Le Grand Alibi (1950) de Alfred Hitchcock
Après l'échec de "Les Amants du Capricorne" (1949) qui a coulé sa boîte de production Transatlantic Picture après seulement deux films dont "La Corde" (1948), Alfred Hitchcock est parvenu à conclure un contrat honorable avec la Warner en restant entre autre son propre producteur. Pour ce nouveau projet il adapte le roman "Panique !" connu en V.O. "Running Man" (1948) de Selwyn Jepson, auteur déjà adapté avec "The Qualified Adventurer" (1926) de Sinclair Hill. Le scénario est écrit avec son épouse Alma Reville et son ami Whitfield Cook qu'il retrouvera sur "L'Inconnu du Nord Express" (1951), puis ensuite ils sont rejoint par Ranald MacDougall reputé pour avoir écrit "Le Roman de Mildred Pierce" (1945) et "Le Crime était Presque Parfait" (1947) tous deux de Michael Curtiz, pour ce dernier à ne pas confondre avec le futur film homonyme (1954) de Hitchcok. Outre le roman, les scénaristes se sont aussi inspirés d'un fait divers de 1923, l'affaire couple Thompson-Bywaters... Jonathan Cooper est l'amant de Charlotte Inwood, une vedette actrice et chanteuse. Il est fou amoureux au grand dam de son amie Eve. Mais quand l'époux de la star est retrouvé assassinée sans qu'elle sache ce qu'il se serait vraiment passé, Jonathan décide d'aider sa maîtresse mais se retrouve accusé du meurtre. A son tour, il est aidé ̂par Eve qui le croit innocent et elle décide d'enquêter assisté de son père. Son enquête est un peu chamboulée quand elle rencontre l'inspecteur de police chargé de l'enquête...
La vedette est incarnée par une star icônique, Marlene Dietrich muse du réalisateur Joseph Von Sternberg et vue depuis entre autre dans "Désir" (1936) et "Ange" (1937) tous deux de Ernts Lubitsch ou au bras de John Wayne dans "La Maison des Sept Péchés" (1940) de Tay Garnett et "Les Ecumeurs" (1942) de Ray Enright. L'amant et ami Jonathan Cooper est interprété par Richard Todd qui deviendra un peu plus connu par la suite notamment avec "Robin des Bois et ses Joyeux Compagnons" (1952), "La Rose et l'Epée" (1953) et "Le Jour le Plus Long" (1962) tous trois de Ken Annakin, tandis que l'enquêtrice en herbe Eve est incarnée par Jane Wyman jeune star après "Le Poison" (1945) de Billy Wilder et "La Cité Magique" (1947) de William A. Wellman, son père est interprété par Alastair Sim vu dans "La Grande Escalade" (1938) de Carol Reed et "A Cor et à Cri" (1947) de Charles Crichton L'inspecteur est joué par Michael Wilding qui retrouve Hitchcock après "Les Amants du Capricorne" et qui sera surtout connu comme futur époux de Elizabeth Taylor, mais vu aussi dans "L'Egyptien" (1954) de Michael Curtiz ou "Waterloo" (1970) de Serguei Bondarchuk. Autour d'eux citons Kay Walsh actriche fétiche de David Lean notamment vue dans "Les Grandes Espérances" (1946) et "Oliver Twist" (1948), autre habitué de Lean son partenaire André Morell vu par exemple dans "Madeleine" (1950) et "Le Pont de la Rivière Kwaï" (1957), Miles Malleson qui retrouve Hitchcock après "Les 39 Marches" (1935), et enfin n'oublions pas Patricia Hitchcock, fille de Alfred et Alma dans sa première apparition avant deux autres dans "L'Inconnu du Nord Express" et "Psychose" (1960)... Avoir une star du calibre de Marlene Dietrich a changé certaines choses, Hitchcock a ainsi accepté que le star choisisse elle-même ses tenues et coiffures tandis que l'actrice conseillait elle-même le directeur photo pour savoir comment l'éclairer forte de son expérience avec Von Sternberg. Une liberté rare tant Hitchcock a l'habitude de façonner lui-même ses actrices. Par contre, la jeune Jane Wyman avait quant à elle peur d'être trop effacer face à l'aura de l'Ange Bleu, son personnage étant de surcroît souvent enlaidie.
Mais le film est surtout un film singulier dans la filmo du maestro par l'utilisation au début du film d'un flash-backs menteur, où comment Hitchcock pousse une de ses idées jusqu'à un "faux faux coupable". Un concept facile que Hitchcock regrettera par la suite. En fait avec ce film Hitchcock semble avoir fait marche arrière, reprenant un canevas qu'il a déjà explorer à maintes reprises comme dans "Meurtre" (1930) ou "Jeune et Innocent" (1937). Un canevas peu séduisant par ailleurs ou le réalisateur reprend notamment comme héroïne une jeune fille qui devient une femme au fur et à mesure qu'évolue l'intrigue, puis une enquête menée par une néophyte de façon trop peu crédible que ce soit sur le fond ou la forme. Par contre il y a un côté mensonges et vérités qui prend une autre dimension dans des décors théâtraux (nombreux établissements réputés de Londres) comme un hommage. Si la mise en scène est un peu moins créative le film est doté de quelques passages savoureux, humoristique avec la piquante foraine et son "venez tirer sur mes jolis canards", plus tragique avec cet enfant qui se présente avec sa poupée ensanglantée en pleine représentation de la star qui chante alors "La Vie en Rose" ! Une fois n'est pas coutume, Hitchcock fait un caméo dans quasi tous ses films mais dans ce film il fait un de ses plus réussi d'ailleurs François Truffaut le reprendra dans "L'Histoire d'Adèle H." (1975). Avec ce film mineur ce film ouvre néanmoins une décennie qui réunira ses plus grands films.
Note :