Suite Française (2015) de Saul Dibb
Second long métrage du réalisateur du très beau "The Duchess" (2008) avec Keira Knightley et Ralph Fiennes. Cette fois il quitte l'Angleterre du 18ème pour la France des années 1941-1942... Un film ambitieux adapté d'un roman au destin unique. "Suite Française" est un roman tiré des écrits de Irène Némirovsky, des écrits perdus pendant près de 50 ans et qui ont été publiés par la fille de l'auteur (qui décédera avant de voir le film) en 2004 récoltant le prix Renaudot. Ce qui est étonnant que c'est les écrits de Irène Némirovsky ont été redigés avant 1942 (date de sa déportation à Auschwitz et de sa mort), ce qui interpelle sur ce qu'elle imaginait après. En effet ses écrits sont composé de 5 tomes, "Tempête en juin" sur l'exode, "Dolce" sur le quotidien dans le village occupé, "Captivité" est inachevé tandis que les 2 derniers n'ont que leur titre "Batailles" et "Paix"...
Un livre au destin d'une belle richesse donc pour un film ambitieux. Outre le travail sur la reconstitution inhérente au genre (tourné à Marville, village sans aucune signalisation, ni magasin ce qui évite plus facilmeent les anachronismes), on salue le travail presque invisible sur la musique (jazz allemand des années 30 par Alexandre Desplat qui a nommé le morceau au piano justement "Dolce") et le choix de tourner en pellicule 35mm, ce qui donne un grain qui sied mieux au film que le numérique toujours plus lisse. L'histoire est complexe, le scénario a dû être travaillé de façon à éviter quelques passages, une évidence puisque l'auteur n'a pas eu le temps nécessaire pour avoir un certain recul sur la période. Néanmoins le récit permet une bonne description du quotidien lorsqu'on a un occupant a hébergé chez soi, des corbeaux au manque d'intimité en passant par le marché noir et la solitude. Un très beau film sur cette époque finalement assez peu traitée au cinéma avec un casting prestigieux, international et hétéroclyte, du belge Matthias Schoenaerts aux américaines Michelle Williams et Margot Robbie (dans un tout petit rôle) en passant par le couple à la ville Sam Riley-Alexandra Maria Lara et nos "franco-britanniques" Lambert Wilson et Kristin Scott-Thomas. Formellement assez classique mais idéal pour le film, on apprécie une idylle montrée autrement, le devoir de chacun s'imposant presque subrepticement. Un beau et bon film.
Note :