A Bout Portant (1964) de Don Siegel
Ce film est la troisième adaptation de la nouvelle "Les Tueurs" (1927) de Ernest Hemingway. Se succède ainsi des films dont l'importance historico-cinématographique est loin d'être négligeable. En effet le premier film librement inspiré de la nouvelle est le chef d'oeuvre du Film Noir "Les Tueurs" (1946) de Robert Siodmak qui fit des stars ses acteurs Burt Lancaster et Ava Gardner. Il y eût ensuite le premier court métrage de fin d'étude, fidèlement adapté de la nouvelle, "Les Tueurs" (1956) de Andreï Tarkovski (qui sera bientôt un des plus grands cinéastes russes) et enfin ce film signé Don Siegel. Ce dernier film est déjà connu pour des films comme "L'Invasion des Profanateurs de Sépultures" (1956) et "L'Enfer est pour les Héros" (1962) et qui deviendra particulièrement connu pour son association avec Clint Eastwood et notamment "L'Inspecteur Harry" (1971)...
Tout aussi librement inspiré de la nouvelle que la version 1946 ce film est aussi différent des deux autres versions précédentes que complémentaires. En effet, les trois films s'enrichissent mutuellement pour donner des histoires différentes mais liées entre elles sur un même fil rouge (les deux tueurs et la victime qui attendait la mort), chaque film donne donc un point de vue différent sur une même affaire. Pour cette version 1964 Don Siegel tourne en couleur (sublime !) et choisit un casting solide avec un quator qui ne manque ni de charisme ni de charmes. Lee Marvin joue un des tueurs et Angie Dickinson en atout glamour ont en commun d'avoir tourné avec John Wayne. Le premier dans "L'Homme qui tua Liberty Valance" (1962) et "La Taverne de l'Irlandais" (1963) tous deux de John Ford tandis que Angie Dickinson faisait tourner la tête du Duke dans le chef d'oeuvre "Rio Bravo" (1959) de Howard Hawks. A leurs côtés on trouve John Cassavetes (qui n'est pas encore le cinéaste auteur de "Une femme sous Influence" en 174 et "Meutre d'un bookmaker chinois" en 1976) qui retrouvera Lee Marvin pour le film de guerre "Les 12 Salopards" (1967) de Robert Aldrich. Ce film est aussi le dernier long métrage d'un certain Ronald Reagan (discours "fondateur" cette même année 1964, élu gouverneur en 1967 et futur Président des Etats-Unis en 1981-1989)...
Dans ce récit les deux personnages principaux sont les deux tueurs (qui sont très secondaires dans la version de Siodmak par exemple), on les suit après qu'ils aient assassiné leur cible. Car ne comprenant pas pourquoi leur victime semblait les attendre sereinement ils décident de comprendre et de retrouver leur commanditaire. On suit donc les deux tueurs dans leur enquête, de rencontre en rencontre jusqu'à ce qu'ils comprennent le pourquoi du comment. Un des gros points forts du film c'est le professionnalisme évident de ces tueurs (peur de rien et violence facile même contre les femmes) allié à une certaine éthique "humaine" qui les pousse à comprendre leur seule mission qui ne semble pas logique à leurs yeux ("la seule personne qui n'a pas peur de mourir est celle qui est déjà morte !"). Ensuite on peut peut-être chipoté sur une résolution de l'affaire un peu trop simple et limpide, mais de la classe des tueurs à celle de Angie Dickinson en passant par la partie automobile, Don Siegel signe un polar esthétiquement sublime, assez fascinant et qui contraste merveilleusement bien avec les personnages qui sont aussi beaux que leurs morales est douteuses. A conseiller et à voir, peut-être en voyant "Les Tueurs" de Siodmak avant...
Note :