20th Century Women (2017) de Mike Mills
Le réalisateur avait signé le très bon "Beginners" (2010) d'après les souvenirs de son père, cette fois il revient et signe un film féministe, porté par ses souvenirs que lui inspire sa mère. En partie autobiographique donc il s'agit bel et bien d'une déclaration d'amour avec toute la sensibilité attendue mais le cinéaste a voulu également y mêler des bases plus universelles comme le rapport inter-générationnel, de la difficulté du temps qui passe et surtout de l'évolution trop ou très rapide de la société dans son ensemble. Le réalisateur-scénariste déclare : "En un sens, c'est l'histoire de la rencontre entre la "Génération grandiose" et la "Génération X"..." avec comme point d'ancrage l'année 79.
1979, une année charnière effectivement, en pleine courte période Punk servant de ligne de démarcation. Comme l'explique le cinéaste lui-même en 1979 on ne pouvait s'attendre à la fin de la parenthèse enchantée et l'arrivée du sida, l'explosion de la finance sous Reagan, le terrorisme internationalisé, l'impact d'internet... etc... Et donc comment une maman née en 1924 perd un peu pied quand son fils de 15 ans passe un cap qu'elle a bien du mal à comprendre et à assimiler ?! La mère est interprétée par Annette Bening, ici dans une chronique familiale comme on a pu la voir entre autre dans "Mother and Child" (2010) de Rodrigo Garcia et "Tout va bien, the kids are all right" (2010) de Lisa Cholodenko. Le fils est joué par un jeune inconnu, Lucas Jade Zumann dont le CV s'arrête encore à un second rôle dans "Sinister 2" (2015) de Ciaran Foy. Les autres personnages, quasi aussi importants dans le récit sont joués par Greta Gerwig dans un rôle assez proche de ceux qu'elle a l'habitude de jouer dans "Frances Ha" (2013) et "Mistress America" (2016) de Noah Baumbach, Elle Fanning qui vient de passer un cap avec "The Neon Demon" (2016) de Nicolas Winding Refn et qui retrouve Annette Bening après le film "Ginger et Rosa" (2013) de Sally Potter, et enfin Billy Crudup qui ne porte plus un film sur son nom mais qui choisit ses projets avec parcimonie comme en témoigne "Spotlight" (2016) de Tom McCarthy, "Jackie" (2017) de Pablo Larrain et prochainement "Alien : Covenant" (2017) de Ridley Scott...
Chacun des personnages à son importance et offre une autre vision du monde que le réalisateur a matérialisé en demandant à ses acteurs de jouer en adéquation avec leur musique respective, liée à leur personnage. C'est ainsi par exemple que Annette Bening avait de la musique des années 30-40, que Billy Crudup avait de la Folk et que Greta Gerwig était plus David Bowie (d'où sa coupe de cheveux d'ailleurs, inspirée de la coupe de Bowie dans le film "L'homme qui venait d'ailleurs" en 1976 de Nicolas Roeg). La gageure était de na pas tomber dans "c'était mieux avant", et force que Mike Mills a justement su éviter cet écueil. Car en effet la mère n'est nullement nostalgique, elle souhaite le meilleur pour son fils mais elle se sent dépassé par la mutation de la société en général qui joue évidemment sur son fils à un âge où on grandit encore plus vite. Néanmoins, si ça n'était pas forcément mieux avant, et si le ton du film reste assez léger il y a une forte mélancolie qui nous envahit, voir de la tristesse sur la fin. Pas de tragédie ni pathos mais il y a un goût amer qui s'invite là où on ne s'y attendait pas forcément. Notons un joli chapitrage, placé de façon original où on est invité à mieux connaitre les personnages. En tous cas, si cette chronique familiale et amicale n'est pas une pure comédie on salue la forme et l'intelligence de fond qui ne manquera pas de nous interroger.
Note :