Je suis Toujours Là (2025) de Walter Salles

par Selenie  -  17 Janvier 2025, 10:33  -  #Critiques de films

Un retour qu'on n'attendait sans doute plus, grand réalisateur entre autre de "Central do Brasil" (1998), "Avril Brisé" (2001) ou "Carnets de Voyage" (2003) le réalisateur brésilien Walter Salles n'avait plus tourné depuis "Sur la Route" (2012). Le cinéaste revient pour adapter leroman "Ainda Estou Aqui" (2015) de Marcelo Rubens Paiva qui revient sur le destin de son propre père, Rubens Paiva, député travailliste au Brésil qui disparu en 1971 durant la dictature militaire. Le scénario est écrit par Heitor Lorega qui retrouve après le scénario de "Marin des Montanes" (2024) de Karim Aïnouz son collègue Murilo Hauser qui a signé auparavant "La Vie Invisible" (2019) de Euridice Gusmao. Le film est merveilleusement accueilli dans divers festival et pas des moindres avec en prime le prix du meilleur scénario à la Mostra de Venise 2024 et un Golden Globe 2025 de la meilleure actrice dans un film dramatique pour son actrice principale Fernanda Torre... 1971, Rio de Janeiro, la grande maison des Paiva en bord de mer est un havre de vie. Mais un jour, des hommes du régime dictatorial surviennent et arrêtent Rubens, patriarche et surtout député travailliste. Après quelques temps, la famille s'inquiète de ne pas le voir revenir, entre les forts soupçons de torture ou de meurtres Rubens disparaît sans laisser de traces. Sa femme Eunice, aidée de ses cinq enfants commence alors un combat acharné à la recherche de la vérité... 

Le fils futur écrivain est incarné par Antonio Saboia vu dans "Bacurau" (2019) de Kleber Mendonça Filho et "Le Champs des Possibles" (2023) de Aly Muritiba, tandis que la mère et veuve est interprétée par Fernanda Torres vue dans "Parle-Moi d'Amour" (1986) de Arnaldo Jabor et retrouve Walter Salles après "Le Premier Jour" (1998), mais elle est jouée plus âgée par Fernanda Montenegro actrice ayant débuté dans "Maos Sangrentas" (1955) de Carlos Hugo Christensen qui retrouve aussi son réalisateur après "Central do Brasil" (1998) et vue depuis dans "L'Amour au Temps du Choléra" (2007) de Mike Newell ou "La Vie Invisible d'Euridice Gusmao" (2019) de Karim Aïnouz, et retrouve après "Quatre Jours en Septembre" (1997) de Bruno Barreto son partenaire Selton Mello alias le député, vu dans "L'Herbe du Rat" (2007) de Julio Bressane, "Favelas" (2013) de Stephen Daldry ou son propre film "Le Film de ma Vie" (2016). Citons ensuite Maeve Jinkings vue dans "Les Bruits du Recife" (2004) et "Aquarius" (2016) tous deux de Kleber Mendonça Filho, retrouvant après ce dernier l'acteur Humberto Carrao apparu depuis dans "Paraiso Perdido" (2018) de Monique Gardenberger ou "Marighella" (2019) de Wagner Moura, Valentina Herszage aperçue dans "Mate for me por Favor" (2017) de Anita Roche da Silveira, puis Marjorie Estiano vue dans "Les Bonnes Manières" (2017) de Marco Dutra et Juliana Rojas... Les drames inspirés de faits réels sur les dictatures sud-américaines sont légions, dans le genre on pense par exemple à "Le Baiser de la Femme Araignée" (1985) de Manuel Puig, "Quatre Jours en Septembre" (1997) de Bruno Barreto, "Garage Olimpo" (1999) de Marco Bechis, "Mon Ami Machuca" (2004) de Andrès Wood ou "L'Oubli que nous serons" (2021) de Fernando Trueba. Cette fois on est dans la dictature militaire au Brésil (Tout savoir ICI !), l'enlèvement étant un fait parmi tant d'autres durant les années de plomb du régime (1969-1974). Malgré le régime autoritaire on est dans un pays relativement "libre" comparé à des voisins plus meurtriers comme le Chili et l'Argentine. Ainsi, les premières minutes nous montre un pays où semble respirer le bonheur, une immersion idyllique dans l'année 70 sous le soleil de Rio de Janeiro au sein d'une famille bourgeoise très privilégiée. On devine alors que la violence qui va frapper la famille va être autant une surprise qu'un état de choc auquel seul le père ex-député comprend. Le visage de l'épouse/Fernanda Torres quand elle regarde partir son mari sans savoir que c'est la dernière fois est déchirant. Par là même, on est surpris par les agents "militaires" (peut-être ?!) qui s'avèrent courtois, nullement menaçant outre le mystère autour de l'arrestation, c'est presque encore plus inquiétant.

Le film décrypte avant tout la vie de famille, avant, pendant et après. Ainsi le film débute avec les quelques semaines avant le drame où toute la famille est heureuse et sans avoir peur de quoi que ce soit, puis le drame qui dure quelques jours, puis une ellipse importante pour l'épilogue. La première partie est un immersion das la bonne société brésilienne, le bonheur semble total à tous les étages au point que ça en est presque gênant quand on imagine qu'à la même période les favelas explosent. Seuls les bribes d'infos semblent inquiéter les adultes. En tous cas magnifique reconstitution d'époque, décors et costumes on s'y croit sans soucis avec une belle utilisation des images d'archives mais aussi de la caméra familiale qui accentue l'immersion. La partie enlèvement et les quelques jours/semaines qui suivent sont tout aussi réussis mais avec la tension, la peur, l'angoisse qui envahit la famille avec cette mère courage qui tente de faire bonne figue avec entre autre cette séance photo des journalistes, mais qui tente aussi de sauvegarder ses enfants dans une position où on arrête pas de se dire qu'il faut leur dire la vérité. Puis arrive cette césure dans le récit, l'ellipse qu'on regrette a posteriori. Le film aurait eu 16 voir 17/20 sans cette prolongation superflue et maladroite... ATTENTION SPOILERS !... en effet la fin idéale aurait été ce plan sur cette famille orpheline qui quitte en voiture leur maison familiale, un encart pour expliqué l'issue de l'affaire en 1996 était un simple ajout aux encarts finaux existants. Une ellipse de 25 ans où la mère ne vieillit d'ailleurs pas entre ses 41-42 ans et ses 67-68 ans. Puis le dernier acte n'est rien d'autre qu'un album de famille pour faire pleurer dans les chaumières, c'est d'autant plus décevant que c'est contraire à la force et la dignité de madame Paiva/Torres durant tout le reste de l'histoire... FIN SPOILERS !... 

 

Note :                 

15/20
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