Au Revoir Là-Haut (2018) de Albert Dupontel
A première vue, l'association Dupontel-"Au Revoir Là-Haut" peut laisser sceptique surtout pour le lecteur du roman de Pierre Lemaître. Si le livre transporte le lecteur, le film ne déçoit pas. Un roman à l'atmosphère lourde où deux amis à la fin de la Grande Guerre tente de survivre par tous les moyens jusqu'à monter une arnaque aux monuments aux morts. Une ambiance pesante dans un monde en pleins bouleversements que l'on retrouve dans le film. On suit ces deux amis qui se débattent pour survivre, Albert (Albert Dupontel) prenant en charge une gueule cassée, Edouard (Nahuel Pérez Biscayart), brisé de par son sort.
Ambiance qui est adoucie dans le film par un mélange savamment réussi entre le comique apporté par certains personnages et certaines scènes et grâce à une touche poétique qui entoure le film. L’incarnation parfaite du masque derrière lequel on se réfugie pour pouvoir vivre voire survivre. Le choix des acteurs est du meilleur effet, on a pitié de Dupontel, on trouve ignoble Laffitte, son appât du gain et de la renommée, on est touché par ce père dur et froid qui cherche à se repentir avec Arestrup. Et surtout, sans voix, sans dialogue, on s’attache, on s’émeut, on rit et on pleurs avec le personnage poignant incarné par Pérez Biscayart. Quelques digressions entre le livre et le film sont à noter, comme le rôle plus important et touchant de Louise, l’oubli des traumatismes psychologiques d’Albert Maillard à la suite de la Guerre mais rien qui ne gâche le plaisir du lecteur – spectateur jusqu’à la fin du film où l’on peut être déçu de la fin du personnage d’Henri d’Aulnay-Pradelle.
Une scène mêlant le pathétique et le comique pour un juste retour des choses de son personnage a été conçu pour bien « achever » le film. Déception car l’œuvre de Lemaître nous livre une fin bien plus misérable pour ce personnage, oublié de tous, ignoré des siens, errant dans la pauvreté. A ce bémol, il faut tout de même souligner la fin d’Edouard, d’une plus grande poésie après une rencontre avec son père, scène créée pour le film. Une fin tragique dans la lignée du masque porté, belle et touchante, rendant au drame toute son importance. La folie qui transparaît dans les autres films de Dupontel s’efface pour laisser la place à une œuvre plus intense dû au matériau initial qu’est le livre. On retrouve, quand même, cette touche particulière dans la scène de l’hôtel où l’instabilité d’Edouard est mise en avant dans une destruction de portraits. Un film dans lequel le rythme soutenu, où les différentes facettes du comique au drame amène le spectateur loin de l’ennui. Un film français à voir, à revoir, à recommander sans hésiter.
Note :