The Hate U Give (2019) de George Tillman Jr.

par Selenie  -  25 Janvier 2019, 16:32  -  #Critiques de films

Enième film militant, un sous-genre en soi aux Etats-Unis qui gagne un regain d'intérêt depuis quelques temps. Cette fois il s'agit de l'adaptation du roman éponyme (2017) de Angie Thomas, la romancière a commencé, alors qu'elle était étudiante, à écrire après le drame de 2009 qui a d'ailleurs été adapté au cinéma avec "Fruitvale Station" (2013) de Ryan Coogler... Le titre fait référence au concept "Thug Life", acronyme de "The Hate U Give Little Infants Fucks Everybody" (la haine qu'on inculque à nos enfants finit par tous nous détruire) qu'on doit au rappeur Tupac Shakur (qui n'était pas pourtant dernier dans la haine !)... On suit l'adolescente Starr Carter qui vit dans un quartier pauvre principalement habité par des afro-américains mais elle fréquente une école privée élitiste majoritairement suivie par des élèves blancs. Son destin change quand un jour son meilleur ami est tué par un policier. Elle est témoin, on crie à la bavure et soudain l'équilibre dans lequel elle vivait devient fragile... Le projet est dirigé par le réalisateur George Tillman Jr. qui a signé auparavant "Les Chemins de la Dignité" (2001) et "Notorious B.I.G." (2009), l'ironie du sort voulant que ce dernier film soit le biopic sur le rappeur rival de Tupak Shakur !... Plus étonnant, le scénario a été confié à Audrey Wells plus habitué aux comédies de "George de la Jungle" (1997) de Sam Weisman à "Mes Vies de Chien" (2017) de Lasse Hallström en passant par "Les Schtroumpfs" (2011) de Raja Gosnell, que par les drames sociétaux...

 

Dans le rôle principal Starr on retrouve une future star, Amandla Stenberg aperçue en toute jeune "Colombiana" (2011) de Olivier Megaton et vue récemment dans l'énième teen movie "Darkest Minds : Rebellion" (2018) de Jennifer Yuh Nelson. A ses côtés plusieurs acteurs afro-américains pas tous très connus mais qu'on a déjà vu plusieurs fois avec Regina Hall, Issa Rae, Common, le jeune Algee Smith (rien à voir avec Will Smith) vu dans "Echo" (2014) de Dave Green et "Detroit" (2017) de Kathryn Bigelow, Russell Hurnsby vu dans "Fences" (2017) de et avec Denzel Washington et récemment dans "Creed II" (2019) de Steven Caple Jr. et, le pour le plus connu, Anthony Mackie qui incarne Falcon dans la saga "Avengers" de chez Marvel... On est dans un film militant et il assume tout en tentant d'éviter tout manichéisme. Ainsi l'héroïne est une élève brillante loin du cliché habituelle de l'ado black du ghetto, sa famille a su éviter ou se relever des pièges du ghetto, la police est aussi black parfois cool ou pas, et l'héroïne a un petit copain blanc pour bien montrer que les blacks eux ne sont pas racistes... etc... Malheureusement les petites touches pour éviter le manichéisme ne sentent pas franchement la pure sincérité, mais plus une obligation d'éviter justement ce jugement. En clair, le film impose un point de vue unilatérale qui manque d'objectivité. Ca commence avec l'accident, déclarer bavure avant même tout jugement (un comble !), car à y regarder de plus près  les premières erreurs sont celles de la victime, devenir dealer ce qui lui a donné l'audace ou l'arrogance de répondre à un policier qui fait son boulot et ensuite celle de choisir de désobéir à une injonction, effectivement il fait nuit, le jeune a été pour le moins plutôt peu coopératif et le policier n'est pas devin.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Certe les bavures existent, mais là il y a sujet à caution et pour porter l'histoire du film il aurait fallu une "bavure" plus nette comme dans l'excellent "Blindspotting" (2018) de Carlos Lopez Estrada par exemple... Le film est semé de maladresses du même genre, comme justifier le deal de stups alors même que le père de l'héroïne à prouver qu'on pouvait choisir une autre voie. Et pourtant un sent une véritable sincérité de fond, porté notamment et surtout par une héroïne touchante qui reste perturbée par tout ce qu'elle vit. Les autres acteurs sont très bons par ailleurs, et le réalisateur signe une mise en scène classique mais efficace. La B.O. est en cela judicieusement gérée, une musique Williamson, un pour Garden Heights qui appuie les sentiments de Starr dans sa "double vie". On a envie d'aimer ce film, en tous cas on a une empathie certaine pour ses protagonistes mais malheureusement George Tillman Jr. signe un film qui pêche par trop de stéréotypes alors même qu'il veut les éviter, avec une trop bonne dose de bons sentiments mais exclusivement black, dommage, sans compter une "bavure" de départ trop "légère". En conclusion un film intéressant par bien de points mais dont le réalisateur se prend un peu les pieds dans le tapis.

 

Note :                   

 

13/20

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