La Maison de Bambou (1955) de Samuel Fuller
Film étant connu pour être le premier film hollywoodien a être intégralement tourné au Japon. Ce film est un remake de "La Dernière Rafale" (1948) de William Keighley dont le scénariste Harry Kleiner reprend son propre travail pour cette transposition nippone. Kleiner est déjà un scénariste réputé pour des films comme "Crime Passionnel" (1945) de Otto Preminger et sera au sommet avec le succès de "Bullitt" (1968) de Peter Yates. Pour ce nouveau projet les commandes reviennent à Samuel Fuller, à l'instar de son scénariste, s'il a déjà signé quelques bons films dont "Le Port de la Drogue" (1952), le meilleur reste à venir comme "Le Jugement des Flèches" (1956), "Quarante Tueurs" (1957), "Schock Corridor" (1963), "Au-delà de la Gloire" (1980) et "Dressé pour Tuer" (1982)...
Donc en 1955 au Japon, un homme qui a un secret accepte d'intégrer un gang d'ancien GI qui se sont spécialisés dans les braquages... Le rôle principal est tenu par Robert Stack vu dans "Jeux Dangereux" (1942) de Ernst Lubitsh et "Ecrit sur du Vent" (1956) de Douglas Sirk et qui deviendra surtout populaire avec la série TV "Les Incorruptibles" (1959-1963). Le chef du gang est incrané par l'excellent Robert Ryan dont on retiendra ses performances dans des films comme "Nous Avons Gagné ce Soir" (1949) de Robert Wise, "La Chevauchée des Bannis" (1959) de André De Toth ou encore "La Horde Sauvage" (1969) de Sam Peckinpah. Le japon est évidemment représenté, d'abord par le charme de Shirley Yamaguchi (ou Yoshiko Otaka) très populaire dans les années 40 et dont on retiendra surtout "Scandale" (1950) de Akira Kurosawa, puis Sessue Hayakawa l'homme à la carrière hollywoodienne débutée dès 1914, puis après un passage en France connaîtra un regain de popularité avec "Le Pont de la Rivière Kwaï" (1957) de David Lean... Le scénario est assez basique finalement mais il est enrichi de liens humains intéressants, avec l'idylle entre Eddie/Stack et Mariko/Yamaguchi d'abord puis entre Eddie et Sandy/Ryan et cette homosexualité latente du chef de gang. Par contre, Mariko reste un personnage trop en retrait, particulièrement dans la dernière partie et son dénouement même si l'idylle reste touchante.
Par contre, l'homosexualité qu semble transparaître de Sandy repose sur un côté protecteur un peu trop voyant. Symptomatique du fait que si le film est entièrement tourné au Japon les autochtones sont peu importants et ne font finalement qu'une représentation nécessaire à la crédibilité exotique du projet. D'ailleurs les critiques japonais à l'époque reprochait aussi au film d'occulter "les coutumes, la géographie et les sentiments japonais". En effet, car si on ressent la volonté de Fuller de montrer un pays entre tradition et modernisme, le film reste trop focalisé sur ses protagonistes américains occultant par là même le fait que le Japon est encore sous les cicatrices de 1945. Par contre, esthétiquement le film est un petit bijou visuel. Collaborant pour la troisième fois avec le Directeur Photo Joseph MacDonald après "Le Port de la Drogue" et "Le Démon des Eaux Troubles" (1954), Fuller signe une mise en scène au couleur pastel sublime qui met en valeur les décors d'un Japon plutôt éloigné des images d'épinal.
Note :