L'Amour est une Fête (2018) de Cédric Anger
Nouveau film de Cédric Anger qui, après les médiocre "Le Tueur" (2008) et "L'Avocat" (2010) avait réussi un très bon film avec "La Prochaine Fois je Viserai le Coeur" (2014) avec un certain Guillaume Canet. Le réalisateur retrouve ici son acteur qu'il associe avec son ami Gilles Lellouche, les deux acteurs (et réalisateurs eux-mêmes) se trouvent donc pour leur 8ème collaboration après "Rock'n Roll" (2017) signé du premier et en attendant le prochain "Le Grand Bain" (2018) signé du second... Cédric Anger voulait réaliser un film sur le milieu du porno français des années 70-80, expliquani qu'il y avait une certaine insouciance à cette époque qu'il explique : "Le cinéma pornographique français de ces années-là est inséparable de la libération des moeurs post-68. Il est fabriqué avant tout par des gens qui s'amusent, pour qui ces tournages sont des moments de vacances et de plaisir. Il faut bien comprendre qu'ils ne tournaient pas ces films par nécessité financière, mais parce qu'ils en avaient envie. D'ailleurs la plupart des actrices, acteurs et réalisateurs de cette époque sont plutôt des petits-bourgeois branchés, qui aiment faire la fête et ne se soucient pas trop du lendemain. Brigitte Lahaie par exemple était fille de banquier, elle a tourné par plaisir, pour s'affirmer et puis pour provoquer sa famille. la plupart de ces actrices vivaient de leur métier de façon naturelle. Si certaines étaient payées au "black", la majorité avait droit aux congés spectacles et aux Assedic, comme les autres actrices. Les acteurs, pareil."...
Pour montrer cette époque porno de la fin de ces années souvent nommées "Parenthèse Enchantées" le cinéaste y place une intrigue policière. On suit donc deux hommes qui montent leur affaire de peep-show, mais l'ambition les amène à voir plus grand et ils commencent à produire des petits films "internes" avant de se lancer dans le long métrage avec un grand X... Les deux hommes sont évidemment incarnés par le duo Canet-Lellouche. Derrière eux un producteur interprété par Michel Fau, acteur peu présent sur grand écran mais plus réputé sur les planches des théâtres. Le réalisateur de X est joué par l'excellent Xavier Beauvois, lui-même réalisateur pour qui d'ailleurs Cédric Anger avait débuté comme scénariste des films "Selon Matthieu" (2000) et "Le Petit Lieutenant" (2004). Evidemment pas mal de jolies filles parmi lesquelles Elisa Bachir Bey aperçue dans "Babysitting 2" (2015) de Nicolas Benamou et Philippe Lacheau, Camille Razat vue en fille de boite de nuit dans "Rock'n Roll" de Canet et en prime une certaine Marylin Jess ex-star du X des seventies à l'instar de Brigitte Lahaye... Anger veut insister sur cette "insouciance" du milieu et surtout de son époque et il y réussit parfaitement. Mais on y décèle aussi parfois quelques indices qui indiquent les problèmes, l'enquête policière évidemment mais aussi la jeune fille qui continue après avoir râtée ses examens et la violence inhérente au milieu même. La vraie bonne idée est de ne pas se focaliser sur l'enquête policière qui ne reste qu'un prétexte pour "infiltrer" le milieu et nous immerger de façon presque ludique dans le porno "amicale et familiale".
L'autre bonne idée est l'évolution même du récit où on passe du peep-show glauque et étroit à un crépuscule érotico-romanesque, comme un message d'un optimisme qu'on sait, nous, desespéré... Les comédiennes sont jolies ce qui ne gâche rien (coup de coeur pour Camille Razat), les acteurs aussi et on met un gros bonus pour la performance de Michel Fau qu'on aimerait décidément voir plus souvent sur grand écran. Pour la BO un très bon travail également, outre les morceaux de l'époque on note le thème signé du compositeur Grégoire Hetzel, fidèle de Anger. Ce dernier voulait un film sur la période bénie du porno français, qui va de pair avec la fin de la "Parenthèse Enchantée" (cause SIDA et industrialisation du milieu) sans pour autant être lui-même trop "voyeur". Anger précise que l'un des plus grands films sur la liberté de moeurs est "Jules et Jim" (1962) de François Truffaut, Anger précise que Truffaut parlait du "caractère scabreux des situations et de la pureté de l'ensemble" ; Anger ajoute : "J'espère qu'il y a un peu de ça, une émotion malgré la nature des émotions. Et de la beauté là où on pense qu'il y a de la vulgarité...."... Oui, ce film en a effectivement, un peu !... Anger signe une comédie douce-amère, où la fantaisie et la liberté ambiante donnent à sourire, on y rêve presque et, pourtant, on perçoit une espérance vaine de mélancolie. Un bon et beau film, un hommage certe sans doute enjolivé un chouïa mais plaisant depar sa bonne humeur nostalgique.
Note :