Le Capitan (1960) de André Hunebelle
Déjà rompu au genre avec "Les Trois Mousquetaires" (1953) et "Cadet Rousselle" (1954) c'est surtout avec le succès important du film "Le Bossu" (1959) qui reste son plus gros succès avec plus de 5,8 millions d'entrées France que le réalisateur André Hunebelle et son équipe se retrouve pour une nouvelle aventure de Cape et d'Epée avec une fois de plus la star Jean Marais. Pour ce nouveau projet il fallait trouver une nouvelle histoire et le choix s'est porté sur le roman "Le Capitan" (1907) de Michel Zévaco, déjà porté sur grand écran avec la version (1946) de Robert Vernay. Le réalisateur-scénariste co-écrit le scénario avec son fils Jean Halain qui collabore avec son père depuis "Métier de Fous" (1948) et qui sera aussi un des auteurs fidèles des films avec un certain Louis de Funès, puis avec Pierre Foucaud, les deux hommes étant souvent complémentaires avec Hunebelle sur une quinzaine de films. Le film est un nouveau succès populaire avec environ 5 millions d'entrées France, ce qui permit à André Hunebelle de placer deux films dans le top 4 annuel au box-office 1960, étant donné que "Le Bossu" fit sa carrière en salle la même année... 1616, Marie de Médicis est régente du royaume de France et laisse gouverner son favori Concino Concini Premier ministre. Mais alors que ce dernier conspire pour éliminer le jeune roi Louis XIII avant qu'il n'atteigne la majorité, une conjuration réunissant les grands nobles du royaume veut détrôner le jeune roi. Dans ce climat hostile le chevalier de Capestang, dit le Capitan, refuse de se laisser enrôler dans des guerres de chapelle et tente à la fois de combattre Concini et de rallier les frondeurs à la cause du roi...
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Après avoir été "Le Bossu" il devient donc "Le Capitan", Jean Marais retrouve donc une grande partie de l'équipe en pleine apogée de sa période faste du Cape et d'Epée (près d'une dizaine de films du genre en moins de 6 ans) et retrouvera son réalisateur, les scénaristes et bon nombre des acteurs ensuite dans la trilogie "Fantomas" (1964-1967). L'autre star du film est italienne, Elsa Martinellivue dans "La Rivière de nos Amours" (1955) de André de Toth, "Les Garçons" (1959) de Mauro Bolognini, et qui sera surtout connue pour son safari dans les bras de John Wayne dans "Hatari !" (1962) de Howard Hawks, et retrouvera dans "Le Procès" (1962) de Orson Welles son partenaire Arnoldo Foa vu auparavant dans "Le Témoin" (1946) de Pietro Germi ou "Lucrèce Borgia" (1953) de Christian-Jaque. On retrouve aussi l'inénarrable Bourvil qui était dans "Cadet Rouselle" (1954) et "Le Bossu" (1959), il retrouve son amie Pierrette Bruno vue dans "Le Fruit Défendu" (1952) et "Le Boulanger de Valorgue" (1953) tous deux de Henri Verneuil mais qui sera surtout la partenaire privilégiée de Bourvil sur les planches notamment dans plusieurs opérettes. Citons Jacqueline Porel vue dans "La Vérité sur Bébé Donge" (1952) et "Razzia sur la Chnouf" (1955) tous deux de Henri Decoin, qui reprend le rôle que tenait sa partenaire dans "Le Capitan" (1946) de Robert Vernay, Lisa Delamare connue aussi pour son rôle dans un autre succès populaire avec "Le Comte de Monte Cristo" (1943) de Robert Vernay, le roi est incarné par Christian Fourcade qui retrouve plusieurs acteurs croisés dans "Napoléon" (1955) de Sacha Guitry ou "Les Misérables" (1958) de Jean-Paul Le Chanois, Jean-Paul Coquelin vu la même année dans le chef d'oeuvre carcéral "Le Trou" (1960) de Jacques Becker, Robert Porte surtout