Proxima (2019) de Alice Winocour

par Selenie  -  28 Novembre 2019, 12:47  -  #Critiques de films

Après "Augustine" (2012) et "Maryland" (2015) la réalisatrice Alice Winocour change de registre, après la drame en costume et le thriller psycho-romanesque la voici dans le drame familial sur la séparation mère-fille sur fond d'exploration spaciale. La réalisatrice voulait à partir d'un sujet banal mais universel (cause et conséquence d'une femme au travail) montrer qu'une femme peut être mère et super-héroïne : "Il y a cette idée dominante, qui est une construction sociale, selon laquelle la responsabilité d'un enfant incombe plus à la mère. C'est la question féministe évoquée dans le film, montrer qu'une femme peut être à la fois une mère et une professionnelle de haut niveau". D'où le choix extrême d'une femme astronaute, milieu encore très masculin et particulièrement spécifique. La réalisatrice-scénariste co-signe le scénario avec Jean-Stephane Bron réalisateur documentariste se retrouvant donc après leur collaboration sur "Maryland".

"Proxima" est un titre tiré de plusieurs sources, d'abord c'est ainsi qu'on nomme l'étoile la plus proche d'une constellation, et c'est aussi le nom de la mission à laquelle à participer l'astronaute français Thomas Pesquet en 2016-2017... On suit Sarah, astronaute française choisit pour la prochaine mission spatiale. Elle doit suivre un calendrier strict qui va l'éloigner de plus en plus de sa fille de 7 ans Stella... Cette "super-héroïne" est incarnée par la sublime Eva Green vue dernièrement dans "Dumbo" (2019) de Tim Burton et qui joue là dans ce qui est à ce jour seulement son 2nd film français après "D'Après une Histoire Vraie" (2017) de Roman Polanski. Sa fille Stella est jouée par la petite inconnue Zélie Boulant-Lemesle que vous pouvez vous amusez à reconnaître dans son unique précédent "Un Morceau de Moi" (2012) de Nolwenn Lemesle (sa maman sans doute) où elle est le bébé à la fenêtre. Chez les collègues et proches de l'astronaute française on trouve l'américain Matt Dillon qu'on avait pas vu depuis "Du Miel dans la Tête" (2019) de Til Schweiger, et les allemands Sandra Hüller vue récemment dans "Sibyl" (2019) de Justine Triet ainsi que l'acteur Lars Eidinger qui retrouve donc pour l'occasion Eva Green après "Dumbo"... Si on suit ici une astronaute dans sa préparation, l'histoire ne va pas plus loin dans l'espace. En effet, si la conquête de l'espace est un genre en soi de "L'Etoffe des héros" (1984) de Philip Kaufman" à "First Man" (2018) de Damien Chazelle en passant par "Gravity" (2013) de Alfonso Cuaron et "Appolo 13" (1995) de Ron Howard, "Proxima" aborde et explore d'autres thèmes. Donc ne vous attendez pas à un film du même type. "Proxima" est avant tout une comédie dramatique familiale dont la trame principale reste la relation mère-fille alors qu'elles sont sur le point de se séparer longtemps et de façon très lointaine. Mais pour faire passer son message féministe la réalisatrice n'en oublie pas la mission de son personnage principal.

Le scénario est donc en constante oscillation entre la préparation professionnelle et l'intimité mère-fille seule ou ensemble. Par là même, la cinéaste s'intéresse moins à la préparation technique qu'aux relations de l'astronaute femme avec ses collègues masculins, elle doit s'imposer comme telle alors que son instinct maternelle ne lui facilité pas la tâche. Idem pour la relation mère-fille, si le personnage principal reste Sarah, jamais on oublie l'angoisse de Stella de perdre sa maman. Par contre, on se demande pourquoi avoir ajouter au drame des petits handicaps à Stella ?! Superflus en tous points, aussi bien au niveau du récit qu'un niveau quantitatif (pas un handicap, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué !). Alice Winocour reste fidèle dans la forme à son style naturaliste, voir clinique, sans perdre l'ancrage dans un réalisme où l'émotion n'est jamais mièvre ni pathos. Les deux actrices, Eva Green et Zélie Boulant-Lemesle, sont magistrale et offrent une jolie communion. Il manque peut-être juste un peu plus de tension, l'astronaute et sa fille sont séparées pour moins d'un an, et de surcroît le risque de ne pas revenir est réelle mais le film se focalise sur une séparation dont on ne ressent pas forcément la fatalité éventuelle. Néanmoins, le film est d'une justesse et d'une subtilité rare sur ces sujets (mère-fille, maman au travail). A voir et à conseiller.

 

Note :                

14/20

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