La Fureur de Vaincre (1972) de Lo Wei

par Selenie  -  14 Août 2023, 05:00  -  #Critiques de films

Après le succès mondial de "Big Boss" (1971) la société de production Golden Harvest de Raymond Chow lance aussitôt un autre film avec exactement la même équipe. Le réalisateur Lo Wei aux commandes après avoir entre temps tourné deux autres films avec "Les 8 Invincibles du Kung-Fu" (1971) et "Vengeance of a Snow Girl" (1971), il retrouve pour le scénario une fois de plus l'auteur prolifique Ni Kuang toujours non crédité, et surtout on retrouve Bruce Lee désormais star de Honk-Kong et roi du kung-fu. Une nouvelle fois l'histoire s'inspire de faits réels devenus plus ou moins légendaire, la mort du maître Huo Yunjia (Tout savoir ICI !) qui aurait suivi un combat contre une école d'arts martiaux japonaise. Le film réitère la performance de "Big Boss" et amasse plus de 100 millions de dollars pour 100000 dollars de budget, et reprend la place de plus grand succès d'un film hong-kongais. Le film asseoit définitivement le statut de star mondial de Bruce Lee ce qui ouvrira plus tard à des suites ou des remakes, "La Nouvelle Fureur de Vaincre" (1976) de Lo Wei, "Fist of Legend" (1994) de Gordon Chan avec Jet Li, une série TV en 1995 avec Donnie Yen qui repredra le rôle pour le film "Legend of the Fist : the Return of Chen Zhen" (2011) de Wai Keung Lau. Le film est interdit au moins de 12 ans... 

A Shanghai, Chen Zheng est de retour dans son école d'arts martiaux de Jingwu mais c'est pour y apprendre la mort soudaine de son mentor Hua Yunjia. Fou de douleur il refuse de croire à la version officielle selon laquelle ce dernier serait mort des suites d'une maladie. Peu de temps après, les membres de l'école japonaise de karaté viennent humilier les élèves de Jingwu. Chen Zheng décide alors de laver l'affront de de venger l'école de son maître... Logiquement, Chen Zheng est incarné par Bruce Lee alors tout auréolé du succès de "Bog Boss" (1971) après lequel il retrouve la plupart des acteurs, Ching-Ying Lam, Maria Yi, Fu Ching Chen, Shan Chin, Chin Chun mais aussi l'acteur récurrent de la saga "Zatoichi" (1960-1970) Jun Katsumura, Hunag Chung-Hsin et Tien Feng qui se retrouvent après les films "Un Sel Bras les tua Tous" (1967) de Chang Cheh, "The Silver Fox" (1968) de Chui Chang Wang et "Les 14 Amazones" (1972) de Chang Kang et Tung Shao-Yung, et surtout James Tien qui a entre temps rettourné avec le réalisateur pour "Vengeance of a Snow Girl" (1971), le chorégraphe Han Ying-Chieh évidemment, un caméo de Lo Wei, sans oublier la jolie Nora Miao qui retrouvera le réalisateur et un certain Jackie Chan pour "La Nouvelle Fureur de Vaincre" (1976), et n'oublions pas un autre débutant, Corey Yuen futur réalisateur des films "Karaté Tiger" (1985), "La Légende du Dragon Rouge" (1994), "Le Transporteur" (2002) co-signé avec Louis Leterrier ou encore "DOA : Dead or Alive" (2006)... Notons que certaines versions (en France celle de René Chateau distributeur des films de Bruce Lee) a coupé/censuré certains passages : la visite du cimetière de Chen Zheng, l'inspecteur qui revient interroger les élèves de Jingwu, ces derniers qui cherchent Chen Zheng, et lorsque ces mêmes élèves cherchent les survivants après l'attaque japonaise. Mettant face à face une école chinoise et une école japonaise le film symbolise tout le ressentiment encore vivace anti-japonais rappelant un colonialisme belliciste récent. Le film pousse même jusqu'à afficher un panneau "Pas de chiens ou chinois non autorisés", ce qui est une erreur puisque historiquement ce genre de panneaux n'a jamais existé. 

L'histoire se déroule en suivant le désir de vengeance exacerbé de Chen Zheng, d'une façon un peu étonnante où ce dernier agit comme un forcené ivre de violence, on décèle que c'est plus ou moins inné comme le serait un psychopathe. On est donc un peu surpris devant ce héros loin d'être vertueux et très peu cohérent avec les préceptes que son maître a dû lui enseigner. Néanmoins, la vengeance est impitoyable et reste surtout le symbole d'une révolte contre l'impérialisme japonais. Les combats sont violents et agressifs avec d'abord cette séquence culte où Chen Zheng/Lee affronte tous les élèves japonais dont un passage avec le nunchaku - une scéne qui sera repris en hommage dans "Kill Bill" (2003) de Quentin Tarantino. La volonté avouée était de réaliser des scènes d'action plus "réalistes" que dans "Big Boss" (1971), on apprécie donc par exemple la disparition de l'effet "trampoline" mais a contrario certains passages restent pourtant capillotractés comme lorsque Chen Zheng soulève un pousse-pousse. Le film se focalise beaucoup sur la vengeance, il aurait été judicieux de jouer la carte émotion un peu plus forte, surtout et essentiellement après l'ultime attaque des japonais contre l'école chinoise dont les réactions sont ensuite un peu froides comparées au drame subit. L'intérêt reste évidemment Bruce Lee, qui gagne en charisme, qui impressionne et qui impose un style plus félin que dans "Big Boss" efficace même visuellement. Un bon moment malgré des choix narratifs parfois hasardeux.

 

Note :

 

14/20
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