Le Royaume des Abysses (2024) de Tian Xiaopeng

par Selenie  -  28 Février 2024, 15:50  -  #Critiques de films

Seulement le second long métrage d'animation pour Teng Xiaopeng des années après "Monkey King : Hero is Back" (2015). Pour cette nouvelle production chinoise le réalisateur-scénariste voulait créer une aventure sous-marine car il est depuis toujours passionné du fameux roman "20000 Lieues sous les Mers" (1869) de Jules Verne. Le cinéaste précise : "Tout le monde éprouve des émotions négatives à un moment ou à un autre, et peut parfois avoir l'impression que le monde entier est sombre et terne. À travers cette oeuvre, je souhaite montrer comment nous pouvons donner du sens à une existence qui semble dépourvue de lumière, et découvrir la force nécessaire pour avancer dans nos vies." Notons que si il s'agit d'un film d'animation il existe un avertissement pour le jeune public qui peut être effrayer par l'expression de certaines thématiques, et nous confirmons : attention les moins de 8-9 ans ne comprendront sans doute pas grand chose et certains passages peuvent même faire peur aux plus émotifs

Shenxiu, fillette de 10 ans, se retrouve aspirée par les profondeurs marines alors qu'elle était en croisière familiale. Elle découvre alors un monde fantastique peuplé de créatures incroyables où elle fait la connaissance du Capitaine Nanhe qui dirige le Restaurant des Abysses. Mais le Fantôme Rouge est un danger qui va emmener Shenxiu dans une odyssée sous-marine semée d'épreuves et de nombreux secrets... Le casting voix n'est composé d'aucune star connue, ni en V.O. ni en V.F. mais certains comédiens ont travaillé sur des séries TV chinoises comme Wang Tingwen, Su Xin ou Haoran Guo tandis que le réalisateur Xiaopeng Tian se réserve le personnage du poisson clown... Le film débute comme un thriller d'épouvante ou un Film Noir avant un générique de toute beauté et empreint d'onirisme puis une première partie qui coche les cases d'un drame familial dont la victime est une enfant esseulée. En à peine 10mn le film genre de genre de façon fluide et touchante mais ce qui frappe d'abord c'est la qualité du dessin et du graphisme à en être bouche bée. Les détails sont bluffants de la texture du cheveu en passant même au léger duvet sur la joue de la fillette, en passant pat un océan (en surface) plus vrai que nature. L'effet visuel nous happe complètement quand on plonge dans les abysses où là les couleurs, les styles divers et les formes infinies envahissent le récit comme l'écran. Le réalisateur précise : "C'est pour cela que j'ai cherché des formes qui pourraient apporter de la nouveauté, ainsi qu'une certaine dose de fantaisie. Je voulais créer un océan flamboyant, gâce à des couleurs vives et riches. Je souhaitais ainsi déployer un style artistique unique, tout en espérant distinguer de cette façon le monde fantastique, aux couleurs vives, de la réalité, plus terne et grise..."

Bravo ! Force est de constater que le cinéaste a réussi son pari. En gros, le monde de l'animation se sépare entre les mangas qui font de leur personnage des occidentaux dans des histoires du folklore asiatique et les contes Disney adaptés le plus souvent de livres à succès avec au milieu, de temps à autres quelques pépites et voilà donc les chinois qui offrent une fresque sous-marine en mélo sur la détresse enfantine d'une beauté sidérante. Le film réunit tout ce qui se fait en matière technique, 2D, 3D numérique ou non, puis s'inspire logiquement des estampes traditionnelles à l'encre de chine, mais aussi et peut-être plus encore de l'impressionnisme et on reconnaît même des influences directes comme un plan clairement tiré de la fameuse toile "La Nuit Etoilée" (1889) de Van Gogh. L'évolution du récit paraît un peu confus par moment mais le rythme est soutenu, les personnages attachants entre un vieux morse de mer et un capitaine Joker des mers mais on s'y perd aussi tant ça part un peu dans tous les sens. Mais c'est beau, fascinant à une vitesse de narration qui ne permet pas de souffler jusqu'à cette dernière partie. Un dernier acte un peu tiré en longueur et surtout trop pathos, le tire-larme est pourtant inutile ; une scène certe magnifique mais superflue, et 5-10mn sont redondantes. Dommage, on tenait sinon le chef d'oeuvre de l'animation des années 2020. Néanmoins, le film reste une claque visuelle, l'animation est éblouissante de magie, sublime feu d'artifice dans une histoire qui reste très mature. Le plus beau film 2024 à ce jour.

 

Note :                 

17/20
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