Loulou (1980) de Maurice Pialat
Après deux jolis succès critiques et publiques avec "L'Enfance Nue" (1968) et "Nous ne Vieillirons pas Ensemble" (1972) le réalisateur Maurice Pialat a connu un terrible échec avec "La Gueule Ouverte" (1974) ce qui a freiné ses ambitions pour réaliser "Passe ton Bac d'Abord" (1978) qui a limité la casse, assez pour permettre au cinéaste de tourner son 5ème long métrage sur un scénario de Arlette Langmann, soeur de Claude Berri et sa conjointe, monteuse de ses films depuis le début et scénariste occasionnelle qui signe là une histoire fortement inspirée de leur propre couple, et notamment de sa liaison avec un autre homme que Pialat. Le fait que le cinéaste porte cette histoire lui-même à l'écran donne une dimension forcément singulière au projet. À noter que Arlette Langmann sera une collaboratrice régulière de son frère et plus récemment de Philippe Garrel jusqu'au récent "Le Sel des Larmes" (2020)...
Nelly n'e peut plus de sa vie rangée et bourgeoise auprès de André et prend un amant, Loulou un jeune homme dilettante et désinvolte qui vit de débrouille. André est jaloux mais accepte cette relation, préférant être patient malgré quelques crises... Nelly est incarnée par Isabelle Huppert devenue star avec entre autre "Violette Nozière" (1978) de Claude Chabrol ou "Les Soeurs Brontë" (1979) de André Téchiné et qui quitta le tournage du film aussitôt pour le film "La Porte du Paradis" (1980) de Michael Cimino, elle retrouve après "Les Valseuses" (1974) de Bertrand Blier son partenaire Gérard Depardieu dans le rôle titre et qu'elle retrouvera dans "Valley to Love" (2015) de Guillaume Nicloux, lui-même devenu une star sur les mêmes années avec notamment "Préparez vos Mouchoirs" (1977) et "Buffet Froid" (1979) tous deux de Bertrand Blier, il retrouvera Pialat pour "Police" (1985), "Sous le Soleil de Satan" (1987) et "Le Garçu" (1995), puis il retrouvera avec "Le Plus Beau Métier du Monde" (1996) de Gérard Lauzier et "Convoi Exceptionnel" (2019) de Bertrand Blier l'acteur Guy Marchand, plus habitué aux seconds rôles comme dans "Au-Delà de la Gloire" (1980) de Samuel Fuller, "Garde à Vue" (1981) de Claude Miller ou "L'Été en Pente Douce" (1987) de Gérard Krawczyk. Citons ensuite "Mémère" qui retrouve Pialat après le feuilleton TV "La Maison des Bois" (1972), qui retrouve Depardieu après "Vincent, François, Paul... et les Autres" (1974) de Claude Sautet, vu plus tard dans des films comme "Tatie Danielle" (1990) de Etienne Chatiliez et "Aide-Toi le Ciel t'Aidera" (2008) de François Dupeyron, puis Humbert Balsan jeune premier alors vu dans "Lancelot du Lac" (1974) de Robert Bresson, "Tout Feu, Tout Flamme" (1982) de Jean-Paul Rappeneau ou "Les Voleurs de la Nuit" (1984) de Samuel Fuller et qui sera aussi producteur entre autre de "Quartet" (1981) de James Ivory, "Manderlay" (2004) de Lars Von Trier et de nombreux films de Youssef Chahine, Xavier Saint-Macary (frère de Hubert) vvu dans "La Nuit Américaine" (1973) de François Truffaut et "Martin et Léa" (1979) de Alain cavalier, puis enfin n'oublions pas Patrick Poivey qui sera surtout connu pour sa voix, doublant Tom Cruise, Mickey Rourke ou Don Johnson mais surtout régulier pour Bruce Willis... Comme souvent le cinéma de Pialat n'est pas une opération de séduction. Un cinéma âpre et viscéral dont il ne sort que rarement de chaleur et/ou même d'émotion car trop cérébral pour nous toucher. Le rôle titre ne vaut que par et pour Depardieu, animal et balourd dont on ne comprend jamais ce qui a pu attirer Nelly/Huppert à part tenter de faire réagir son mari specimen idéal du macho seventies.
On ne croit jamais que Nelly puisse être amoureuse de l'un ou de l'autre, c'est le plus gros défaut du film puisque l'histoire se base justement sur ce triangle amoureux. Certains y voient un film politico-social sur la différence de classe, la bourgeoise qui tente une émancipation en prenant un amant qui est à l'opposé d'elle, le cliché vaut le coup mais encore faut-il y croire un minimum. Pourtant la différence sociale n'est pas très flagrante hormis le travail. Et la différence de classe pourrait paraître aussi caricaturale et maladroite car Loulou reste un petit loubard sans envergure alors que pauvre ou modeste ne veut pas dire faineant et/ou délinquant. Le pire pourtant dans ce film est que le thème de l'avortement est effleuré et sous-exploité alors qu'il est un moment essentiel du film. Pialat n'aurait-il pas eu le courage nécessaire sur ce sujet ?! Et sinon pourquoi le suggéré plutôt que de l'aborder réellement ?! Bref, ça reste du Pialat, un cinéma froid qui ne raconte pas grand chose ou qui ne va pas au fond des choses malgré ce qu'on peut percevoir en filigrane. Un film qui vaut surtout pour le côté "histoire vraie" et surtout pour la rencontre Pialat-Depardieu qui marquer toute une époque. À noter que le film est interdit au moins de 12 ans, sans doute un peu sévère mais qu'importe, les enfants n'en voudront pas. Un cinéma intéressant mais ennuyeux.
Note :