Enragé (2020) de Derrick Borte
À ne pas confondre avec le film français "Enragés" (2015) de Eric Hannezo. Le film est parti de ce qi se nomme aux Etats-Unis "rage au volant", soit les conducteurs hyper agressifs une fois qu'ils sont au volant, mais le cinéaste précise : "Même si l'intrigue s'attache aux conséquences extrêmes de l'agressivité au volant, le film explore avec sensibilité les liens fragiles qui permettent aux sociétés de rester unies et la part d'ombre qui sommeille chez beaucoup d'êtres humains. On a tous connu ce qu'on peut qualifier de "sales journées" et le film montre comment, dans ce contexte, nos pulsions peuvent conduire à l'irréparable." Le film est dirigé par le réalisateur Derrick Borte auquel on doit "La Famille Jones" (2010) et "London Town" (2016), et il porte à l'écran un scénario de Carl Ellsworth qui a entre autre signé des films comme "Paranoïak" (2007) de C.J. Caruso, "La Dernière Maison sur la Gauche" (2009) de Denis Iliadis et "L'Aube Rouge" (2012) de Dan Bradley...
Rachel débute très mal sa journée en perdant son boulot alors qu'elle est coincée dans les bouchons. Perdant patience elle klaxonne un pick-up qui est devant elle alors que le feu est vert. Quelques instants après, ce pick-up s'arrête à sa hauteur et le conducteur désire une discussion "amicale" mais la conversation s'envenime et l'homme la menace. Rachel prend peur mais passe à autre chose jusqu'à ce qu'arrive une autre rencontre qui va s'avérer bine plus tragique et violente ce qui va malheureusement s'avérer qu'un début... Le chauffard susceptible est incarné par la star Russell Crowe qui s'est fait bien discret depuis 3-4 ans maintenant mais qu'on a pu voit dans "Boy Erased" (2019) de Joel Edgerton et "Le Gang Kelly" (2019) de Justin Kurzel. La mère de famille prise pour cible est interprétée par Caren Pistorius remarquée notamment dans "Mortal Engines" (2018) de Christian Rivers et "Gloria Bell" (2019) de Sebastian Lelio, son fils est joué par Gabriel Bateman un jeune acteur habitué des films d'horreur après "Annabelle" (2014) de John R. Leonetti, "Dans le Noir" (2016) de David F. Sandberg et "Child's Play : la Poupée de Mal" (2019) de Lares Klevber. Et enfin citons l'ami interprété par Jimmi Simpson vu dans "Abraham Lincoln, Chasseur de Vampires" (2012) de Timur Bekmambetov et "Under the Silver Lake" (2018) de David Robert Mitchell... Tomber sur un cinglé sur la route est un sujet récurrent au cinéma, on peut penser par exemple à "Duel" (1971) de Steven Spielberg et "Hitcher" (1986) de Robert Harmon, mais si on ajoute une dimension sociale ou sociologique on pense forcément à l'excellent "Chute Libre" (1993) de Joel Schumacher. Ce film reprend de ce film le côté "sale journée", les emboutaillages, et une chaleur harassante, le critère "original" reposant ici sur le divorce de l'un et de l'autre. Mais là où "Chute Libre" plaçait un mec lambda en plein burn-out ici on est dans autre chose puisque l'homme est d'emblée présenté comme un monstre psychopathe. Donc d'entrée on a aucune empathie pour cet homme grossier et violent auquel il n'a pas fallu grand chose pour laisser exploser, d'ailleurs la maman n'en est pas moins peu agréable, semble-t-il avec pas mal de défauts, un peu paumée voir irresponsable et même également dangereuse au volant.
Le fait que l'homme soit méthodique même dans l'improvisation impose le fait qu'il était prédisposé à une violence extrême ce qui arase de fait toute le dimension sociale. Sur ce point le film est donc opportuniste voir tout simplement d'une réelle hypocrisie. De même, l'altercation sur la route devient secondaire, l'homme cherche de toute façon le conflit et le fait que ce soit sur la route s'avère finalement très accessoire. Du coup, le côté "rage au volant" qui nous est martelé tout le long du film comme pour justifier un tel scénario est tout aussi hypocrite et opportuniste. Bref, tous les paramètres "sérieux", le fond et le propos autour de la "rage au volant" ou la niveau sociologique part en fumée dès le premier quart d'heure ! Que reste-t-il alors ?! Un simple jeu du massacre façon chat et souris qui n'offre pas une once de suspense puisqu'il n'a aucun autre but de se venger aussi bêtement qu'il sait courir après un "suicide par policier" comme il le déclare. Donc tout repose sur l'action pure, les cascades et la capacité des acteurs à nous émouvoir un temps soit peu. Sur l'action le film est particulièrement trash, d'abord Crowe impose un physique hors norme (l'acteur fait largement son quintal style grizzly) de brute épaisse et impressionnante, ensuite les scènes de violence sont particulièrement marquante et efficace dans le genre ; la séquence de la station service est un must dans le genre (timing, montage), on en dira beaucoup moins bien dans la lutte final, trop classique et avec un gosse qui est drôlement résistant malgré ses 40kg tout mouillés. Le jeune acteur jouant le fils est un peu amorphe, pas toujours juste, mais on salue la performance de Caren Pistorius constamment entre l'oiseau blessé et apeuré et la mère en mode instinct de survie. Le film est clairement racoleur et primaire, pas aidé par un pseudo-fond moral fumeux, mais il faut avouer que Russell Crowe fout la frousse et que plusieurs passages font froid dans le dos pour un message final qui suppose un "soyez cool" ! Un film oubliable mais qui risque de marquer quelques uns/unes.
Note :