connu en tant que Monsieur frère du roi dans "Angélique Marquise des Anges" (1964) de Bernard Borderie, Jean Berger qui retrouvera la plupart de ses camarades après "Austerlitz" (1960) de Abel Gance ou "Le Masque de Fer" (1962) de Henri Decoin, Alain Janey entre "Les Tricheurs" (1958) de Marcel Carné et "Mélodie en Sous-Sol" (1963) de Henri Verneuil, Piéral sans doute à l'époque le nain le plus connu vu entre autre dans "Les Visiteurs du Soir" (1942) de Marcel Carné, ou "L'Eternel Retour" (1942) et "Notre-Dame de Paris" (1956) tous deux de Jean Delannoy. Citons pêle-mêle plusieurs seconds couteaux vus plusieurs fois chez Hunebelle avec par exemple Jean Blancheur, Guy Delorme, Annie Anderson, Raphaël Patorni, Thomass ou Benoît Lab, et surtout, n'oublions pas les frères Jacques Préboist acteur au plus de 300 films dont la plupart de ceux qu'il fera avec son frère Paul Préboist dont justement "Cadet Rousselle" (1954) et "Le Bossu" (1959) avant que ce dernier devienne une vedette des comédies potaches des années 60-70... Le film est avant tout un film de fiction même s'il reprend des faits historiques. La Régence, le Premier ministre Concini qui a voulu en quelque sorte museler le Roi avant le coup de Majesté (le Roi qui assume son coup d'état comme le fera son fils Louis XIV après la mort de Mazarin par exemple), les protagonistes historiques aussi même si plusieurs anachronismes sont présents (Cinq-Mars n'est pas encore né ! Marion Delorme est encore bébé...) mais le film reste un film façon roman historique, reprenant un événement connu et broder autour avec en prime l'aventure Cape et d'Epée qu'on espère revenir à la mode.
Les points communs avec "Le Bossu" sont innombrables et on ne peut qu'être déçu par la comparaison. Jean Marais est une fois de plus un nobliaux très loyal à son roi, Bourvil est le laquais poltron mais fidèle. L'évolution du récit est la même poussant jusqu'au dernier acte quasiment filmé à l'identique. Sans réelle surprise dans l'intrigue elle-même le film pêche surtout dans ses scènes d'action où les chorégraphies semblent moins abouties. Pourtant le film est marqué par deux passages héroïques qui font date et qui doit rappeler que Jean Marais aura précédé Jean-Paul Belmondo dans l'art de la cascade. L'escalade du fort (Château du Val dans le Cantal) où est emprisonné la belle Gisèle d'Angoulême/Martinelli est effectué sans trucage par la star elle-même alors même que les assurances avaient refusé de couvrir les risques ! L'acteur fera de même avec le lustre lors de la bataille dans la salle d'armes. A propos des cascades qu'il réalise lui-même, Jean Marais répondit : "J’aime les prouesses. Pour le plaisir, la sensation physique. J’estime qu’un homme est fait pour se surpasser. Comment dire ? Je hais la monotonie J’aurais eu horreur, après les rôles aussi merveilleux que ceux que j’ai eus dans les films de Cocteau, de m’enfermer dans la fausse jeunesse d’un jeune premier prolongé. Brouiller ses propres pistes, s’éveiller à l’imprévu, à l’insolite de soi-même, c’est le secret de la jeunesse. Cocteau m’a enseigné cela." D'autres scènes sauvent le film avec notamment l'excellente séquence où Bourvil joue les artistes avec un cheval particulièrement talentueux. En règle général les meilleurs scènes sont d'ailleurs avec Bourvil qui pousse aussi la chansonnette. Ca reste un divertissement populaire qui touche encore la corde sensible de la nostalgie d'un cinéma qui n'existe plus. Jean Marais étincelant et Bourvil aussi touchant que drôle reste les atouts majeurs du film.
Note :