New Jack City (1991) de Mario Van Peebles
Après les années Reagan (81-89), l'explosion du capitalisme, l'impuissance de la lutte anti-drogue notamment plombé par le scandale dévoilé en 1986 sur le lien entre la CIA et les barons de la drogue, ajoutés aux tensions raciales et aux bavures policières (affaire Rodney King date de 1991 !) donne bien des occasions et surtout de l'inspiration pour Hollywood. Pas étonnant que l'acteur Mario Van Peebles s'y intéresse donc en ce début des années 90. Fils de Melvin Van Peebles, il a débuté jeune devant la caméra de son père dans "Sweet Sweetback's Baadasssss" (1971), a depuis été vu entre autre dans "Le maître de Guerre" (1986) de Clint Eastwood, puis dans la série TV "Sonny Spoon" (1988) avant de commencer à réaliser pour des séries, la sienne évidemment mais aussi pour "Un Flic dans la Mafia" (1987). Le projet de "New Jack City" (surnom du quartier de Harlem) est son premier long métrage de cinéma en tant que réalisateur. L'histoire est de Thomas Lee Wright auquel on doit le script du film "The Last of the Finest" (1990) de John Mackenzie et qui sera ensuite surtout producteur de documentaires, et en co-scénariste Barry Michael Cooper qui signera une pseudo-suite "Sugar Hill" (1993) de Leon Ichasor et qui deviendra surtout producteur par la suite. Précisons que le film participera aux effets d'émeutes importantes de ces débuts des années 90 aux Etats-Unis à l'instar des autres films du genre comme "Boyz'n the Hood" (1991) de John Singleton et "Menace II Society" (1994) des frères Hugues... Nino Brown est devenu le Parrain de Harlem grâce à l'explosion du marché du Crack. La Police de New-York décide d'y mettre fin en mettant deux policiers très différents sur l'affaire, mais qui ont un passé lié directement au trafic de stupéfiant...
Les deux policiers sont joués par le rappeur Ice-T qui venait de sortir son album "Original Gangster 2000" (1991) et qui sera surtout connu à l'écran avec la série TV "New-York Unité Spécial" (2000-...), puis Judd Nelson révélé avec les films "Breakfast Club" (1985) de John Hugues et "St. Elmo's Fire" (1985) de Joel Schumacher. Le Parrain afro- américain est incarné par Wesley Snipes qui venait de connaître une reconnaissance avec les films "Mo'Better Blues" (1990) et "Jungle Fever" (1991) tous deux de Spike Lee. Citons encore Bill Nunn vu dans "Do the Right Thing" (1989) de Spike Lee et "Glory" (1989) de Edward Zwick, Bill Cobbs vu dans "Cotton Club" (1984) de F.F. Coppola, "La Couleur de l'Argent"(1986) de Martin Scorcese et "Bird" (1989) de Clint Eastwood, Chris Rock vu auparavant dans "Le Flic de Beverly Hills 2" (1987) de Tony Scott, puis l'actrice Vanessa Williams vu dans les "Candyman" (1992-2021) de Bernard Rose et de Nia Da Costa pour le plus récent... Outre les films du même genre cité plus haut, Mario Van Peebles est clairement influencé par deux autres films majeurs, d'abord "Scarface" (1983) de Brian De Palma de façon peu subtil tant le film y fait référence dans ses dialogues ou le décor, mais le plus évident pourtant est le parallèle avec le magnifique "The King of New-York" (1990) de Abel Ferrara (dans lequel jouait déjà Wesley Snipes) dont "New jack City" pourrait être le pendant "hip hop".
Le début est plutôt bon, on entre dans le vif du sujet, la caméra surplombe New-York la majestueuse symbolisant la réussite façon American Way of Life pour aussitôt nous plonger dans les bas-fonds où le crack détruit une communauté. Un petit caïd se voit soudain avec une ambition aux dents extrêmement longues. Mais ensuite le film ne tient plus franchement la route. On a bien du mal à croire à cet immeuble-bunker au système de sécurité d'avant-garde (on est il y a plus de 30 ans !), si le rythme est soutenu et nerveux le cinéaste abuse du style clippesque avec ses clichés hip hop à foison, et que dire du duo de flics sans aucune alchimie avec un Ice-T monolithique et sans nuance tandis que Judd Nelson cabotine à outrance. Pourtant sur le fond Mario Van Peebles ne manque pas d'idée, les années Reagan sont pointées du doigt, l'immersion dans l'époque fonctionne bien, et même on s'étonne de voir l'intelligence du propos évitant ainsi tout manichéïsme en montrant que le pire ennemi de la communauté noire c'est eux-mêmes où comment ils se tuent entre eux sous couvert de compenser en jouant les robins des bois ne ce qui concerne le Parrain de Harlem. Le vrai défaut du film reste que Mario Van Peebles n'a pas digéré ses influences et reste trop copieur, il souffre forcément de la comparaison avec ses aînés qui ont signé des films bien plus personnels et bien plus probants sur le fond comme sur la forme.
Note :