Miss (2020) de Ruben Alves
Après son excellent premier long métrage en tant que réalisateur avec "La Cage Dorée" (2013), Ruben Alves revient donc après 7 ans où il est retourné devant la caméra pour d'autres comme dans "Yves Saint-Laurent" (2014) de Jalil Lespert et "Demain Tout Commence" (2015) de Hugo Gélin. Le cinéaste aurait eu l'idée du film en accompagnant un proche dans sa transition sexuelle, ce qui l'a amené à travailler un premier scénario avec Cécilia Rouaud à qui on doit les films "Je me Suis fait Tout Petit" (2012) et "Photo de Famille" (2018) mais le cinéaste n'a pas été satisfait. Ensuite, après un projet de téléfilm sur une personne transgenre qu'il quitte car "trop codifié" il rencontre au casting un certain Alexandre Wetter, un homme androgyne qui commence à se faire un nom notamment en défilant pour le styliste Jean-Paul Gautier. Une rencontre charnière puisque le comédien suggère au cinéaste de faire un film non pas sur le transgenre à proprement parlé mais sur l'androgynie : "J'ai été frappé par la façon dont il passait avec simplicité et naturel d'un physique assez masculin à une féminité assumée. Je l'ai questionné sur lui, sur la façon qu'il avait de se mettre en scène sur son compte Instagram, je lui ai demandé s'il envisageait une transition. Ce n'était pas le cas. Il se sent juste plus fort en femme." .Finalement, Ruben Alves co-signe le scénario avec Elodie Namer réalisatrice-scénariste du film "Le Tournoi" (2015). Le film est produit entre autre par Hugo Gélin, réalisateur des films "Comme des frères" (2011), "Demain Tout Commence" (2015) et "Mon Inconnue" (2019)... Depuis tout petit, Alex est un homme qui a une forte féminité et rêve de devenir Miss France mais ses rêves se sont u peu évanouis depuis la port de ses parents. Depuis il s'est créé une nouvelle famille composée d'amis d'horizons divers. Une rencontre va pourtant réveiller sa féminité jusqu'à vouloir devenir Miss France coûte que coûte. Malgré quelques réticences, sa famille va le soutenir et l'aider dans cette quête de reconnaissance...
Alex est donc logiquement incarné par Alexandre Wetter dans son premier rôle au cinéma mais on peut citer des apparitions dans le téléfilm "Rouge Sang" (2014) et la série TV "Versailles" (2015-2016). Sa famille est composée de la "mère" Isabelle Nanty vue dernièrement dans "Eté 85" (2020) de François Ozon, les "frères" Hedi Bouchenafa vu dans "Hors Normes" (2019) du duo Toledano-Nakache et Moussa Mansaly vu chez Grand Corps Malade dans "Patients" (2017) et "La Vie Scolaire" (2019) tous deux co-signés de Mehdi idir. Puis le "grand frère" ou l'"Oncle" Thibault de Montalembert vu dernièrement en roi dans "The King" (2019) de David Michôd. Le comité Miss France est composé de Pascale Arbillot qui retrouve Montalembert après "Aurore" (2017) de Blandine Lenoir, Cécile Rebboah vue récemment dans "Police" (2020) de Anne Fontaine et qui retrouve le réalisateur après "La Cage Dorée" à l'instar de Jean Franco qui retrouve lui des partenaires avec Christian Benedetti après "Mon Inconnue" de Gélin et après "Hors Normes" également. Citons parmi les Miss régionale Stéfi Celma qui retrouve Pascale Arbillot après le plus musclé "Balle Perdue" (2020) de Guillaume Pierret, qui retrouve aussi Isabelle Nanty après le dyptique "Les Profs" (2013-2015) de Pierre-François Martin-Laval et qui retrouve aussi Moussa Mansaly après "Tout Simplement Noir" (2020) de Jean-Pascal Zadi. Citons la "marraine" Amanda Lear en caméo plein d'auto-dérision, icône avant tout on peut rappeler que sa chanson "Follow Me" était dans la B.O. du film "Une Nouvelle Amie" (2014) de François Ozon qui abordait un sujet similaire à "Miss". Puis enfin, n'oublions pas le patron du club de boxe joué par Patrice Melennec qui a joué dans tous les films de Hugo Gélin et qui retrouve plusieurs