A.I. Intelligence Artificielle (2001) de Steven Spielberg.

par Selenie  -  15 Janvier 2018, 09:23  -  #Critiques de films

Ce film est un des projets avorté du génial Stanley Kubrick qui travaillait depuis longtemps sur l'adaptation de la nouvelle "Les Supertoys durent tout l'été" (1969) de Brian Aldiss. Malheureusement après avoir travaillé dessus avec pour résultat 80 pages de scénario, le maître est mort en 1999 en laissant en testament le projet à son ami Steven Spielberg. Popur l'anecdote Kubrick avait délaissé un projet quelques années plus tôt pour ne pas concurrencer "La Liste de Schindler" (1993) de Spielberg... Ce dernier reprend donc le projet, et force est de constater que jamais on ne comprendra le choix de Kubrick tant la différence de style entre les deux hommes est flagrante, autant dans le fond que dans la forme. Pour le rôle principal du jeune robot c'est Haley Joey Osment qui est choisi, alors tout auréolé du succès du film "Sixième Sens" (1999) de M. Night Shyamalan dont il est la grande révélation. A ses côtés, un robot sex toy incarné par Jude Law alors en pleine ascension entre "Stalingrad" (2000) de Jean-Jacques Annaud et "Les Sentiers de la Perdition" (2002) de Sam Mendes. Les "parents" sont joués par le duo Frances O'Connor et Sam Robards (fils de Jason Robards et Lauren Bacall). On reconnait les expérimentés Brendan Gleeson et William Hurt tandis que le casting est enrichi des voix (en V.O.) des stars Ben Kingsley, Chris Rock, Robin Williams et Meryl Streep... 

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Donc après "Il Faut Sauver le Soldat Ryan" (1998) et avant "Minority Report" (2002) Spielberg poursuit la tâche de son ami, en gardant les 80 premières pages d'un scénario qu'il poursuit donc avec Ian Watson, un autre romancier de SF, tandis que le cinéaste s'entoure de son équipe de fidèles dont le compositeur John Williams et le directeur photo Janusz Kamisnki. On est dans une époque lointaine où les humains se sont habitués à des serviteurs robots (appelés Méca pour mécanique en opposition aux Orga-nique) qui ne cessent d'évoluer jusqu'à ce robot-enfant plus vrai que nature qu'est David (Osment). Ce dernier est programmé pour aimer ses "parents", ce qui est plus difficile est d'être aimé réellement en retour, ce que va vouloir à tout prix David qui va partir en quête de la fée bleue, issue du conte Pinocchio avec lequel David va se reconnaître. La première grande idée est de faire de David un robot qui dépasse l'entendement dans le réalisme de la confection, d'où le choix de faire jouer David par un acteur de chair qui accentue le malaise et le trouble quand les humains entrent en contact avec lui. Si on parle de l'asservissement des robots ce n'est pas tant le sujet, mais plutôt le racisme primaire puisque le réalisme de David pousse donc les gens à réagir à posteriori. En effet, David est un robot invisible à l’œil nu et les réactions s'opèrent donc après avoir été informé de l'état réel du petit robot. C'est bel et bien les réactions des humains qui poussent David à vouloir faire comme Pinocchio, à savoir devenir un vrai petit garçon.

On reconnait bien là le style Spielberg, un conte dans la lignée de "E.T.", avec en prime une fin qu'on pourrait qualifier de happy end et des séquences peu subtiles comme le cirque de la chair et sa métaphore lourdingue, puis cette fin interminable qui casse d'emblée le rythme et impose l'ennui comme grand final. C'est là que le film perd en puissance et qu'on se dit que Kubrick doit se retourner dans sa tombe ! Kubrick n'aurait pas mis autant de mièvrerie, de pathos, de bons sentiments, et il aurait travaillé ses personnages plus en nuance dont, surtout, celui de Gigolo Joe (Law). Pour ce dernier, Kubrick avait par exemple prévu un robot Toy Boy vraiment débauché, vil et lâche de surcroît alors que Spielberg en fait un gentil prostitué en dilettante. On salue le travail sur le maquillage, le conte en trois actes (naissance et adoption, fuite et quête, épilogue), les performances d'acteurs évidemment avec les deux principaux (même si David est tête à claque quand même, faut supporter !) mais aussi Frances O'Connor qui joue une maman déchirée et déchirante. Par contre, on ne peut que hurler par le côté édulcoré à la Disney de Spielberg, un point de vue ahurissant de trahison quant on sait ce qu'en aurait fait un Kubrick...

 

Note :             

14/20

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