Jamais Plus Jamais (1983) de Irvin Kershner
Ce nouveau film de James Bond, remake de "Opération Tonnerre" (1965) de Terence Young est un cas particulier, mais qui n'est pas compris dans la franchise officielle des productions EON. En effet, il faut se rappeler l'affaire McClory vs Ian Fleming autour de (cliquez sur le titre du film sus-nommé) sur lequel Kevin McClory était producteur-scénariste en accord avec les producteurs "historiques" Albert R. Broccoli et Harry Saltzman, accord survenu après que McClory ait obtenu les droits sur "Opération Tonnerre" (Ian Fleming ayant publié le roman sans crédité McClory et son collègue Jack Wittingham pourtant co-créateur de l'oeuvre). En compensation, McClory ne davit produire aucun film avant 10 ans. Après quelques années à se battre pour trouver le financement, McClory arrive à ses fins jusqu'à sortir le film la même année qu'un certain "Octopussy" (1983) de John Glen avec Roger Moore ; un duel entre grands écrans interposés en somme. Si McClory est de nouveau producteur-scénariste, il collabore cette fois avec d'autres scénaristes pour moderniser l'histoire avec le duo Dick Clement et Ian La Frenais, et surtout Lorenzo Semple Jr. co-auteur des films "Papillon" (1973) de Franklin J. Schaffner et "Les 3 Jours du Condor" (1975) de Sydney Pollack. Pour la réalisation, c'est le réalisateur Irvin Kershner qui est choisi, alors tout auréolé du succès de "L'Empire Contre-Attaque" (1980)...
L'histoire est donc identique (ou presque). James Bond vieilli et est donc envoyé dans une centre de remise en forme où il croise des membres du Spectre. Et alors que deux ogives nucléaires sont volés 007 revient en service où il va s'apercevoir que sa rencontre au centre de bien-être est joyeuse coïncidence... Le coup de force de McClory est surtout d'avoir fait revenir la star Sean Connery dans le rôle de 007, acteur originel de la saga officiel avec "James Bond contre Dr. No" (1962) et qui lui avait dit adieu avec "Les Diamants sont Eternels" (1971) de Guy Hamilton. Mais un gros chèque de 5 millions de dollars à suffit au "gentleman" pour accepter de trahir ceux qui lui ont offert la gloire... "Jamais plus Jamais" est définitivement un bon titre à la circonstance... Le reste du casting n'a rien à envier aux productions EON. Le Chiffre est incarné par Max Von Sydow monstre sacré et acteur fétiche de Ingmar Bergman depuis "Le Septième Sceau" (1957), son n°2 par Klaus Maria Brandauer alors en début de carrière et qui va connaître le succès avec "Colonel Redl" (1985) et "Out of Africa" (1985) de Sydney Pollack. "M" est joué par Edward Fox qui venait de jouer dans "Ghandi" (1982) de Richard Attenborough. Les James Bond Girls sont interprétés par la débutante Kim Basinger qui deviendra une star avec "9 semaines 1/2" (1986) de Adrian Lyne, puis Barbara Carrera vue dans "Embryo" (1976) de Ralph Nelson et la série TV "Colorado" (1978) mais qui, étonnament, connaîtra ensuite le déclin notamment en apparaissant dans la production catastrophique "Les Oies Sauvages 2" (1985) de Peter Hunt (ironie du sort veut qu'il ait signé aussi un 007 avec "Au Service Secret de sa Majesté" en 1969) dans lequel d'ailleurs joue également James Fox. Et enfin, on peut citer la première apparition au cinéma de Rowan Atkinson futur "Mr Bean" (1990-1995 et 2007 au cinéma) et prêtre de "Quatre Mariages et un Enterrement" (1994) de Mike Newell. Et enfin, si McClory a tenté de débauché John Barry compositeur "historique" de la saga officielle, c'est au final le réputé Michel Legrand (plus de 200 BO à son actif !) qui signe la musique... Evidemment, le film part avec un handicap de taille, le fait que ce nouveau film soit "hors série", et qu'il reste sans doute un remake inutile (pléonasme ?!) et qu'il est surtout le moyen de soigner l'égo de monsieur Kevin McClory.
Pourtant il y a un point sur lequel ce film reste plus cohérent avec le récit : Bond se fait vieux et est envoyé en maison de repos. Et Sean Connery sur ce point précis est plus crédible à 52 ans qu'à 35. Bizzarement on constate que ce James Bond/Connery a évolué vers un 007 plus proche d'un Roger Moore que du Connery des années 60. En effet, l'acteur joue plus de l'autodérision et les dialogues offrent quelques "légèretés" dont on n'était pas habitué à l'époque de "Opération Tonnerre". Comme quoi, si beaucoup critique les 007 avec Roger Moore, il semble bien que l'équipe de McClory y a puisé quelques ingrédients. L'intrigue est connue, pas de réelle surprise, et finalement autant dans le style que dans sa construction le film ne serait pas un intrus honteux au sein de la saga officielle. Mais Connery joue un 007 différent, et les aléas autour de cette production en font un projet opportuniste et peu honnête. Par contre il faut avouer que le niveau général est dans la moyenne, Bandauer assure en méchant, à contrario du Chiffre complètement sous-exploité (pauve Max !), ches les Bond Girls, Basinger est mignonne mais trop niaise, alors que Barbara Carrera est vénéneuse à souhait jusqu'à cette fin pitoyable où la séquence de l'attestation de Bond pour ses talents érotiques est ridicule. Au final un Bond qui laisse un petit goût amer vu le contexte mais qui reste un divertissement honnête. Et pour la conclusion, si McClory a réussi à réunir un budget plus conséquent que "Octopussy" (36 contre 27,5 millions, le cachet de Sean Connery compte !) le film rapportera moins au box-office (160 contre 187,5 millions de dollars) ce qui anéantira les chances prochaines de McClory de refaire un film. Néanmoins, la MGM rachètera les droits en 1997 pour 15 millions de dollars.
Note :
Pour info bonus, Note de mon fils de 10 ans :