L'Homme de la Cave (2021) de Philippe Le Guay

par Selenie  -  20 Octobre 2021, 15:03  -  #Critiques de films

Le réalisateur Philippe Le Guay change de genre, après ses comédies plus ou moins dramatiques voici qu'il s'essaie au thriller avec une histoire qui lui a été inspiré par un fait divers réel vécu par des amis qui ont vendu leur cave : "Cette vente banale s'est transformée en un véritable cauchemar. L'acquéreur s'est révélé être un néo-nazi pur et dur, un des piliers du négationnisme en France. Quand le couple a voulu annuler la vente, c'était trop tard. Sans le savoir, ils avaient scellé la vente puisque dans le droit français "tant qu'il a accord sur la chose et sur le prix, la vente est conclue". Même si l'acte notarié n'a jamais été signé. Mes amis ont entrepris de casser la vente, ils ont eu recours à une première procédure, il y a eu un procès... et ils ont perdu. Il a fallu réengager un autre avocat et reprendre tout à zéro. Ca a duré plus deux ans. Je me suis intéressé à cette histoire en 2009, alors l'homme de la cave venait d'être expulsé. Mes amis ont subi un tel traumatisme que leur couple a explosé, alors qu'ils s'adoraient." Le réalisateur-scénariste collabore au scénario avec Marc Weitzmann, journaliste et romancier qui signe là son premier scénario, puis surtout avec Gilles Taurand scénariste régulier de André Téchiné comme sur "Hôtel des Amériques" (1981) et "Les Egarés" (2003) et plus récemment auprès de Robert Guédiguian comme sur "Une Histoire de Fou" (2015) et auprès de Christophe Honoré comme sur "Les Malheurs de Sophie" (2016). Précisons que le réalisateur-scénariste a modifié deux paramètres vis à vis de l'histoire vraie, le couple n'est plus juif à 100% mais mixte, madame n'est donc pas juive dans le film, puis il ne s'agit plus d'un "pur" néo-nazi mais un prof d'Histoire négationniste...

Simon et Hèlène décide de vendre la cave familiale dont la maman et le frère de Simon sont aussi co-propriétaire. Un homme l'achète soi-disant pour y mettre divers affaires. Pour rendre service Simon donne les clefs avant que l'acte notarié ne soit signé mais Simon apprend vite que l'homme s'y est installé pour y vivre. Après quelques autres incidents Simon apprend que l'homme en question est en fait un influenceur négationniste ce qui touche particulièrement Simon et sa famille étant juifs et ayant un passé douloureux avec les camps de concentration. La famille désire annuler la vente mais ce n'est pas si simple... Le couple est incarné par Bérénice Bejo vue récemment dans "Le Bonheur des Uns..." (2020) de Daniel Cohen, et Jérémie Renier qui retrouve Philippe Le Guay après "Nue Propriété" (2006) et vu dans "Slalom" (2021) de Charlène Favier et bientôt dans "Albatros" (2021) de Xavier Beauvois. Leur fille est jouée par la jeune Victoria Eber surtout vue dans la série TV "Au-Delà des Apparences" (2018-2019). Le frère de Simon/Renier est interprété par Jonathan Zaccaï vu récemment dans "Noureev" (2019) de Ralph Fiennes et "Belle Fille" (2020) de Méliane Marcaggi, tandis que la mère est jouée par Denise Chalem vue récemment dans "Tout s'est bien Passé" (2021) de François Ozon. Le père de Hélène/Bejo est tenu par Patrick Descamps qui retrouve Le Guay et son partenaire Jeremy Renier après "Nue Propriété" et vu récemment dans "Les Intranquilles" (2021) de Joachim Lafosse. L'homme négationniste est incarné par François Cluzet vu dernièrement dans "Poly" (2020) de Nicolas Vanier qui retrouve également le réalisateur après "Normandie Nue" (2018), et donc ainsi que son partenaire Patrick d'Assumçao qui était également dans "Floride" (2015) également de Le Guay. Et enfin citons deux des avocats interprétés par François-Eric Gendron qui retrouve le réalisateur après "Du Jour au Lendemain" (2006), puis Martine Chevallier vue entre autre dans "Les Adieux à la Reine" (2012) de Benoît Jacquot et "Fleur de Tonnerre" (2016) de Stéphanie Pillonca dans lequel était aussi Jonathan Zaccaï... Le film débute avec une visite de cave qui paraît tout à fait normal mais on y décèle d'emblée une gêne, un malaise, formidablement instillé par un climax idéal et un personnage qu'on sent aussitôt peu agréable. Mais on se met à la place du vendeur, ici Simon/Renier qui n'y voit qu'un acheteur potentiel qui semble finalement calme. Premier constat donc, effectivement, un vendeur ne s'intéresse jamais au caractère ou à l'intime de l'acheteur, on s'en moque puisqu'on veut surtout son chèque ! Cela a son importance... Ensuite on commence à avoir bien du mal à comprendre les réactions des uns et des autres au fil du récit.

