Le maccarthysme au cinéma : délation, résistance et chute
Suite de l'article "Le Maccarthysme au Cinéma : Origines" (lire ICI !). A partir de 1950 Mc Carthy donne un coup de semonce qui va encore accentuer la chasse aux "rouges". Mc Carthy ne devient vraiment puissant qu'à partir de 1952 où il est nommé président de la commission suite à l'élection de Eisenhower à la Maison Blanche. Après les fonctionnaires et le monde du cinéma Mc Carthy s'attaque à tous, écrivains, intellectuels, savants (le célèbre couple Rosenberg), hommes politiques... etc...
Dès 1951 de nouvelles séances eurent lieux. La délation est quasi imposée et certains ne se gênent pas pour... Elia Kazan (photo ci-dessus à gauche), Robert Rossen, Robert Taylor, Lee J. Cobb, Gary Cooper et Ronald Reagan (photo ci-dessus à droite) sont parmi les moins sympathiques. Une trentaine de personnalités en dénonceront ainsi plus de 300 ! D' autres refusent, certains y perdront tout comme Paul Robeson ou John Garfield.
En très peu d'année un nombre important d'artistes renommés quitte les Etats-Unis... Charles Chaplin, Orson Welles, Joseph Losey, Ben Hecht (scénariste de "Casablanca" entre autres), Jules Dassin, Dalton Trumbo... La France sera d'ailleurs l'un des refuges le plus souvent choisit.
Mais heureusement la résistance s'amplifie... Arthur Miller écrit "Les sorcières de Salem" (1953) évidente dénonciation de l'hystérie ambiante... Le journaliste Edward R. Morrow avec son émission "See it now" sur CBS lance une campagne anti-Mc Carthy (1953-1954) ; Georges Clooney en fera un film magnifique "Good Night and Good Luck" (2005 - ci-dessous).
Mais ce qui va sonner le glas du sénateur Joseph Mc Carthy sera sa propre décision de s'attaquer à l'armée. En voulant faire un exemple il insulte un général, ce sera la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Suite à ce dérapage (entre autres n'est-ce pas ?!) les médias se détourne de lui et même dans son propre camp on commence à se détourner de lui.
Après des débats télévisées concernant les attaques contre l'armée le sénat dépose une mention de censure contre Mc Carthy le 30 juillet 1954. Le 2 décembre 1954 le sénat adresse un blâme au sénateur Joseph Mc Carthy et l'écarte définitivement du monde politique. Entre autres accusations faites contre lui il fut retenu la diffamation envers le général, quelques écarts de conduite dont celles d'avoir gêné une enquête sur des corruptions.
Joseph Mc Carthy est déchu, vite oublié, sombre dans l'alcoolisme et meurt en 1957 dans l'indifférence générale.
On compare on compare souvent le maccarthysme à l'anti-communisme mais on oublie aussi toutes sortes d'autres appartenances "malsaines". C'est ainsi par exemple qu'entre 1947 et 1953, 26000 fonctionnaires furent l'objert d'enquêtes ; 7000 démissionnaires et 739 furent révoqués. Communistes (ou non d'ailleurs !) mais aussi immoralité sexuelle, homosexualité, consommation de drogues sont aussi des accusations suffisantes.
Heureusement ça s'arrange après petit à petit mais la période maccarthyste à encore des résidus parasitaires pour de longues années. En 1970 la Writer's Guild of America (syndicat des scénaristes) demande enfin l'autorisation d'embaucher des communistes !
En 1953 un certain Ian McKellan Hunter reçoit l'Oscar du meilleur scénario pour "Vacances romaines" et en 1956 un certain Robert Rich obtient l'Oscar du meilleur scénario pour le film "Les clameurs se sont tues" de Irving Rapper... Ces deux scénaristes sont en fait une seule et même personne à savoir Dalton Trumbo (photo ci-dessus) !!! Ce dernier pourra reprendre son vrai nom à la fin des années 50 grâce notamment à Otto Preminger pour "Exodus" (1959) et à Kirk Douglas pour "Spartacus" (1960). Le signe de la fin officieuse de la liste noire. Officieuse car Dalton Trumbo attendra 1975 avant de recevoir officiellement la statuette pour "Les clameurs se sont tues" et à titre posthume il n'obtiendra officiellement celle pour "Vacances Romaines" qu'en 1993 !
Lors de la 71ème cérémonie des Césars il y eut aussi un rappel douloureux pour Elia Kazan ; ce dernier recevait un Oscar d'honneur pour l'ensemble de sa carrière (nombre de chef d'oeuvres). Cependant Elia Kazan avait peur d'être conspué et c'est entouré de Robert De Niro et Martin Scorcese qu'il se présenta ; tandis que la moitié de l'assistance fit une ovation l'autre moitié resta assise faisant un boycott outré.
La liste noire et ses membres le plus connus :
Quelques films dénonçant le maccarthysme :
"On mumure dans la ville" (1951) de J.L. Mankiewicz...
"Johnny Guitar" (1954 - ci-dessus) de Nicholas Ray... Ce western est spécial car il pu être tourné grâce à la protection de Ray par le producteur Howard Hugues. La transposition du film vis à vis de la chasse aux sorcières est flagrante, l'une des deux femmes n'hésitant pas à manipuler les lyncheurs pour sa propre cause. Si on précise que Sterling Hayden (ci-dessus avec Joan Crawford) a avoué ses sympathies communistes devant la commission et que Ward Bond (ci-dessus à droite dans le rôle de chef des lyncheurs) était un un extrêmiste de droite on aura compris... D'ailleurs à l'époque nombreux sont ceux qui n'avait pas compris pourquoi Ray et Bond tournait ensemble tant leur opinion différaient.
"Un Roi à New-York" (1957) de Charles Chaplin...
"Les sorcières de Salem" (1957) de Raymond Rouleau... D'après l'oeuvre célèbre de Arthur Miller.
"Point of order" (1963) de Emilio De Antonio... Documentaire sur le maccarthysme.
"Nos plus belles années" (1973) de Sydney Pollack... Description partielle du maccarthysme par le biais d'un couple (Robert Redford et Barbara Steisand) durant la période 1937-1950.
"Le prête-nom" (1976) de Martin Ritt... Un auteur de renom demande à un ami (Woody Allen) de lui servir de prête-nom avant que ce dernier ne soit inquiété pour activité subversive.
"Chasse aux sorcières à Hollywood" (1987) de Judy Chaïkin et Eve Goldberg... Documentaire sur les conséquences du maccarthysme sur les "10 de Hollywood" et leurs familles.
"Une femme en péril" (1988) de Peter Yates... Emily Crane (Kelly Mc Gillis) refuse de collaborer avec la commission anti-communiste et se retrouve inscrite sur la liste noire.
"La liste noire" (1991) de Irwin Winkler... Un réalisateur (De Niro) suspecté d'être communiste refuse de dénoncer et doit choisir l'exil.
"Good night and good luck" (2005) de Georges Clooney...
Pour les films propagandistes, au service des anti-communistes on peut citer "Big Jim Mc Laine" (1952) de Edward Ludwig. Jim Mc Laine (John Wayne) est enquêteur pour la HUAC et poursuit des communistes malfaisants à Hawaï. Film à l'anti-communisme franc et primaire.