Elle (2016) de Paul Verhoeven

par Selenie  -  26 Mai 2016, 09:23  -  #Critiques de films

Après avoir quitté l'Amérique avec brio en signant l'excellent "Black Book" (2006), le réalisateur néerlandais Paul Verhoeven avait dû faire appel au crowdfounfing pour son dernier long métrage "Tricked" (2012) sur lequel les participants faisaient évoluer le scénario... Sur ce projet-ci il adapte le roman "Oh..." du romancier français Philippe Djian auquel on doit entre autre "37.2 le matin". Le réalisateur souhaitait le tourner aux Etats-Unis avant de s'apercevoir que le sujet, et le rôle principal, étaient trop sulfureux pour avoir une réelle liberté. Bien lui en a pris puisqu'il tourne là son premier film français, en langue française, pour lequel Verhoeven a même appris la langue de Molière afin de pouvoir diriger directement son équipe. Par là même le réalisateur a tourné ce film sans son équipe habituelle, une belle prise de risque. Le seul paramètre qui change vraiment vis à vis du roman est que l'héroïne, Michèle, travaille dans le milieu du jeu vidéo plutôt que dans le cinéma. Cette dernière est donc interprétée par Isabelle Huppert, grande dame du cinéma habituée des rôles ambigus et psychologiquement instables.

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On suit donc Michèle, victime d'un viol mais qui ne s'apitoie pas sur son sort et devient une sorte de mante religieuse, vénéneuse et froide. Un point de vue récurrent chez Verhoeven, on se souvient notamment du déroutant "La Chair et le Sang" (1985). Evidemment tout le film est porté par cette vision spéciale du réalisateur sur le rapport entre la victime et le crime, entre la victime et son bourreau. Car finalement c'est que chaque victime a sa façon de survivre et de surmonter le traumatisme à l'instar du beau "Vivante" (2001) de Sandrine Ray où la victime multipliait les expériences pour se sentir revivre. Cette vision est plus consensuelle pour le public, alors que Verhoeven titille les consciences et mélange les styles entre thriller troublant et drame familial en y instillant des moments frôlant la farce malsaine. Une chose est sûre, c'est que le réalisateur n'a rien perdu de sa verve et de son envie de bousculer les carcans et ça fait un bien fou ! On apprécie le casting, français mais hétéroclyte dans sa composition des styles avec de beaux rôles de composition. Virgnie Efira en bigote un peu coincée (un peu, écouter bien sa dernière réplique !), Laurent Lafitte en bonhomme bien sous tous rapports, Anne Consigny sans doute moins sage qu'il n'y parait, Charles Berling le seul dans un rôle sur mesure, et enfin la grand Isabelle Huppert tout en force fragile, en méchanceté "à l'insu de son plein gré". Le seul vrai bémol vient du suspense, on devine qui est l'agresseur dès le début ; exemple : Kurt est trop l'archétype du mec idéal à soupçonner... Néanmoins, l'ovation de 7mn au dernier festival de Cannes (Verhoeven n'y était pas revenu depuis "Basic Instinct" en 1992 !) est méritée pour ce thriller sulfureux (plus dans ce qu'il peut y suggérer que ce qu'il peut y montrer à l'image) qui ne manque pourtant pas de quelques passages où le rire sera de circonstance. Un très bon film, bravo Paul Verhoeven, ça change des soupes trop nombreuses.

 

Note :              

 

17/20 
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Hello ! <br /> Première fois que je poste ici, car j'aime bien vos articles, cependant je ne me reconnais pas dans celui-ci : Elle a pour moi quelques arguments, le scénario moins conventionnel que de coutume au cinéma, le rôle d'Isabelle Huppert, le jeu victime/bourreau. Mais la lenteur du scénario, son découpage raté (trop d'éléments déjà devinés par le spectateur) pour au final une sensation de soupe froide : toute cette attente pour ça ? On se demande presque à quoi servent les scènes du fils, est-ce un film sur son agression ou "sur la vie d'une femme", le viol n'en étant qu'une partie ? Trop de sujets sont mélangés, presque mis sur le même plan, ou plutôt indifférenciés, ce qui est cohérent près tout : ce personnage est indifférent à presque tout. Difficile d'être ému par un film boiteux et autiste. 10/20 pour être optimiste :p
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