Midsommar (2019) de Ari Aster
Le retour rapide du réalisateur suédois Ari Aster après avoir connu le succès critique et public avec son premier long métrage, le film d'horreur "Hérédité" (2018). Et pourtant le réalisateur-scénariste a eu l'idée de ce film avant son premier flm alors qu'il sortait d'une relation amoureuse de trois ans. Alors que "Hérédité" s'inspirait de ses propres traumatismes familiaux et s'inspire cette fois de sa propre histoire amoureuse pour cette fable perverse... Dani et Christian sont sur le point de se séparer mais un deuil retarde un temps l'inévitable et ils partent avec des amis à un festival qui n'a lieu que tous les 90 ans dans un village isolé en Suède...
Dani est incarné par Florence Pugh révélée par "The Young Lady" (2016) de William Oldroyd et vue dans "Outlaw King" (2018) de David Mackenzie, Christian est joué par Jack Reynor remarqué dans "Sing Street" (2016) de John Carney et retrouve son partenaire de "Detroit" (2017) de Kathryn Bigelow, Will Poulter remarqué aussi dans le chef d'oeuvre "The Revenant" (2016) de Alejandro Gonzales Inarritu. Dans un rôle secondaire on notera la présence de l'acteur Bjorn Andrésen révélé dans le mythique "Mort à Venise" (1971) de Luchino Visconti... Le cinéaste s'est beaucoup documenté sur le folklore scandinave notamment sur les liens entre paganisme et christianisme, mais il s'est aussi appliqué à jouer sur les contrastes, à contrario de son film précédent qui se déroulait essentiellement dans une maison pleine d'ombres ici on est dans une Suède baignée de lumière dans une période où le pays ne connait pas la nuit ; d'où le titre du film qui veut dire "mi-été" en suédois... Pour étoffer le mystère autour de ce festival unique Ari Aster a créé une langue spécifique fictive, l'Affekt avec ses symboles, ses écritures runiques et ses fresques. Tous ses choix accentuent d'emblée le malaise, à la fois dans une contrée occidentale contemporaine mais aussi dans une sorte de monde parallèle, comme une communauté en autarcie dont la période de Jour Polaire augmente la dimension fantasmagorique. Après un prologue tragique et déchirant dans une pénombre digne de n'importe quel thriller psychologique, la bande d'amis arrive ensuite dans le nord de la Suède sous un soleil estival sublime, dans un paysage qui renvoie à l'Eden, tout y est dans cette communauté pour que l'héroïne puisse se ressourcer.
Evidemment, cette communauté n'est rien d'autre qu'une secte qui va s'avérer terrifiante après déjà 30mn de film lors d'une cérémonie qui secoue et qui nous fait entrer dans une seconde phase. La communauté se livre ainsi dans une sorte de lavage de cerveau via des trips hallucinogènes contrôlés et savamment dosés, le tout dans une sorte de béatitude qui n'empêche pas l'atmosphère de changer subrepticement en une prison de torture psychologique, et pas que... Malheureusement, cette secte ainsi décrite par Ari Aster est d'un kitsh suranné qui manque cruellement d'ancrage dans la réalité et on tombe trop souvent dans le grotesque risible. On frôle le nanard et/ou le navet (tout dépend de la séquence) qui aurait pu être évité, soit en ajoutant un second degré soit en choisissant un style plus réaliste. On pense parfois que le film va virer dans le fantastique pur, ce qui ouvrait d'autres perspective mais pas du tout. Ari Aster signe un film trop sérieux à tout point de vue et offre un film qui ne convainc finalement jamais. Cette propension à l'exagération théâtrale poussera certain à rire involontairement. Et pourtant, la jolie Florence Pugh est épatante en jeune amoureuse moralement épuisé par un deuil, déchirante dans ses angoisses. La trame générale est intéressante, quelques séquences particulièrement efficaces mais Ari Aster se prend cette fois les pieds dans le tapis. Dans le genre on conseillera plus des films comme "The Wicker Man" (1973) de Robin Hardy, "Eyes Wide Shut" (1999) de Stanley Kubrick, "Red State" (2011) de Kevin Smith, "Martha Marcy May Marlene" (2012) de Sean Durkin, "Le Bon Apôtre" (2018) de Gareth Evans... Pour info, le film est interdit au moins de 16 ans aux Etats-Unis et au moins de 12 ans en France, des classements compréhensibles...
Note :