Little Jaffna (2025) de Lawrence Valin

par Selenie  -  8 Mai 2025, 07:25  -  #Critiques de films

Premier long métrage de Lawrence Valin, qui s'inspire de son propre vécu en tant que membre d'une famille franco-tamoule pour écrire son histoire. Fasciné par les questions d'identité culturelle il poursuit la thématique dans la continuité de ses courts métrages "Little Jaffna" (2018) et "The Loyal man" (2020). Le réalisateur-scénariste-acteur s'octroie de surcroît le rôle principal, et co-écrit son scénario avec de nombreuses autres mains, les inconnus Marlène Poste et Arthur Beaupère, puis Yacine Badday qui a signé "L'Été Éternité" (2022) de Emilie Aussel et "Acide" (2023) de Just Philippot, Malysone Bovorasmy scénariste de "Deux" (2018) de Filippo Meneghetti, puis Gaëlle Macé autrice sur "Partir" (2009) de Catherine Corsini, "Belle Épine" (2010) et "Grand Central" (2013) tous deux de Rebecca Zlotowski. Le cinéaste cite comme référence les films de Wong Kar-Wai pour l'atmosphère stylisé, puis le cinéma indien en particulier le réalisateur Tamil Nadu notamment pour le mélange des sons tamoules et l'électro contemporaine. Précisons que le titre est le surnom du quartier à majorité tamoule du quartier de La Chapelle à Paris...

Michael jeune policier d'origine tamoule est choisi pour infiltrer un groupe criminel connu pour des extorsions et blanchiment d'argent au profit de rebelles séparatistes au Sri Lanka. Mais à mesure qu'il s'enfonce dans les méandres de l'organisation sa loyauté est mise à l'épreuve... Le jeune policier est incarné par le réalisateur lui-même, Lawrence Valin déjà apparu devant la caméra dans les films "Le Beau Monde" (2014) de Julie Lopes Curval, "Lola Pater" (2017) de Nadir Moknèche et "Amandine" (2018) de Mikhaël Hers. La grande partie du casting est composé d'acteurs indiens, surtout tamouls, de nombreux amateurs ou non-professionnels comme l'actrice Puviraj Raveendran et l'acteur Sajinthan Santhiran, puis des acteurs plus connus dans leur communauté avec Vela Ramamoorthy vu entre autre dans "Aramm" (2017) de Gopi Nainar, "Kaali" (2018) de Kiruthiga Udhayanidhi, "Mehandi Circus" (2019) de Raju Saravanan ou "800" (2023) de M.S. Sripathy, l'actrice Radhika Sarathkumar vue dans "Love Today" (2022) de Pradeep Ranganathan, "Kolai" (2023) de Balaji K. Kumar ou "Merry Christmas" (2024) de Sriram Raghavan, Kawsie Chandran vu dans "Dirty, Difficult, Dangerous" (2022) de Wissam Charaf, puis n'oublions pas l'"intruse" avec l'actrice française Marilou Aussilloux vue dans "En Corps" (2022) de Cédric Klapisch, "Sous le Tapis" (2023) de Camille Japy et "La Pie Voleuse" (2024) de Robert Guédiguian... Lawrence Valin a voulu renforcé l'authenticité jusqu'à tourner vraiment dans Little Jaffna à Paris, profitant aussi de la vraie fête de Ganesh, événement majeur de la communauté, et en intégrant de véritables membres de la diaspora dans les scènes ce qui accentue le réalisme des dialogues et dans les relations humaines accentuant un style semi-documentaire. Mais on est aussi dans le premier film français sur une diaspora peu connue et dont le contexte géo-politico-social est aussi important que méconnue. Ainsi le film est assez bien écrit pour comprendre les grandes lignes sans être scolaire, notamment que les Tigres Tamouls sont laïcs et ouverts aux différentes religions. Mais on invite aussi à lire l'article sur les Tigres Tamouls (Tout savoir ICI !). Notons donc que logiquement le film se déroule en 2008-2009.Le film débute fort, avec une frénésie étonnante entre polar musclé et un ersatz de Bollywood sans le clinquant et le kitsh. Non, on est plutôt dans une thriller sombre, fataliste dans les bas-fonds underground d'une communauté aussi discrète que secrète à la manière de la plupart des diasporas asiatiques, et a contrario du monde maghrébin.

On sent que le réalisateur-acteur a soigné le style, alternant les éléments festifs et chatoyants qui font la singularité culturelle tamoule mêlanr d'ailleurs folklore et modernité, avec une partie Film Noir âpre et violent avec en filigrane les conflits intra-communautaire. Cet équilibre est parfait et donne une universalité au propos. Par là même, le flic intégré en conflit identitaire personnel est intéressant même si il aurait pu être plus fouillé. Il y a surtout une scène qui manque de crédibilité, et une qui est une erreur technique grossière mais que beaucoup verront (ou pas !) comme un détail... ATTENTION SPOILERS !... La nuit de noce, il est alors question d'honneur, on se demande alors pourquoi après une telle mission punitive le frère et ses camarades ne tue pas l'époux maudit et/ou ne ramène pas la soeur fiancée de force ?! Tout ça pour ça, vraiment ?! Et sinon, jamais un jeune policier en formation à l'école serait infiltré ainsi durant des mois, il sort de l'école (à la fin c'est clair) mais il porte donc un grade sur les épaules correct de gardien de la paix stagiaire mais il porte une casquette un galon de brigadier qui n'existe d'ailleurs plus depuis 2023... FIN SPOILERS !... Néanmoins, Lawrence Valin assume un polar communautaire solide, efficace, rythmé avec du punch et un véritable propos de fond même si il y a quelques maladresses, outre les spoils, comme des seconds rôles qui auraient sans doute mérité un traitement plus approfondis (la collègue, la fiancée façon Juliette...), où le fait que le film est particulièrement stylé voir icônique dans sa première partie avant de s'assagir ensuite. Mais ça reste prometteur et donc un film à conseiller.

 

Note :                 

14/20
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