Rio Conchos (1964) de Gordon Douglas
Un western méconnu d'un réalisateur expérimenté, Gordon Douglas qui sera surtout connu pour des polars, "Tony Rome est dangereux" (1967), "Le Détective" (1968) et "La femme au ciment" (1968) tous avec Frank Sinatra. Et pourtant, ce western s'avère être un de ses meilleurs films. Le film est écrit par deux scénaristes, Joseph Landon et surtout Clair Huffaker qui est aussi l'auteur du roman "Guns of Rio Conchos" (1958) dont c'est ici l'adaptation. Rappelons que Huffaker est également connu pour avoir été le scénariste de "Los Comancheros" (1961) de Michael Curtiz et qui signera "La Caravane de Feu" (1967) de Burt Kennedy et "Les 100 Fusils" (1969) de Tom Gries. On suit donc un officier de l'armée régulière qui doit accepter de travailler avec un autre officier radié pour retrouver un chargement d'armes aux mains d'un ex-colonel de l'armée sudiste qui tente d'installer une sorte d'état sudiste sur les rives du Rio Conchos, un affluent du Rio Grande... Au casting pas de grandes stars mais des "gueules" bien connues, déjà vues maintes fois sur grand écran et notamment dans des westerns. On reconnait dans les deux premiers rôles le vétéran Richard Boone déjà vu dans "L'Homme qui n'a pas d'Etoile" (1955) de King Vidor et "Alamo" (1960) de et avec John Wayne, puis Stuart Withman vu justement dans "Los Comancheros" (1961) de Michael Curtiz. Un reconnait un autre acteur particulièrement expérimenté, Edmon O'Brien vu dans "Les Tueurs" (1946) de Robert Siodmak et "L'Homme qui tua Liberty Valance" (1962) de John Ford.
A leurs côtés deux inconnus, un certain Jim Brown champion de football américain pour qui c'est le 1er film qui lancera vraiment sa carrière avec des succès comme "Les 12 Salopards" (1967) de Robert Aldrich et "Les 100 Fusils" (1969) de Tom Gries où il embrassait Raquel Welsh, ainsi que la belle Wende Wagner sublime mannequin qui sera surtout connue pour son rôle de Tigre, la petite amie de Rosemary dans "Rosemary' Baby" (1967) de Roman Polanski... Le film démarre plutôt classiquement, un duo dépareillé pour une mission plus ou moins impossible dans un far west d'épinal. Mais les personnages sont particulièrement bien écrit, une dose psychologique non négligeable (le douloureux passé de l'ex-soldat guide, sa haine envers le chef indien, la mégalomanie du colonel sudiste...), et surtout des "héros" qui sont loin d'avoir les qualités inhérentes au genre. En effet, le guide et soldat radié est un raciste tueur d'indiens viscéral, le mexicain est un jouisseur égoïste, l'officier responsable de la mission est sans envergure (à tous points de vue, Stuart Whitman est lui-même peu charismatique).
Outre les personnages bien écrits, offrant des profils psychologiques intéressants le film est aussi efficace au niveau action avec une violence plutôt inédite dans un western à cheval entre le classicisme de l'Âge d'Or et le style crépusculaire qui arrive avec Sam Peckinpah et Martin Ritt. Mine de rien la tension monte d'un cran à la fin avec une conclusion mi-figue mi-raisin. On aime particulièrement la folie du colonel sudiste, cette mégalomanie qui nous fait penser à quelques fantasmes nazis sur une renaissance de leur Reich. Il est par contre dommage que la bataille finale soit assez mal éclairée créant un flou plutôt frustrant. Au final Gordon Douglas signe un western solide, dense, efficace, qui ne manque pas d'une certaine ambition. Un film qui mérite d'être plus reconnu.
Note :