En effet, une fois vendu qu'il y mette des cartons ou qu'il y dorme qui cela gênerait-il vraiment si il n'y a pas de gênes et/ou de nuisances ?! Et donc par ricochet qui irait soudain faire des kilomètres pour enquêter sur un passé de l'acheteur ?! Et les questions s'accumulent, ainsi il faudrait donc faire des enquêtes de moralité pour vendre aux seuls et uniques bons citoyens ?! Ensuite il est question de croire au côté réellement vénéneux de ce négationniste. En effet, les plus influents sont aussi les plus médiatiques, et la plupart du temps sont notamment publiés comme Robert Faurisson (mort en 2018) ou Alain Soral en France. Dans le film au contraire l'homme est un rat (dans tous les sens du terme, car s'il se lave il vit dans un lieu insalubre ! de l'autre il n'est pas un psychopathe juste un version "dure" du complotiste qu'on connaît tous) qui vit comme un rat et dont on n'a aucune info probante quant à son influence réelle sur les réseaux sociaux ou autre. La nuisance de ce "rat" n'est jamais franchement prouvé puisqu'il attaque qu'à partir du moment où Simon lance la première salve. On a donc bien du mal à comprendre tout le pataquès pour finalement un marginal qui s'est trouvé une cave pour avoir un toit. On s'agace d'autant plus quand les membres de la famille propriétaire partent en vrille, pètent un câble ou deviennent hystérique dans un surjeu constant des acteurs par ailleurs. Si l'intrigue principale se focalise sur comment exproprié l'homme de la cave, on remarque tout de même que le scénario laisse une place non feinte aux crises intra-familiales. On a donc l'idylle de l'ado dont on se fout royalement, on a les petites piques entre frangins qui font surtout clichés, on a l'épouse qui devient obsédée (pour ne pas dire hystérique !) pour comprendre le négationnisme (?!)... D'ailleurs sur ce dernier point, et sur le passé familial on a droit à une séquence à laquelle on ne croit pas une seconde, où comment l'épouse et sa belle-mère regarde des photos de famille en parlant du passé comme si c'était la première fois alors que le couple doit être ensemble depuis une vingtaine d'années et que la famille semble pourtant soudée ; car si on se doute qu'il existe des sujets qui n'auraient pas été abordé (rapport aux déportations) on est par contre très perplexe quand à regarder simplement des photos de la famille, où à l'histoire de l'appartement. Enfin, on se demande pourquoi le réalisateur ne conclût pas son histoire comme celle de ses amis (conséquences pour les uns et les autres) ?! Finalement le gros soucis est de faire croire à un thriller (atmosphère, esthétique, homme "inquiétant") sans que jamais on puisse croire vraiment aux côtés poisons et/ou dangereux de ce "rat" de cave. Tout sent l'esbroufe (action et réaction de la famille too much à chaque fois), tout semble forcé, tout semble trop artificiel, et finalement on n'y croit jamais. Dommage... 

 

Note :            

 

08/20
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