issac et Jessica Chastain, deux des explosions talentueuses de ces 4-5 dernières années (qui se sont connus sur les bancs de l'Ecole Juilliard de New-York en 2003). Magnifique couple dont les nuances ne font qu'enrichir la complexité et l'ambiguité de leur fonctionnement. Deux niveaux de lecture s'imposent donc, le couple en lui-même et la lutte "commerciale". Cette lutte est avant tout placée comme la suite logique d'un capitalisme effrénée. Sous couvert d'un film de mafia J.C. Chandor signe un film plus profond, où l'ambition est un piège sur lequel n'importe qui peut glisser. On pense à du James Gray dans la forme, dans le fond Chandor impose sa perception du monde, assez pessimiste, voir cynique mais diablement intéressante. Un grand film.
Note :