Indomptables (2025) de Thomas Ngijol
Nouveau long métrage en tant que réalisateur pour Thomas Ngijol, surtout connu comme humoriste mais qui a déjà réalisé "Case Départ" (2011) avec ses acolytes Fabrice Eboué et Lionel Steketee, "Fastlife" (2014) en solo puis "Black Snake" (2019) avec son épouse Karole Rocher. Ce film est la première incursion du cinéaste dans le polar et premier pas hors de la comédie même si il avoue avoir ajouté un peu d'humour : "On ne peut pas passer une journée au Cameroun sans avoir un fou rire !" Pour ce projet le réalisateur-scénariste adapte le documentaire "Un Crime à Abidjan" (1995) de Mosco Levi Boucault, ce dernier aura d'ailleurs salué le travail en écrivant à Thomas Ngijol une lettre pour le féliciter. Film présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au dernier Festival de Cannes...
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À Youndé au Cameroun, le commissaire Billong enquête sur le meurtre d'un officier de police. Mais l'officier peine à maintenir l'ordre, que ce soit dans la rue ou chez lui. Bien qu'il soit un homme de principe et de tradition son implication dans l'enquête et la pression ambiante font que le commissaire approche du point de rupture... Le commissaire Billong est incarné par le cinéaste lui-même, Thomas Ngijol qui a joué dans ses propres films et essentiellement pour ses proches dont on peut cioter aussi "Le Crocodile du Botswanga" (2014) de ses amis Fabrice Eboué et Lionel Steketee ou "Fratè" (2022) de Karole Rocher et Barbara Biancardini. Le reste du casting est composé de camerounais amateurs et locaux, exception faite de Danilo Melande vu auparavant dans "Moto-Taxi - Bendskins" (2021) et "Sadrack" (2023) tous deux de Narcisse Wandji, puis citons entre autre dans leur premier rôle Bienvenu Roland Mvoe, Thérèse Ngono, Junior Bessala, Dimitri Amougou, Christol Djomo ou encore Terrence Samba... Dès les premières minutes on plonge dans les bas fonds (?!) de Yaoundé, dans un style très réaliste, sans fioriture, dans des décors naturels, avec un casting à presque 100% non professionnel et local, on est dans un docu-fiction qui nous happe rapidement, seul finalement la présence de Thomas Ngijol nous rappelle qu'il s'agit un polar fictionnel. Par là même quelques passages souffrent d'interprètes mauvais ou pas à l'aise devant la caméra.
Le scénario est construit avec le parallèle très galvaudé entre un flic partagé entre son boulot et sa vie de famille. Mais cette fois l'intelligence du traitement repose sur deux paramètres essentiels, le premier est que le commissaire Billong/Ngijol évoque une caste social supérieure qu'il a bien l'intention d'assumer dans une société où l'habit fait le moine, littéralement, puis le fait qu'il n'est pas un super flic mais un être humain qui fait de son mieux au point où son autorité est difficile à imposer, dans le travail (la poignée de main) comme dans sa famille où la fracture est finalement moins générationnelle que technologique. Par là même on notera une importance non négligeable des femmes, ou plutôt de leur émancipation mais sur ce point on ne saura jamais si c'est une réalité au Cameroun où si c'est un choix militant du réalisateur-scénariste-acteur. On salue aussi le travail sur l'arrière-plan, visuel et surtout sonore, ainsi on ne tombe pas dans le cliché des tam-tams ou des musiques folkloriques traditionnelles, outre quelques musiques plus "communes et internationales" ce sont surtout les sons et bruits du quotidiens qui ajoutent au réalisme ambiant. En conclusion, Thomas Ngijol signe un polar social merveilleusement bien écrit, à l'exotisme loin des cartes postales et tout simplement très intéressant. Un très bonne surprise.
Note :