Chocolat (2016) de Roshdy Zem

par Selenie  -  4 Février 2016, 09:44  -  #Critiques de films

Voilà un biopic qui a le mérite de nous rappeler qu'une des premières vedettes du cirque en France était noire, connue sous le pseudo de Chocolat, de son vrai nom Rapahel Padilla... Ce film est d'abord une idée du producteur Nicolas Altmayer qui a attendu qu'une star française noire soit assez connue (Omar Sy donc) pour porter le film. Le projet est alors proposé à l'acteur Roshdy Zem qui est aussi, rappelons-le, réalisateur de déjà trois longs métrages avec "Mauvaise Foi" (2006), "Omar m'a tuer" (2010) et "Bodybuilder" (2013). Ce dernier a accepté mais a repris le scénario (d'abord écrit par Cyril Gély d'après le livre de Gérard Noiriel "Chocolat, clown nègre : l'histoire oubliée du premier artiste noir de la scène française") avec Olivier Gorce, avec lequel il avait déjà travaillé sur "Omar m'a tuer"... Au début le projet était de reprendre l'aventure du duo Footit/Chocolat mais le film se focalise (évidemment serait-on tenté de dire) sur le personnage de Chocolat, même si Roshdy Zem dit avoir voulu se baser essentiellement sur le lien entre les deux artistes. Omar Sy incarne donc Chocolat, ancien esclave devenu artiste de cirque, tandis que Footit est interprété par James Thierrée, peu connu du grand public et pourtant, petit-fils de Charles Chaplin et fils d'un patron de cirque. On l'a déjà vu dans "Liberté" (2008) de Tony Gatlif et "Mes séances de lutte" (2013) de Jacques Doillon. Omar Sy est donc entre de bonnes mains. Thierrée a eu aussi la responsabilité des chorégraphies artistiques. Le duo fonctionne à merveille et on ne peut qu'acquiescer devant le choix des acteurs, sinon qui d'autres ?!

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A leurs côtés un casting solide et expérimenté, sans prise de risque, avec des acteurs dans leur élément quoi qu'il arrive, avec Olivier Gourmet, Clotilde Hesmes, Noémie Lvovsky, Olivier Rabourdin, Frédéric Pierrot. Seule la jolie Alice de Lenquesaing (fille de l'acteur Louis-Do) fait figure de novice. Le scénario sonne assez classique, de la pauvreté à la chute en passant par la gloire et le déclin. Le premier vrai soucis est cette manie très moderne et actuelle de juger une époque avec notre acuité et nos connaissances d'aujourd'hui. Le racisme de cette époque n'avait ni le goût ni la saveur du racisme tel qu'on le vit aujourd'hui. Par exemple insinuer que les spectateurs du cirque venaient par racisme voir le "cannibale" est juste aussi stupide que faux. Sans jeux vidéos ni télé, les gens allaient de toute façon au cirque... D'ailleurs, à force d'être obnubilé et de dénoncer coûte que coûte ce racisme racial, le film en est à délaisser le personnage de Footit et notamment son homosexualité qui est simplement caricaturée en une simple image, celle d'un ongle encore verni ! Mais l'équipe s'en sort avec une pirouette devenue un vrai automatisme depuis quelques temps, en affirmant déjà avant la sortie du film qu'il ne s'agit nullement d'un "biopic mais d'une fiction inspirée du livre..." ... Ce genre de précision libère le film du carcan de la fidélité historique et donc offre plus d'opportunités. On se demande bien pourquoi, car souvent la vraie vie de la personnalité n'a nullement besoin d'artifices, et c'est encore le cas ici ! Bio express, Attention SPOILER !...  Ce n'est Footit qui découvrit Chocolat et qui lui donna sa chance. Chocolat n'a jamais fait de prison (et donc n'a pas été torturé par la police française), il tombe dans l'alcoolisme suite à la mort par tuberculose de sa fille de 19 ans. Chocolat n'est pas mort dans la misère d'un simple balayeur de chapiteau, mais comme artiste clown à part entière... FIN SPOILER... Bref, en quoi les changements scénaristiques sont judicieux ou opportun ?! A croire qu'inventer une maltraitance par nos institutions plutôt qu'un deuil familial fait plus d'effet sur la dramaturgie... Un biopic pas assumé donc et au scénario bancal mais heureusement qui n'est pas dénué d'intérêt (au moins pour la reconnaissance des deux artistes) et pour le travail de acteurs et de la reconsitution d'époque. Un film pas désagréable à défaut d'être complètement honnête avec son sujet.

 

Note :               

 

11/20

 

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