La Triade du Papillon (2003) de Lou Ye

par Selenie  -  4 Février 2025, 10:07  -  #Critiques de films

Troisième long métrage du réalisateur chinois Lou Ye après "Weekend Lover" (1994) et surtout "Suzhou River" (2000), succès multi-primé qui lui permet alors d'obtenir un financement plus conséquent pour son nouveau projet. Producteur-réalisateur-scénariste  il décide de se lancer dans un ambitieux film de guerre et d'espionnage qui se déroule durant l'occupation japonaise. Mais cette fois le film reçoit un accueil mitigé au point qu'il ne sort aux Etats-Unis que dans une unique salle à New-York durant trois semaines où il récolte de 17790 dollars au box-office (soit environ 2500 entrées). Néanmoins le réalisateur saura rebondir et signera aussitôt après ses plus beaux films avec "Une Jeunesse Chinoise" (2006) et "Nuits d'Ivresse Printanière" (2009)... 1927 en Mandchourie, Itami, un jeune japonais s'éprend de Cynthia une jeune chinoise. Mais leur histoire doit prendre fin car Itami doit retourner dans son pays pour le service militaire. En rentrant chez elle Cynthia assiste au massacre de ses proches par des japonais d'extrême droite. Le temps passe, les années aussi, désormais l'occupation japonaise s'impose en 1931, c'est la guerre. Cynthia est devenue Ding Hui et est une membre de Purple Butterfly une organisation de résistance qui projette de tuer Yamamoto un haut dignitaire japonais. Bientôt, Cynthia comprend qu'elle va devoir se rapprocher de Itami, revenu mais en tant que collaborateur de Yamamoto... 

Itami est incarné par l'acteur japonais Tôru Nakamura apparu dans "Tigre Bleu" (1994) de Norberto Barba et "Unloved" (2001) de Kumitoshi Manda ou plus tard dans "K-20 l'Homme aux 20 Visages" (2009) de Shimako Sato. Cynthia/Ding Hui est jouée par Zhang Ziyi révélée dans "Tigre et Dragon" (2000) de Ang Lee et vue dans "La Légende de Zu" (2001) de Tsui Hark ou "Hero" (2002) de Zhang Yimou, et retrouvera dans "Jasmine Women" (2004) de Hou Yong l'acteur Yé Liu remarquée juste avant dans "Balzac et la Petite Tailleuse Chinoise" (2002) de Dai Sijie et vu plus tard dans "La Cité Interdite" (2006) de Zhang Yimou ou "City of Life and Death" (2009) de Lu Chuan et retrouvera dans "Les Sentinelles du Pacifique" (2018) de Xiao Feng son partenaire Feng Yuanzheng vu plus tard dans "Back to 1942" (2013) de Xiaogang Feng ou "Red Amnesia" (2016) de Wang Xiaoshuai. Et enfin citons l'actrice Bing Bing Li qui deviendra une star également avec "Le Royaume Interdit" (2008) de Rob Minkoff, "Détective Dee : le Mystère de la Flamme Fantôme" (2010) de Tsui Hark ou "1911" (2011) de et avec Jackie Chan... Une histoire d'amour impossible, façon Roméo et Juliette l'un venant du Soleil levant et l'autre de l'Empire du Milieu. La guerre sino-japonaise va finir par compliquer encore plus tout ça. Si on pense logiquement au chef d'oeuvre "L'Armée des Ombres" (1969) de Jean-Pierre Melville quand il s'agit de Résistance, ici la précision et le degré de réalisme est bien moindre pour favoriser à la fois la passion et l'action mais là aussi on va être un tantinet déçu, d'autres feront encore mieux avec entre autre le magnifique "Lust Caution" (2008) de Ang Lee et le plus "westernien" "La Brigade de Shandong" (2018) de Yang Feng. 

Au départ on reste légèrement intrigué par cette relation amoureuse qui ne semble finalement gênée personne malgré un contexte géo-politique et social aussi compliqué qu'ambigu. D'ailleurs le scénario s'avère tout aussi complexe surtout au départ, et ce n'est pas une problématique d'écriture mais plus un soucis de montage. Le manque de fluidité mêlé à une mise en scène un peu trop statique ne permet jamais de sentir les émotions comme l'urgence ou le danger. L'abus dans les décors de la grisaille pluvieuse comme dans un mélo romanesque ou un thriller psychologique est tout aussi maladroit. Le plus gênant (pour ne pas dire manipulateur) dans le film reste les images d'archives à la fin qui sont en quasi hors sujet à qui connaît un peu l'Histoire de la Chine (par exemple Nankin c'est en 1937 et ce n'est pas en Mandchourie). Néanmoins, le côté espionnage fonctionne bien grâce à un contexte historique passionnant, et surtout le visage de Zhang Ziyi est toujours une merveille de mélancolie. Le film n'est pas désagréable en soi, mais sur le même sujet ou la même période il existe bien plus solide à conseiller.

 

Note :                 

11/20
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