Mort de la muse Godardienne Anna Karina

par Selenie  -  16 Décembre 2019, 18:12  -  #Décès de star - Bio

2 jours après Danny Aiello, on apprend la mort de la muse de la Nouvelle Vague, égérie de Jean-Luc Godard, Anna Karina est mort ce 14 décembre 2019 à l'âge de 79 ans.

Née en 1940 au Danemark, Hanne Karin Bayer est la fille d'une maman gérante d'une boutique de vêtement et d'un papa qui quittera la famille avant ses 1 an. Elle vivra ensuite quelques années chez ses grands-parents, suivies de quelques années en famille d'accueil avant de revenir avec sa mère vers ses 10 ans. Elle décrira son enfance comme "ayant terriblement envie d'être aimée".

 

Très vite elle enchaîne de petits boulots et chante dès ses 17 ans dans des cabarets. Son minois aux yeux bleus et son 1m70 la font remarquer et elle devient mannequin et joue dans quelques publicités. Elle réunit toutes ses économies et fuit le Danemark pour arriver à Paris. Repérée elle pose pour des photos pour le magazine Elle où elle rencontre une certaine Coco Chanel qui lui imagine le pseudo francisé Anna Karina. A la même époque elle tourne une publicité Palmolive signée de Jean-Luc Godard (ci-dessous) alors encore critique de cinéma au magazine Cahiers du Cinéma.

Ce dernier, désireux de passer aussi derrière la caméra lui propose un petit rôle féminin de son premier long métrage, "A Bout de Souffle" (1960) avec jean-Paul Belmondo, mais Anna Karina refuse elle doit se dénuder. Quelques mois après il lui propose le rôle principal du film "Le Petit Soldat" (1960) sur la guerre d'Algérie. Cette fois-ci elle accepte et ils tombent amoureux. Le film quant à lui est censuré et ne sortira qu'en 1963...

 

Mais cette fois le pygmalion à trouver sa muse, ils tourneront pas moins de 13 films en semble entre 1960 et 1967 dont 7 de Godard lui-même pour ce qui reste, et de loin, la période la plus faste de Jean-Luc Godard comme de Anna Karina. Ils se marient en 1961.

 

Elle tourne ensuite dans "Ce Soir ou Jamais" (1960) de Michel Deville mais c'est surtout "Une femme est une Femme" (1961) de Godard avec Jean-Paul Belmondo et Jean-Claude Brialy qui l'impose définitivement dans le paysage cinématographique français. Elle gagne pour ce rôle l'Ours d'Argent de la meilleure actrice au Festival de Berlin. Elle enregistre pour ce film sa première chanson en tant qu'interprète, "La Chanson d'Angela" parole de Godard et musique de Michel Legrand.

Elle fréquente alors la Cinémathèque Française et rencontre les grands noms de la Nouvelle Vague dont François Truffaut et Jacques Rivette. Outre Godard elle tourne aussi dans "Cléo de 5 à 7" (1962) de Agnès Varda, "Le Joli Mai" (1963) de Chris Marker, "La Ronde"(1964) de Roger Vadim, "Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot" (1965) de Jacques Rivette qui sera censuré également et que beaucoup considère comme la meilleure performance de sa carrière, puis ensuite "L'Etranger" (1966) de Luchino Visconti.

Elle enregistre d'autres chansons, pour les besoins de B.O. de films, pour "Dragées au Poivre" (1963) de Jacques Barratier, et pour le film "Pierrot le Fou".

Mais évidemment cette période est surtout reliée à son époux d'alors, Jean-Luc Godard la fait jouer dans "Vivre sa Vie" (1962), "Bande à Part" (1964), "Pierrot le Fou" (1965) où elle retrouve également Belmondo, "Alphaville" (1965) et "Made in USA" (1966) et le sketch "Anticipation" du film "Le Plus Vieux Métier du Monde" (1966).

Anna Karina et Jean-Luc Godard divorce en 1967... Elle se remarie en 1968 avec Pierre Fabre, acteur de second rôle aperçu chez François Truffaut surtout.

 

Elle tourne dans le téléfilm "Anna" (1967) de Pierre Koralnik qui lui permet surtout d'enregistrer un album et de chanter avec un certain Serge Gainsbourg (avec qui l'entente fut excellente dans un nuage de gitane qu'elle fumait également assidûment !) dont la chansons à succès "Sous le Soleil Exactement" qu'elle reprendra souvent dans des émissions télés.

Elle passe alors un cap, c'est une page qui se tourne, et qui se remarque entre autres par de nouvelles expériences en acceptant des films plus "internationaux".

