Le Gentilhomme de la Louisiane (1953) de Rudolph Maté.
Dans un premier temps on pense à un western, fin 19ème, bord du Mississippi, poker, dangers, mais si l'époque et le décor sont bien là, on est vite plus dans le film d'aventure romanesque et le charme du Sud, les toilettes des dames de St Louis rêvant de Paris et les coulisses du monde des affaires. Aux commandes le très bon Rudolph Maté (dont son chef d'oeuvre sera toujours "Mort à l'Arrivée" en 1950) qui met en scène le scénario signé le réputé Seton I. Miller, fidèle de Howard Hawks à ses débuts (dont "Scarface" en 1932) et de Michael Curtiz (surtout fin des années 30 avec "Les Aventures de Robin des Bois" en 1938). En haut de l'affiche, la star Tyrone Power (citons "Arènes Sanglantes en 1941 de Rouben Mamoulian, "Le Cygne Noir" en 1942 de Henry King et "Le Charlatan" en 1947) qui joue les jolis cœurs aux côtés de deux belles actrices en début de carrière, Piper Laurie (au début de sa carrière pour la future maman de "Carrie au bal du diable" en 1976 de Brian De Palma) et Julie Adams qui connaîtra son moment de gloire juste après dans "L’étrange Créature du Lac Noir" (1954) de Jack Arnold.
On croise également la gueule de John McIntire, bien connue des amateurs de westerns surtout. Pour l'anecdote, on reconnait au casting un certain Guy Williams (Andre Brion), futur interprète de la série TV "Zorro" alors même que Tyrone Power reste un des acteurs mythiques s'étant caché derrière le masque dans "Le Signe de Zorro" (1940) de Rouben Mamoulian, mais on reconnait (plus difficilement, dans le rôle d'une demoiselle d'honneur) dans une de ses toutes premières apparitions la suédoise Anita Ekberg, celle qui sera à jamais le mythe de "La Dolce Vita" (1960) de Federico Fellini... On suit donc Mark Fallon, joueur de poker professionnel mais charmeur loyal et droit, qui va en peu de temps avoir comme ennemi un jeune homme, dont notre héros tombera amoureux de sa sœur et qui deviendra ami avec le père. Mais comme il est si bien dit dans le film : "Une dette de jeu, c'est une dette d'honneur !". Si le film démarre avec poker et règlement de compte sur un bateau à aube, le récit vire ensuite dans le drame romanesque où convenances et honneur sont l'apanage des hautes sphères de Louisiane, ce qui n'empêche ni les trahisons ni les jalousies.
Technicolor, décors et costumes font de ce film une merveille pour les yeux, les charmes de l'exotisme de Louisiane en sus. On apprécie pourtant aussi le scénario qui allie parfaitement aventure (vengeance, poker, arnaque) avec la romance, d'abord avec une histoire d'amour impossible, la loyauté des sentiments et les aléas du destin. Tyrone Power au sommet de son élégance joue un héros qui manque sans doute d'aspérité, il est l'étalon de droiture sans une once de défaut. Face à lui, deux femmes, une femme brune, belle et prête à l'amour, puis une jeune femme rousse, pourrie gâtée et sous l'emprise de son frère. Même si on est aux limites de l'Ouest on est encore dans une Louisiane aux accents du Sud et au passé français avec ce qui reste de serviteurs noirs et de duels dignes du Vieux Continent. Un film de seulement 01h40 mais d'une jolie densité. On ne s'ennuie jamais, un peu plus de souffle et de lyrisme aurait pu donner une fresque plus conséquente. Néanmoins Rudolph Maté signe un très beau et très bon film.
Note :