La Fracture (2021) de Catherine Corsini
Après deux drames amoureux et conjugaux avec "La Belle Saison" (2015) et "Un Amour Impossible" (2018), la réalisatrice Catherine Corsini a eu besoin de se frotter à une actualité plus sociale et actuelle au regard notamment des manifestations des Gilets Jaunes. Elle ne savait pas vraiment par où commencer jusqu'au jour où elle a dû aller aux Urgences après une mauvaise chute : "Après avoir vécue cette expérience, je me suis dit que cette arène des Urgences était le lieu idéal pour raconter ce qui me préoccupait. Plonger un couple de femmes d'un milieu social aisé dans cet endroit pouvait donner lieu à des échanges, des confrontations, et rendre compte des contrastes et des factures de la société." La réalisatrice-scénariste avoue s'être beaucoup inspiré du documentaire "Classes Moyennes, des Vies sur le Fil" (2015) de Frédéric Brunnquell et des podcasts de France Culture, mais aussi et surtout elle y a ajouté beaucoup d'elle-même et de sa vie privée notamment vis à vis de sa relation avec sa compagne Elizabeth Perez qui est aussi la productrice du film. Pour ce projet Catherine Corsini co-signe le scénario avec Laurette Polmanss qu'elle retrouve après ses deux derniers films sus-cités, puis avec Agnès Feuvre à qui on doit entre autre les scénarios des films "Vendeur" (2015) de Sylvain Desclous et "Médecin de Nuit" (2021) de Elie Wajeman...
Un soir d'hiver en fin de manifestation des Gilets Jaunes, Raf et Julie au bord de la rupture se retrouvent aux Urgences après que Julie se soit fracturer le bras. Le service hospitalier en grève et débordé, tandis qu'arrive aussi un manifestant blessé. Sa rencontre avec le couple avec qui tout l'oppose va peser encore plus sur l'atmosphère et bientôt l'hôpital doit fermer ses portes... Le couple lesbien est incarné par Valeria Bruni-Tedeschi vue récemment dans "Les Amours d'Anaïs" (2021) de Charline Bourgeois-Tacquet et "Cette Musique ne joue pour Personne" (2021) de Samuel Benchetrit, puis Marina Foïs vue dans "Enorme" (2020) de Sophie Letourneur et en salles actuellement dans un autre film, "Barbaque" (2021) de et avec Fabrice Eboué. Le Gilet jaune blessé est joué par Pio Marmaï vu dans "Comment je suis devenu Super-Héros" (2021) de Douglas Attal et "Médecin de Nuit" cité plus haut, mais aussi "Vendeur". Citons ensuite Jean-Louis Coulloc'h surtout remarqué pour son rôle dans "Lady Chatterley" (2006) de Pascale Ferran et vu depuis dans des films comme "Le Skylab" (2011) de et avec Julie Delpy, "Elles" (2012) de Malgorzata Szumowska ou "Les Cowboys" (2015) de Thomas Bidegain, puis enfin citons Aissatou Diallo Sagna dans son premier rôle à l'écran en tant qu'infirmière alors qu'elle est aide-soignante à la ville... La première chose qu'on remarque est que la réalisatrice utilise la caméra portée pour la prmeière fois dans sa filmo, un choix évidemment dirigé par son sujet afin de matérialiser à l'image l'urgence des Urgences et la nervosité ambiante. Le titre, le sujet font qu'évidemment le film à une portée nationale, pour ne pas dire universelle, où chaque citoyen peut se sentir intéressé et même touché par cette histoire dans laquelle chacun peut sans doute s'identifier. Ce qui explique aussi sans doute le bon accueil reçu par le film, des critiques plutôt bonnes pour ne pas dire indulgentes tant le sujet abordé est actuel et touche effectivement des "fractures" sociales réelles et douloureuses. Malheureusement la réalisatrice-scénariste multiplie les invraisemblances et/ou les maladresses qui ne permettent pas d'y croire. En effet, le réalisme tant désiré par la cinéaste en nous plongeant dans les galères des Urgences hospitalières est parasité par trop de scènes tirées par les cheveux ou si démago, souvent dues à une volonté politique d'orienter le propos sans une once d'objectivité. Premier hic, ses personnages principaux qui sont tous les trois insupportables, imbuvables avec la conjointe froide comme une porte de prison, le pompon avec sa femme blessée cinquantenaire qui agit à chaque instant comme si elle était une ado pourrie gâtée qu'on a envie de gifler dès qu'elle parle, et enfin le gilet jaune blessé également évidemment parce que la police est violente (sans nuancé un seul instant le travail des bleus jusqu'à une autre intervention marquante !) qui hurle à chaque instant et qu'on s'étonne qu'un révolutionnaire aussi virulent s'étonne dès qu'il voit des images aux infos !?
Ces deux blessés sont constamment dans une hystérie abjecte qui empêche toute empathie mais surtout qui ne permet aucun débat de fond ; on attend encore et toujours que ces deux individus que tout oppose ouvre les écoutilles justement pour étoffer un propos ou un message qui ne sera finalement jamais constructif. C'est clairement le gros râtage du film. Mais pourtant plus le film avance et plus on tombe dans le n'importe quoi. Ironie du sort, on a l'impression que le film use des stratagèmes de l'extrême droite en faisant plus noir que noir, en décrivant une guerre civile où même l'enceinte hospitalière est en proie eu pire à l'image des manifestants qui s'agglutinent tels des animaux aux portes des Urgences prêts à en défoncer l'entrée s'il le fallait ! sans compter évidemment (encore !) la police violente qui serait prête à faire de même (?!). Un peu plus on serait dans un "American Nightmare" à la française ! D'ailleurs, amusant (?!) de voir qu'on laisse entrer sans soucis des dizaines de manifestants imprégnés de lacrymogène et de fumigène dans l'enceinte hospitalière sans se soucier des autres malades ?! Une multitude de petites scènes continuent de polluer le récit comme des patients qui sont prêt à accoucher une femme alors qu'ils sont entourer de professionnels, ou un personnel infirmier qui laisse une inconnue donner des soins. Heureusement (pourrait-on dire) quelques passages sauvent le film du pur naufrage. On pense à quelques instants de grâce, les moments intimes du couple lesbien uniquement quand la folle dingue/Tedeschi est dans le calme, les moments de solidarité simple, quelques secondes de légèreté tragi-comique, mais aussi des parties où l'émotion rappelle aussi la détresse qui nous entoure comme cette une vieille femme qui meurt dans l'indifférence, une infirmière dépassée par les événements... Mais ces scènes justes et sobres ne sont pas assez nombreuses ni assez puissantes pour compenser un scénario bancal et trop caricatural, sans nuance, pas aidé par un trio de personnages inintéressants et ridicules. Une grande déception, on aura connu Catherine Corsini beaucoup plus fine et subtile.
Note :