 

Elle tourne ainsi dans "Avant que vienne l'Hiver" (1968) de Jack Lee Thompson, "Michael Kohlhaas" (1969) de Volker Schlöndorff, "Justine" (1969 - ci-dessous) de George Cukor, "La Chambre Obscure" (1969) de Tony Richardson...

Elle signe son premier film en tant que réalisatrice avec "Vivre Ensemble" (1973) d'après son premier roman éponyme (1973) et pour lequel elle enregistre à nouveau une chanson.

 

A partir de cette période Anna Karina va ralentir la cadence... Elle divorce de Pierre Fabre en 1974.

 

Citons tout de même le film "Roulette Chinoise" (1976 - ci-dessous) de Rainer Werner Fassbinder et "Regina Roma" (1982) de Jean-Yves Prat avec Ava Gardner et Anthony Quinn, entre temps elle aura jouer au théâtre dans la pièce "Il fait Beau Jour et Nuit" (1978) écrite et mise en scène par Françoise Sagan.

En 1978, elle épouse l'acteur Daniel Duval dont elle divorce en 1981 pour se remarier une quatrième fois en 1982 avec le cinéaste Dennis Berry qu'elle rencontre en marge du tournage de "Regina Roma". Elle écrit un second roman "Golden City" (1983).

 

Citons sur cette période les films "L'Ile au Trésor" (1985) de Raoul Ruiz, "Dernier Eté à Tanger" (1986 - ci-dessous) de Alexandre Arcady, "Last Song" (1987) de Dennis Berry pour lequel elle co-signe le scénario et dans lequel elle chante à nouveau.

Elle joue dans "Cayenne Palace" (1987) de Alain Maline qui lui vaut son unique nomination en 1988 au César pour le meilleur second rôle, puis elle écrit son troisième roman "On n'achète pas le Soleil" (1988).

 

Cette même année 1988, elle est invitée à l'émission Bains de Minuit (ci-dessous) de Thierry Ardisson où elle a la surprise de recevoir la participation de Jean-Luc Godard. Ils ne s'étaient pas vu depuis plus de 20 ans ce qui rend ces retrouvailles particulièrement émouvantes.

Toujours de plus en plus rare, Anna Karina retrouve un autre cinéaste de la Nouvelle Vague dans le film "Haut Bas Fragile" (1994) de Jacques Rivette, suivi du téléfilm "Chloé" (1996) de Dennis Berry où elle a pour partenaire une toute jeune débutante nommée Marion Cotillard. Elle signe ensuite son quatrième et dernier roman "Jusqu'au Bout du hasard" (1998).

 

En 2000 elle collabore avec l'artiste Philippe Katerine avec lequel elle tourne les courts métrages "Une Histoire de K" (2000) et "Nom de Code : Sacha" (2001) et avec lequel elle enregistre en duo la chanson "Qu'est-ce que je peux faire" (2000) puis elle enregistre seule "Une Chanson d'Amour" (2000) écrite pour elle par Katerine.

Après cette période faste en expérience, l'actualité de Anna Karina est plus que rare. Elle apparaît dans le film hollywoodien "La Vérité sur Charlie" (2002) de Jonathan Demme, elle joue dans la comédie "Moi César 10 ans 1/2 1m39" (2003) de Richard Berry et joue dans son second et dernier film en tant que réalisatrice et ultime oeuvre de sa carrière, "Victoria" (2008), un road movie présenté dans plusieurs festivals dont la musique est signée de Philippe Katerine.

 

En 2014 elle reçoit le Prix Henri Langlois d'Honneur.

 

En 2017, son époux Dennis Berry lui consacre le documentaire "Anna Karina, Souviens-toi".

 

En 2018, elle est mise à l'honneur au Festival de Cannes où elle apparaît avec Belmondo grâce à l'affiche de cette 71ème édition tirée d'une scène du film "Pierrot le Fou" de Godard. Simultanément, les deux films "Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot" et "Vivre Ensemble" ressortent en salle en version restaurée. D'abord présentés à Cannes, puis ensuite dans divers festival du monde entier, l'actrice suivra et présentera les films et en profitera pour sortir son album de chanson "Je suis une aventurière".

Si Anna Karina est, pour le Septième Art, à jamais rattachée à Jean-Luc Godard il ne faut pas omettre ses participations à de nombreux autres films et à de nombreux autres univers démontrant sa singularité et son goût de l'"aventure".

 

Muse de Godard et de la Nouvelle Vague, Anna Karina est morte des suites d'un cancer ce 14 décembre 2019 à Paris à l'âge de 79 ans.

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