Moi, Daniel Blake (2016) de Ken Loach
80 ans, l'âge du réalisateur britannique Ken Loach qui vient tout juste d'entrer dans la caste des doubles palmés à Cannes. En effet, après "Le Vent se lève" (2006) il gagne sa seconde Palme cette année avec "I, Daniel Blake" pour rejoindre F.F. Coppola, Shohei Imamura, Emir Kusturica, Bille August, les frères Dardennes et Michael Haneke. Ken Loach le combattant reste une fois de plus dans son créneau en défenseur des petits contre les grands. Certains ont par ailleurs trouvé cette Palme D'Or injustifiée pour ce film-ci (comme "Le Vent se lève") pour un réalisateur dont on trouve que le propos est redondant. Peut-être, mais une chose est sûre c'est que Ken Loach est à la misère sociale ce qu'est Woody Allen à la philosophie et Tim Burton au gothique (pour faire court !).
Ken Loach est fidèle à lui-même et aux autres puisque pour ce film il retrouve sa productrice Rebecca O'Brien, son scénariste Paul Laverty et son compositeur George Fenton tous trois de quasiment tous ses films. Donc après l'excellent "Jimmy's Hall" (2014) le voilà qui revient à aujourd'hui et à la crise et plus précisément pour dénoncer le poids administratif qui pèse sur les plus démunis et dénonce la mise en place d'une inefficacité volontaire de l'état. On suit donc un homme de 59 ans qui vient de survivre à une attaque cardiaque, dont les médecins refusent qu'ils reprenne le travail mais que Pôle emploi veut remettre au boulot. On suit également une jeune mère de famille célibataire qui ne tient le coup que grâce à l'aide de Daniel Blake. Ce dernier est joué par l'acteur Dave Johns, humoriste dont c'est le premier rôle au cinéma après une longue carrière à la télévision.
La jeune maman est jouée par Hayley Squires, également inconnue, aux petits airs de Mila Kunis en moins anorexique. Le scénario est du vrai papier à musique, et Loach dans son style habituel montre et démontre toute la bêtise d'une machine trop bien huilée mais dénuée de paramètre humain. Mais dans ce propos amer et fataliste on a connu Ken Loach plus inspiré. Dans le fond on apprécie, il touche trop de cordes sensibles pour ne pas adhérer mais c'est beaucoup trop démonstratif pour ne pas dire caricatural... Où est-ce pire en Angleterre qu'en France ?! En effet à faire trop manichéen on tombe facilement dans de la démagogie peu constructive. Loach a été plus subtil et plus judicieux dans "My name is Joe" (1998) ou même "La Part des Anges" (2012). Touchant bien évidemment, dans les grosses lignes on ne peut pas dire grand chose, des acteurs parfaits mais le tout manque de mesure voire même peut-être de légèreté. Une Palme surestimée, assez éloignée des meilleurs Loach mais un très bon film qui a une grande qualité, celle de ne pas oublier les plus faibles parmi nos semblables.
Note :