Le Père Noël est une Ordure (1982) de Jean-Marie Poiré
Film adapté de la pièce de théâtre éponyme, succès 1979 de la troupe du Splendid qui avait déjà fait sensation sur grand écran avec le dyptique "Les Bronzés" (1978) et "Les Bronzés font du Ski" (1979) tous deux de Patrice Leconte. C'est leur producteur Yves Rousset-Rouard, heureux parieur derrière "Emmanuelle" (1974) de Just Jaeckin, qui a poussé à en faire un long métrage. La troupe a fait appel au réalisateur Jean-Marie Poiré (fils du grand producteur Alain Poiré) aui avait déjà travaillé avec deux co-fondateur membre du Splendid, Gérard Jugnot et josiane Balasko sur ses premiers films "Les Petits Câlins" (1978), "Retour en Force" (1980) et "Les Hommes préfèrent les Grosses" (1981). Le scénario est co-signé du noyau dur du groupe d'amis humoristes, à savoir Bruno Moynot, Marie-Anne Chazel, Thierry Lhermitte, Christian Clavier, Gérard Jugnot et Josiane Balasko...
Un soir de Noël, deux agents de l'association SOS Détresse Amitié s'apprêtent à passer le réveillon à la permanence de soutien. Entre leur collègue en partance à son repas de réveillon qui se coince dans l'ascenseur à leurs voisins plus ou moins collants en passant par une marginale et son conjoint déguisé en Père Noël, et un travesti en dépression la nuit s'annonce mouvementée... Chacun des co-scénaristes reprend son rôle du théâtre, à l'exception notable de Josiane Balasko qui ne jouait pas la pièce à l'exception de quelques remplacement dans le rôle de Josette, et pour laquelle a été créée le personnage de madame Musquin. Les rôles des bénévoles Thérèse et Pierre sont incarnés respectivement par Anémone et Lhermitte, le couple Zézette et Félix sont joués par Chazel et Jugnot, les voisins sont interprétés par Moynot et Martin Lamotte ex d'une autre troupe célèbre, celui du Café de la Gare avec Coluche et Dewaere. On reconnaîtra la voix marquante de Michel Blanc, et le pharmacien joué par le comédien Jacques François, acteur trop cher pour la production mais qui accepta de jouer gratuitement plutôt que d'accepter un cachet dérisoire... D'emblée le film a fait son petit scandale, l'affiche du film signée du dessinateur Reiser issu de Charlie Hebdo, a été refusée par la RATP pour s'afficher dans le métro car le titre a notamment été jugé "politiquement incorrect" ; et dire que le titre devait d'abord s'intituler "Le Père Noël s'est tiré une balle dans le cul" ! La pièce est une satire corrosive de notre société, un effet pamphlétaire qui fait encore plus effet en ce soir symbolique du réveillon de Noël, fête du partage et de la joie par excellence.

Mais néanmoins, on s'aperçoit que le film arase un chouïa le cynisme de fond par quelques modifications qui peuvent paraître comme des détails ce qui n'est pourtant pas le cas. Par exemple, Thérèse et Zézette ne sont plus cousine, Thérèse ne couche plus avec Félix, Katia n'est plus l'ex-mari de Thérèse et, surtout, il n'y a plus de suicides... Donc, à y regarder de plus près, le film va un peu moins loin que la pièce mais ça reste puissant et hilarant de bout en bout. Les répliques font toutes mouches à une vitesse de croisière élevée. En prime des personnages hauts en couleur qui semblent bien sous tous rapports et qui s'avèrent finalement tous assez abjects. Si le film reçoit un accueil mitigé avec tout de même plus de 1,5 millions de spectateurs il va devenir culte au fil des années avec plusieurs répliques qui traversent les générations jusque dansles cours d'école : "c'est c'là ouiii", "ça dépend ça dépasse", "je ne vous jette pas la pierre Pierre mais j'étais à deux doigts de m'agacer", "je me disais encore hier soir qu'il me manquait quelque chose pour descendre les poubelles", "c'est fin, c'est très fin ça se mange sans faim", "mais qu'est-ce que c'est que cette matière ? Mais, mais c'est de la merde !",... etc... Une comédie sans baisse de régime, où chaque minute offre son gag sans discontinuer pendant 1h30. A voir, à revoir et à revoir on ne s'en lasse pas. La troupe ne s'arrêtera pas sur cette lancée avec un autre monument qui sortira peu de temps après avec "Papy fait de la Résistance" (1983).
Note :