Les Tribulations d'un Chinois en Chine (1965) de Philippe De Broca

par Selenie  -  14 Juillet 2020, 09:10  -  #Critiques de films

Après le succès (4,8 millions d'entrées France) de "L'Homme de Rio" (1964) le réalisateur Philippe De Broca a voulu se relancer dans un film d'aventure avec encore plus d'exotisme. Finalement le choix du cinéaste s'est porté sur le roman "Les Tribulations d'un Chinois en Chine" (1879) de Jules Verne. De Broca co-signe le scénario avec son scénariste Daniel Boulanger, fidèle qui collaborera sur pas moins de 10 films avec De Broca de "Les Jeux de l'Amour" (1960) à "Chouans" (1988) en passant par "L'Homme de Rio" et "Le Roi de Coeur" (1966). Les deux auteurs signent une adaptation très libre, gardant surtout le héros riche et suicidaire qui commandite son propre meurtre et le valet qui apporte une dimension comique. La morale reste la même (en gros c'est quand on a connu le malheur qu'on reconnaît son bonheur) mais elle reste ici plus secondaire... Arthur Lempereur, homme oisif et riche s'ennuie au point de penser au suicide malgré ses fiançailles. Après avoir appris qu'il était ruiné il demande à son ami philosophe chinois de commanditer son meurtre sous un mois. Mais s'amusant à survivre il tombe amoureux d'une autre femme, décidé finalement à rester en vie il doit retrouver son ami commanditaire pour annuler le contrat sur sa tête...

Le héros est incarné une fois de plus par Jean-Paul Belmondo qui retrouve donc De Broca après "Cartouche" (1962) et "L'Homme de Rio" et qu'il retrouvera encore plus tard avec les films "Le Magnifique" (1973), "L'Incorrigible" (1975) et (malheureusement) "Amazone" (2000). L'atour charme repose sur une star américaine, Ursula Andress encore toute auréolée du succès de "James Bond contre Dr. No" (1962) de Terence Young ; à noter que Belmondo et sa partenaire tomberont amoureux sur le tournage. Le reste de la distribution est composé d'acteurs qui ont déjà tourné sous la direction de De Broca. Jean Rochefort était déjà dans "Cartouche", et si il est encore abonné aux seconds rôles de prestige il a joué son premier rôle principal dans "Symphonie pour un Massacre" (1963) de Jacques Deray. Maria Pacôme jouait dans "Les Jeux de l'Amour" (1960) et a connu un grand succès avec "Le Gendarme de Saint-Tropez" (1964) de Jean Girault. Darry Cowl a tourné dans le segment "La Vedette" du film collectif "Les Veinards" (1963) segment "La Vedette" et retrouve Belmondo après "Sois Belle et Tais-Toi" (1958) de Marc Allégret. L'inénarrable Paul Préboist jouait "Les Sept Péchés Capitaux" (1962) segment "La Gourmandise" puis dans "Cartouche". Mario David jouait dans "Les Jeux de l'Amour", il retrouvera son acolyte Préboist dans "Oscar" (1967) de Edouard Molinaro. Plus amusant, la star Ursula Andress jouera dans un second film français où elle retrouvera Darry Cowl et Paul Préboits, ce sera pour la comédie "Liberté, Egalité, Choucroute" (1985) de Jean Yanne... Outre l'oeuvre orignel de Jules Verne, ce film est également parsemé de références à d'autres oeuvres, au film "Le Monocle rit jaune" (1964) de Georges Lautner (Oscar Hui et ses hommes de main), au film "James Bond contre Dr. NO" via son actrice principale forcément mais aussi et surtout on notera les clins d'oeil à la BD "Tintin" ; en effet, De Broca s'étaient déjà beaucoup inspiré du reporter belge pour "L'Homme de Rio" après avoir été approché pour réaliser l'adaptation "Tintin et le Mystère de la Toison d'Or" finalement réalisé par Jean-Jacques Vierne en 1961.

Mais plus encore que dans "L'Homme de Rio", cette fois il multiplie les références de façon plus pregnante avec les deux agents (Préboist-David) façon Dupont et Dupond, la tenue de Bébel/Lempereur, les cercueils qui flottent, les oranges... etc... On pourrait même pousser avec la hupette de Lempereur ! Le film démarre vite, les péripéties débutent quasiment aussitôt pour une cascade de rebondissements tout le long du récit qui se succèdent à une vitesse folle ce qui donne une sensation de manège... Qui tourne en rond, forcément ! Le film tourne ainsi autour d'un seul point, une sorte de frandole où Lempereur et son valet court après l'ami philisophe, eux-mêmes poursuivis par une armée de tueurs. Une course poursuite qui manque pourtant cruellement de conviction, jamais on a peur pour le héros, jamais on ne croit à ses tueurs caricaturaux de pacotille à tel point que le film aurait pu se terminer par un Lempereur/Belmondo se réveillant d'un sommeil perturbé. Ca va dans tous les sens, la dimension exotique ne manque pas de charme (Népal, Chine, Malaisie...), mais le film repose surtout sur l'abattage d'un Jean-Paul Belmondo au sommet de sa forme. Le film reste un joli succès populaire (2,7 millions d'entrées France) mais bien loin de "L'Homme de Rio". De Broca lui-même avouera : "Même si les enfants l'ont aimé, je n'aime pas beaucoup ce film : il y en a trop. Mais c'est de ma faute, j'en suis totalement responsable. J'ai voulu faire un super-barnum". En conclusion, une évocation d'un Tintin qui a tout d'une aventure fantasmée, il y manque juste un peu de crédibilité.

 

Note :           

13/20

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