Unpregnant (2021) de Rachel Lee Goldenberg
Nouveau projet de la réalisatrice Rachel Goldenberg audacieux au vu du contexte politico-social de son pays les Etats-Unis. D'abord abonnée aux films ou téléfilms très oubliables comme "La Princesse et le Poney" (2012) et "Rendez-Vous à Noël" (2012), la cinéaste semble doucement se pencher sur des sujets d'actualité précis depuis ses téléfilms "Dans l'Enfer de la Polygamie" (2013) et "Grossesse sous Surveillance" (2015). Ainsi cette fois elle choisit de signer un long métrage adapté du roman éponyme (2019) de Ted Caplan et Jenni Hendricks. Ces derniers, qui ont respectivement écrit "Love Sonia" (2018) de Tabrez Noorani pour l'un et la série TV "How I Met Your Mother" (2007-2010) pour l'autre, co-signent le scénario en collaboration avec Jennifer Kaytin Robinson après son film "Quelqu'un de Bien" (2019) et Bill Parker après avoir été monteur sur plusieurs oeuvres de Rachel Goldenberg. Un projet qui est loin d'être anodin, la réalisatrice précisant "vouloir déstigmatiser l'avortement à un moment où les droits reproductifs sont menacés", et qu'il y avait "une réelle urgence". La réalisatrice avoue avoir elle-même vécu cette expérience. Pour mieux comprendre, nous conseillons de jeter un oeil sur la législation sur la question ICI !... Veronica, 17 ans, apprend qu'elle est enceinte malgré le préservatif. Elle pense aussitôt à l'avortement car elle espère entrer à l'université bientôt. Malheureusement, ses parents catholiques sont anti-avortementelle et elle habite le Missouri un des états les plus répressifs en ce qui concerne l'IVG. Elle décide de partir à plus de 1500 kms et de faire le voyage en 3 jours maximum afin que ses parents ne se doutent de rien. Problème, elle n'a pas de voiture, elle décide alors de demander de l'aide à son ex-meilleure amie...
Pour le rôle principal de Veronica, la cinéaste a choisi Haley Lu Richardson qu'elle retrouve après son téléfilm "Dans l'Enfer de la Polygamie", depuis on a pu voir l'actrice dans "Split" (2017) de M. Night Shyamalan ou encore "À Deux Mètres de Toi" (2019) de Justin Baldoni. Sa meilleure amie est incarnée par Barbie Ferreira vue dans les séries TV "Divorce" (2016-2019) et "Euphoria" (2019-...), actrice méconnue mais classée en 2016 selon le magazine Time parmi les "30 adolescentes les plus influents". Les jeunes femmes vont croiser Alex MacNicoll vu dans "La 5ème Vague" (2016) de J BLakeson, Giancarlo Esposito vu dans "Okja" (2017) de Bong Joon-Ho et "Le Labyrinthe : le Remède Mortel" (2018) de Wes Ball, Sugar Lyn Beard vue notamment dans "Hors de Contrôle" (2016) de Jake Scymanski et "The Disaster Artist" (2018) de et avec James Franco, Breckin Meyer vu dans les séries TV "Franklin et Nash" (2011-2013) et "Robot Chicken" (2005-2019), Mary McCormack vue dans "Full Frontal" (2002) de Steven Soderbergh, "Chambre 1408" (2007) de Mikael Hafström et la série TV "A la Maison Blanche" (2004-2006), puis enfin Betty Who surtout connue comme chanteuse australo-américaine... Une adolescente qui tombe enceinte est un sujet déjà abordé au cinéma, on peut citer des films comme "Brodeuses" (2003) de Eleonore Faucher, "Juno" (2007) de Jason Reitman, "17 Filles" (2011) des soeurs Coulin, "Grandma" (2016) de Paul Weitz, "Les Filles d'Avril" (2017) de Michel Franco ou encore le récent "Alice T." (2019) de Radu Muntean. Après les premières minutes dignes d'un teen movie plutôt drôle, la première chose qui frappe est que l'adolescente ne tergiverse pas, elle sait d'emblée qu'elle doit se faire avorter pour ne pas hypothéquer ses chances pour l'université. Une jeune femme qui n'est pas spécifiquement dans la réflexion morale, mais plus dans une situation de survie et de liberté. Le film aborde donc l'avortement non pas sur sa question morale ou religieuse, mais sur la question que l'avortement devrait être libre et non stigmatisé, il devrait être un choix unilatéral d'une femme libre de son corps sans devoir se battre contre des systèmes et des idéologies anti-IVG parfois même si la grossesse est la conséquence d'un viol !
D'ailleurs le film aborde également ce sujet tendancieux de façon judicieuse (capote percée ?!) et en ne stigmatisant pas l'"agresseur sexuel". Par là même, l'expérience de Veronica est une aventure qui reste humaine et sans tragédie directe, ainsi les conséquences finales sont optmistes. La réalisatrice signe un film à la fois road movie et buddy movie, avec une quête qui touche à l'intime et qui pourrait facilement tomber dans le drame pur, mais qui passe un message d'espoir et de bonheur avec une conclusion évidente : vivre et avancer quoi qu'il arrive. Les rebondissements sont assez nombreux pour en faire une comédie qui aborde des sujets sérieux sans tomber dans la tragédie ou la bonne morale; Il y a des moments plutôt drôles, d'autres plus émouvants, mais ne tombe jamais dans le larmoyant ou la niaiserie. Certains passages tombent dans le cliché récurrent (gay attitude, papa absent...) mais basé sur d'autres sujets périphériques. Par contre, on est déçu d'une séquence qui a frôle le coup de génie ; alors que les deux ados fuient à pied on se dit pourquoi ne volent-elles pas le camping-car ?!! Le pied de nez qui aurait suivi aurait été un petit caviar ! Tant pis, cela restera un fantasme. Le film a la bonne idée de rappeler que toute expérience n'est pas forcément traumatisante, que toute expérience peut aussi être un pas en avant. Rachel Goldenberg offre une autre facette de la grossesse adolescente, un autre regard qui ni triste ni une flagellation, mais une aventure de jeunesse, une histoire d'amitié aussi, avec un duo d'actrices au diapason. Le film est évidemment très dirigé politiquement, mais la cinéaste a aussi l'intelligence de laisser s'exprimer les avis divergents. Un joli film. A conseiller.
Note :