membres de "La Cage Dorée". Dans leur propre rôle on notera les présences anecdotiques de Sylvie Tellier Miss France 2002 devenue Directrice Générale du comité, puis Vaimalama Chaves Miss France 2019... Le film aborde la transsexualité sous un oeil nouveau, à savoir l'androgynie ni plus ni moins. Ainsi Alex est un homme qui préfère juste assumer une féminité plutôt qu'un virilité tout en gardant son sexe. Pas d'opération en vue donc, pas de prises d'hormones, pas de soucis d'identité sexuelle, Alex se sait être un homme et ne désire pas changer. On est donc pas dans le film "queer" ou LGBT habituel sur ce point. Par exemple, pour le soucis d'identité sexuelle on peut plutôt citer des films comme "The Danish Girl" (2016) de Tom Hooper ou "Girl" (2018) de Lukas Dhont. Ici on serait plus dans un autre problème, plus axé sur le regard des autres comme "Les Garçons et Guillaume, à Table" (2013) de et avec Guillaume Gallienne ou pourquoi pas "Nos Années Folles" (2017) de André Téchiné. Mais le sujet est vaste et complexe et il serait très fastidieux de lister des films tout aussi divers que nombreux mais on ne peut que conseiller la filmo du réalisateur espagnol Pedro Almodovar. Si on reprend les différentes déclarations du réalisateur on note qu'il veut éviter les clichés, qu'il veut moderniser cet univers et qu'il n'a pas fait un film sur les Miss France.
Malheureusement, ce qu'il veut ne transparaît pas franchement à l'écran ! D'abord on sourit béatement à (justement) cette collection de clichés dans la dite famille où on a un joli panel de "marginaux" ou de laissés-pour-compte très politiquement correct avec les "frères" arabe et noir, la travesti pute, les couturières exclaves indiennes, la bonne "mère vacharde mais en fait très bonne qui n'a pas eu une vie facile"... etc... Niveau poncifs on y est à fond, même la virulence anti-Miss est une caricature outrancière. Ensuite on s'agace de l'omniprésence de... clichés (!) concernant Miss France où le réalisateur nous inonde de séquences très télévisuelles où une dizaine de Miss se dandinent et minaudent avec un fond musical qui permet facilement de combler 10-15mn d'un film qui en fait seulement 107mn générique compris. Par là même, on note un trop grand nombre de passage où le temps est étiré comme ses silences très très qui gagnent ainsi de longues minutes, à perdre. Le scénario en général est d'un académisme galvaudé, si convenu et si linéaire avec la quête du personnage principal, le parcours sans faute, la crise sentimentale, la crise "professionnelle", la réconciliation, ... etc... Le dénouement final est également peu compréhensible voir incohérent, la réaction de Alex sur le plateau télé à la finale de Miss France est soit complètement stupide soit complètement antinomique et contradictoire avec le message qui doit passer, voir même qui ne permet pas à Alex d'affirmer ce qu'il désire depuis le début. Donc tout ça pour ça ?! Clairement Ruben Alves veut une comédie de moeurs légère avec du fond, mais le film est drôle sur 2-3 passages max (allez 4-5 si on est de bonne pâte !) car le réalisateur n'ose jamais dévier de son récit basique sur le fond comme sur la forme. On est loin par exemple du satirique "Little Miss Sunshine" (2006) du duo Faris-Dayton, voir même de "Keep Smiling" (2013) de Rusudan Chkonia, ou du plus sérieux "Laurence Anyways" (2012) de Xavier Dolan. Heureusement, le film surnage grâce à ses interprètes, Pascale Arbillot est toujours aussi juste et classe, Montalembert est impeccable mais c'est surtout Alexandre Wetter qui impressionne, une révélation. Dommage que tout ce petit monde qui emporte l'adhésion et l'empathie soit réunis dans une histoire si banale, si lisse, sans audace aucune. Ca se regarde comme on dit... Note indulgente !
Note :
Pour info bonus, Note de mon fils de 11 ans :