Sentimental (2021) de Cesc Gay

par Selenie  -  10 Décembre 2021, 10:26  -  #Critiques de films

8ème film du réalisateur espagnol Cesc Gay depuis "Hotel Room" (1998) et après son succès aux 5 Goyas (meilleur, film, réalisateur, acteurs, et scénario) "Truman" (2016). Ce projet date de ce dernier film, durant la production duquel il a commencé à écrire cette histoire qui a d'abord été un succès sur les planches avec la pièce de théâtre "Les Voisins du Dessus" (2017) et que le cinéaste adapte lui-même pour le grand écran. Le cinéaste rappelle que l'idée est venu suite à sa voisine qui émettait des gémissements excessifs lors de ses ébats amoureux ce qui a généré des discussions avec sa femme : "Ca a généré chez nous un débat, souvent enflammé, sur ce qu'il fallait faire ou non, s'il fallait le lui dire ou non, et comment lui dire : "C'est toi qqui montes. - Non, c'est toi !" (...) Evidemment, le film ne raconte pas mon histoire personnelle, loin de là. Mais l'élément déclencheur, ma source d'inspiration, c'est bien cette anecdote." Cesc gay avoue s'être beaucoup inspiré des screwball comedy hollywoodienne de Billy Wilder, Ernst Lubitsch, Ben Hecht et Howard Hawks avec ce sujet inaltérable et universel du couple : "Chez un couple marié, à priori comme tant d'autres, ces mêmes gémissements de voisins allaient déchaîner une tempête de mots et de reproches restés inexprimés. Car sans aucun doute, l'une des plus grandes et des plus ambitieuses aventures que nous puissions vivre dans cette vie est celle de vivre en couple. Un défi majeur aux épreuves innombrables, dans lequel la lutte devient une routine, les tranchées sont infinies et où la consolation face aux blessures subies est souvent rare ou malsaine." ...

Julio et Ana sont dans une mauvaise passe et ne savent plus s'entendre. La dispute est une nouvelle fois attisée lorsque Julio est mis devant le fait accompli qu'Ana a invité les voisins ce soir même. Des voisins que Julio n'apprécie pas franchement à cause de leurs ébats passionnés dont les gémissements le dérangent. L'apero dinatoire débute malgré tout, ais alors que la tension entre Julio et Ana est palpable, leurs voisins Salva et Laura dévoilent leur goût très libéré sur le sexe... Ana et Julio sont incarnés par Griselda Siciliani surtout connue pour des telenovelas argentines comme "De Tout mon Coeur" (2007-2008) ou "Farsantes" (2013), et Javier Camara qui retrouve Cesc Gay après "Truman", acteur vu aussi chez Pedro Almodovar dans "Parle avec Elle" (2002), "La Mauvaise Education" (2004) et "Les Amants Passagers" (2013). Les voisins sont joués par Belen Cuesta vue récemment dans "Avantages de Voyager en Train" (2019) de Aritz Moreno, "Malgré Tout" (2019) de Gabriela Tagliavini et "Une Vie Secrète" (2021) de Aitor Arregi-Jon Garano-Jose Mari Goenaga, puis Alberto San Juan qui retrouve Javier Camara et Cesc Gay après "Les Hommes ! De Quoi Parlent-ils ?" (2012), également vu entre autre dans des films comme "Un Lit pour Quatre" (2002) de Emilio Martinez-Lazaro, "Malveillance" (2011) de Jaume Balaguero et "Las Furias" (2021) de Miguel Del Arco... Un huis clos avec deux couples, on pense logiquement à "Qui a peur de Virginia Woolf ?" (1967) de Mike Nichols et plus récemment à "Carnage" (2011) de Roman Polanski mais avec cette fois le sexe au centre entre un couple marié, "traditionnel" et en crise et un autre couple libéré et libertin qui semble heureux. Et à contrario des deux films cités qui sont des drames, Cesc Gay avoue plutôt une comédie, citant des prédécesseurs rois de la screwball comedy, mais aussi en avouant avoir dû réécrire des passages : "Au théâtre, dans les pièces comiques, le vaudeville en particulier, on se lâche davantage. Pour l'adaptation cinématographique de Sentimental, j'ai atténué certains éléments qui fonctionnaient bien sur scène, mais qui, transposés au cinéma, semblaient trop crus." Et pourtant, on se dit justement que son film est trop sage, trop timoré au vu du sujet. D'abord le début est très long, un prologue avec le couple en crise de près de 25mn !

Sur un film de 1h25 c'est long une dispute qui tourne en rond et qui n'apporte finalement pas grand chose, en effet en quelques minutes on a bien compris que le couple est en crise. Ensuite le jeu des faux-semblants et des sous-entendus sont plutôt bien vus mais ça ne dure pas tant les voisins sont peu enclin à la subtilité. Les voisins se dévoilent beaucoup trop vite sur leurs intentions et leurs moeurs et finalement le face à face n'en n'est pas un, le récit est une introspection forcée pour Julio et Ana qui se retrouvent presque en séance thérapie chez un sexologue qui se serait imposé. Mais pourquoi pas ?! Le plus gênant reste l'écriture et la mise en scène d'autant plus quand le cinéaste s'avance un peu : "Il était très important de faire bouger les acteurs dans le dcor. Eviter la lassitude du décor unique pendant tout le film, il fallait que ce soit dynamique. C'est un tournage que j'ai dû très bien planifier. Tout était réfléchi."... Sans doute trop alors ?! La mise en scène manque justement de fluidité et de rythme, c'est statique, sans créativité au sein d'un décor de toute façon peu exploité. Mais le plus gênant reste les dialogues, convenu, faussement impertinent ou irrévérencieux. pas une réplique ne sort du lot, pas une joute verbale vraiment savoureuse. On est loin des huis clos culte comme "Un Air de Famille" (1996) de Cédric Klapisch, "Dîner de Cons" (1998) de Francis Veber ou "Le Prénom" (2012) de Alexandre de La Pattelière-Matthieu Delaporte. Finalement le long métrage aurait pu être un moyen métrage tant il y a peu à dire, si peu audacieux malgré le sujet, que ce soit sur le fond comme sur la forme. Sans être déplaisant ou désagréable, Cesc gay signe un film à l'ennui poli et au propos un peu vain. On mettra par contre une mention au quator d'acteurs.

 

Note :            

 

09/20
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