L'Animal (1977) de Claude Zidi

par Selenie  -  19 Octobre 2021, 08:44  -  #Critiques de films

Ce film c'est la réunion de deux talents à la croisée des chemins comme on dit, à savoir le réalisateur Claude Zidi qui accumule les comédies populaires à succès comme "Les Fous du Stade" (1972), "La Moutarde me Monte au Nez" (1974) ou "L'Aile ou la Cuisse" (1976), et la star Jean-Paul Belmondo qui vient de connaître deux déceptions avec les sérieux "L'Alpagueur" (1977) de Philippe Labro et "Le Corps de mon Ennemi" (1977) de Henri Verneuil avec moins de 2 millions d'entrées France pour les deux, ce qui est rare pour la star incontestée du box-office français. Comme souvent, Belmondo alterne les genres, et après deux drames il a bien envie de revenir à la comédie, Zidi est sur une belle lancée et donc le producteur Christian Fechner est assez confiant pour offrir un des plus gros budget de l'époque. Zidi co-signe le scénario avec deux nouveaux collaborateurs, Dominique Fabre qui a essentiellement travaillé avec le cinéaste Etienne Périer de "Bobosse" (1959) à "La Part du Feu" (1978), et surtout Michel Audiard qui a déjà signé et signera de nombreux films avec Belmondo de "Cent Mille Dollars au Soleil" (1962) à "Les Morfalous" (1984) tous deux de Henri Verneuil en passant par "L'Incorrigible" (1975) de Philippe De Broca ou "Le Professionnel" (1981) de Georges Lautner. Audiard était particulièrement enthousiaste pour opposer les "deux Belmondo, l'un gentil, drôle, audacieux et l'autre, anti-Belmondo, bellâtre, efféminé, avec des faux airs à la Valentino et roulant des mécaniques comme Burt Reynolds"... 

Michel Gaucher est cascadeur mais sa carrière est trop fluctuante car c'est aussi un gaffeur plus ou moins volontaire, et à force sa compagne américaine, cascadeuse également, ne supporte plus cette vie trop aléatoire et le quitte. La malchance continue et bientôt il ne trouve plus de contrat jusqu'à ce qu'il soit embaucher car il ressemble comme deux gouttes d'eau à la vedette du moment, Bruno Ferrari. Ce dernier fait croire aux médias et à ses fans qu'il assume ses cascades, mais ce n'est pas grave, Michel fait en sorte de faire engager son ex pour pouvoir la reconquérir tout en assumant à ses risques et périls le doublage de Ferrari... Bébel incarne donc logiquement le double rôle Gaucher et Ferrari et joue pour la première fois aux côtés d'une des plus belles femmes des années 60-70, Raquel Welsh star vue notamment dans "Un Million d'Année avant J.C." (1966) de Don Chaffey et "Bandolero !" (1968) de Victor V. McLaglen et qu'on reverra dans un autre film français avec "Folle d'Elle" (1998) de Jérôme Cornuau. Plusieurs acteurs retrouvent Belmondo, son ami Charles Gérard, Johnny Hallyday et Aldo Maccione vus notamment dans  "L'Aventure c'est l'Aventure" (1972) de Claude Lelouch, Julien Guiomar et Mario David étaient tous deux dans les films "Borsalino" (1970) de Jacques Deray et "Les Mariés de l'An II" (1971) de Jean-Paul Rappeneau, la plupart d'entre eux retrouvent également le réalisateur Claude Chabrol qui joue justement le metteur en scène. Citons aussi Jane Birkin qui retrouve Zidi et Guiomar après "La Moutarde me Monte au Nez" (1974), juste avant "La Course à l'Echalotte" (1975) toujours de Zidi. Et enfin, on reconnaîtra trois acteurs à leur début de carrière après seulement quelques films, Richard Bohringer, Maurice Bénichou et Josiane Balasko, ces deux derniers se retrouvant après avoir été à l'affiche de "Un Eléphant ça Trompe Enormément" (1976) de Yves Robert... Dès le générique en animation avec la musique disco de Vladimir Cosma on a le sourire aux lèvres pour une nouvelle comédie de Claude Zidi alors au sommet. Mais déjà à la lecture du speech ce film  souffre d'emblée d'une comparaison évidente avec "Le Magnifique" (1973) de Philippe De Broca où Bébel jouait déjà un double rôle ; d'un écrivain-espion il passe à une star maniérée-cascadeur maladroit. Evidemment le film pêche par un style de fond beaucoup trop ancré dans son époque, aujourd'hui en 2021 avec ce "féminisme-roi" bien-pensant le film est évidemment empreint d'un certain sexisme symbolisé par la sublime plastique de Raquel Welsh. La caricature de l'homosexualité aura aussi ses détracteurs.

Mais le film est de 1977 et il ne faut pas oublier que chaque oeuvre (et pas que dans le cinéma) doit être remis dans son contexte et a droit à la tolérance qu'on prône justement aujourd'hui. "La Cage aux Folles" (1978) de Edouard Molinaro ne sera pas spécialement plus avare en cliché. Pas très grave en vérité, car Bébel est en forme, charisme, fantaisie et cascade sont les ingrédients magiques de cette comédie rythmée qui ne laisse aucun répit avec en prime le charme de la star américaine. Certe on remarque de nombreux faux raccords, dont certains sont vraiment grossiers comme le retard de synchronisation sur un plan où la partie gauche est décalé avec la droite, ou quand Michel/Belmondo tombe sur un gâteau et que le plan suivant il se retrouve propre, ou encore les tulipes dont les pétales ont été coupé par une porte sont revenues pour être jetées à la poubelle. Mais malgré ses lourdeurs parfois, ou ses maladresses le film reste d'une générosité non négligeable dont l'atout maître reste les cascades dantesques de Bébel. Des cascades inouïes de la lutte avec un véritable tigre aux hilarantes chutes dans l'escalier en passant par les tonneaux au Sacré-Coeur et surtout la cascade aérienne que les compagnies d'assurance ont refusé de prendre en charge ! Ces cascades qui ont valu à la star de nombreuses blessures : foulure de la cheville, morsure à la tête du tigre, déchirure et entorse à la jambe... Claude Zidi confirme une nouvelle fois la popularité de ses comédies, Belmondo renoue avec le sommet du box-office, le film engrange plus de 3 millions d'entrées France et devient le 5ème plus gros succès de l'année. 

 

Note :            

12/20

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :