Hostiles (2018) de Scott Cooper.
Nouveau film de Scott Cooper, ex-acteur devenu un des réalisateurs les plus doués de sa génération après "Crazy Heart" (2009), "Les Brasiers de la Colère" (2013) et "Stictly Criminal" (2015). Le cinéaste signe également le scénario comme à son habitude en reprenant le projet du scénariste Donald E. Stewart, oscarisé pour "Missing" (1982) de Costa Gravas. Sur cette histoire, Scott Cooper déclare : "J'ai toujours voulu réaliser un western mais je tenais à le faire à ma façon ; je voulais qu'il soit pertinent au regard des questions raciales et culturelles qui agitent actuellement l'Amérique. Nous sommes tous conscients des mauvais traitements qui ont été infligés aux Amérindiens, mais on peut voir le même schéma se reproduire aujourd'hui avec les afro-américains ou la communauté LGBTQ. Cette histoire soulève des problèmes universels"... Pour ce film Cooper retrouve pour l'occasion la star Christian Bale qui était déjà à l'affiche du "western contemporain" "Les Brasiers..."... Ce dernier retrouve donc un genre qu'il a déjà abordé avec "3h10 pour Yuma" (2008) de James Mangold, film dans lequel jouait également l'excellent Ben Foster. Aux côtés de Christian Bale, on a le plaisir de revoir la jolie Rosamund Pike qui a bien du mal à se faire une place malgré la reconnaissance pour "Gone Girl" (2014) de David Fincher. On reconnait le magnétique Wes Studi, acteur amérindien connu dès ses débuts dans quelques chefs d'oeuvres avec "Danse avec les Loups" (1990) de Kevin Costner, "Le Dernier des Mohicans" (1992) de Michael Mann et "Géronimo" (1993) de Walter Hill. On apprécie aussi les acteurs Rory Cochrane vu dans "Strictly Criminal" et Jesse Plemons qui retrouve Ben Foster après "The Program" (2015) de Stephen Frears.
Un casting riche jusque dans les seconds rôles, dont l'excellent Peter Mullan ; premier western pour l'écossais qu'on n'a pas vu au ciné depuis "Hector" (2015) de Jake Gavin, le jeune Timothée Chalamet qui n'était pas lors du tournage la révélation de "Call Me By Your Name" (2018) de Luca Guadagnino et "Lady Bird" (2018) de Greta Gerwig, et enfin on reconnait Q'Orianka Kilcher révélation de "Le Nouveau Monde" (2005) de Terrence Malick dans lequel jouait également Wes Studi et Christian Bale... L'histoire concerne une expédition où un officier en fin de carrière, qui hait les indiens comme personne, se voit contraint de prendre la tête d'une escorte pour transférer un chef cheyenne mourant à sa terre natale. Des milliers de kilomètres et ses dangers dont les comanches... L'histoire ne semble pas franchement innovante, mais Scott Cooper offre un propos plein d'acuité vis à vis du racisme d'abord mais avant tout sur la haine qui lie des hommes entre eux. Résultat, un western viscéral, âpre et tragique qui ne manque pourtant pas d'émotion et de rédemption. Scott Cooper a fignolé le réalisme jusqu'à pousser ses acteurs (Bale surtout) à apprendre la langue cheyenne. On salue également le travail sur les costumes, la reconstitution générale et une importance non négligeable des magnifiques paysages entre le Nouveau-Mexique et le Montana (mais tournage au Colorado). Le film débute avec deux prologues qui nous mettent face à la haine féroce et quasi inhumaine d'une guerre sans pitié, le premier incrimine les indiens bouchers, le second remet les choses en place en plaçant les soldats "blancs" dans le rôle de bourreaux.
Les bases sont posées, indiens et blancs ont été , sont et seront les pires ennemis et ne pourront jamais se comprendre. Le fait que l'officier en fin de carrière au un passé de tueurs d'indiens escorte un chef mourant qu'il a déjà combattu accentue cette sensation malsaine d'une haine tenace et terrifiante. C'est évidemment sans compter sur les dangers durant le périple, mais plus que ça, c'est bien l'usure d'une vie, la déchéance de l'esprit, la détresse de tiers non combattants qui vont faire qu'il y aura peut-être et/ou un peu de remise en question. C'est sur ces derniers points que le film de Cooper est une réussite éblouissante, avec des personnages psychologiquement très intéressants et d'une densité rare. Le peu de scènes d'action (mais très efficaces !) contribuent à enrichir ce film comme un drame humain avant tout. On peut juste rester un peu perplexe sur l'après-viol, quand on connait les traumatismes d'une telle agression on comprend difficilement que ce soit très survolé dans le film. Néanmoins, Scott Cooper signe un magnifique western, intelligent et profond. En prime des acteurs tous impressionnants, avec un bonus pour Rory Cochrane qui trouve là son meilleur rôle. Le Entertainment Weekly affirme que c'est "Le meilleur western depuis Impitoyable" ("Impitoyable" en 1992 de Clint Eastwood), on n'ira pas jusque là (il y a comme un air de résurrection du genre depuis 5-6 ans !) mais Scott Cooper signe effectivement un western de très haute tenue. A voir !
Note :