L'Homme qui tua Don Quichotte (2018) de Terry Gilliam
L'un des plus fameux serpent de mer du Septième Art sort enfin en salle après des tournages aux péripéties devenues légendaires. Rappelons pour faire court (Tout savoir ici !) que l'ex-Monty Python tient ce projet depuis le début des années 90, pour un tournage en 2001 avec le duo Jean Rochefort et Johnny Depp dans les rôles principaux mais après les intempéries et une chute de cheval de Rochefort (il ne montera plus jamais...) le tournage tombe à l'eau au bout de quelques journées. Cette première tentative donnera le documentaire "Lost in la Mancha" (2003) de Keith Fulton et Louis Pepe. Il faudra attendre 2008 pour que Gilliam s'y attelle de nouveau et faudra attendre encore bien des rebondissements lui valant le titre de "film maudit" avec des castings tout aussi mouvementés avec des nomms comme Robert Duvall et surtout John Hurt... D'ailleurs le film est finalement dédié à Jean Rochefort et John Hurt, tous deux pressentis et tous deux morts en 2017... Un tel destin fait que le scénario d'origine a été lui aussi beaucoup remanié, où comment l'oeuvre mythique (1605-1615) de Miguel De Cervantès est devenu une histoire hybride mixée avec le roman "Un Yankee à la cour du roi Arthur" (1889) de Mark Twain. Gilliam signe cette adaptation avec le scénariste Tony Grisoni avec qui il avait déjà travaillé sur "Las Vegas Parano" (1998) et "Tideland" (2005). Ce dernier donnera ainsi son nom au réalisateur Toby Grosini... Car en effet, l'autre héros aux côtés de Don Quichotte est un réalisateur. L'idée par ailleurs excellente, est de créer un décalage entre l'époque de Don Quichotte et le tournage d'un film d'aujourd'hui, le choc des époques permet un délire plus franc et surtout, permet à Gilliam de placer des clins d'oeil à son propre aventure de cinéma.
Donc, au final, les deux rôles principaux Le Cordonnier/Don Quichotte et Toby/Sancho sont respectivement incarnés par Jonathan Pryce et Adam Driver. Notons que Pryce joue là son 4ème film avec Gilliam après "Brazil" (1985), "Les Aventures du Baron de Munchausen" (1988) et "Les Frères Grimm" (2005)... A leurs côtés notons Dulcinée qui est jouée par la jolie Joana Ribeiro, entourée de quelques acteurs plus connus comme la non moins jolie Olga Kurylenko, Stellan Skarsgard, Jordi Molla, Sergi Lopez et Rossy De Palma (très sous-exploitée malheureusement)... L'idée de départ, soit mixé "Don Quichotte" avec "Un Yankee..." est particulièrement judicieuse pour un récit ébouriffant, moderne et rythmé. Par contre, on remarque dès les premières minutes que les effets spéciaux ne sont pas à la hauteur (Quichotte et le moulin, les géants...). Mais évidemment, le film est si attendu, l'appétit si fort qu'on est prêt à passer outre...
Le film peine à démarrer, on décèle alors un petit manque de folie pour une narration un peu trop sage. Il faut attendre près d'une moitié de film pour voir l'histoire prendre un peu plus son envol et percevoir enfin le lyrisme et le surréalisme gilliamien. Une aventure à la fois touchante et savoureuse, souvent maladroite malgré tout mais semée de fulgurances et de grâce. Le soucis, pour être honnête, c'est que tant d'année à attendre et après tant de catastrophes nous pousse à la clémence et à l'indulgence. On sent la sincérité de fond mais on sent aussi que Gilliam s'est peut-être précipité sur la fin sans doute trop pressé d'y arriver. En conclusion Gilliam signe une fable touchante et inspirée mais qui semble inaboutie. Un film sur les affres de la création qui colle parfaitement à son sujet mais à tel point qu'il y a aussi ce petit truc en moins qui font que ce film a gardé un soupçon de maudit en lui. Un bijou un peu terne comparé à l'attente et à l'envie initiale de son auteur. Néanmoins, Gilliam signe un film riche de trésors et assez dense pour ne pas être ennuyeux. A voir et à conseiller.
Note :