La Femme au Portrait (1944) de Fritz Lang

par Selenie  -  3 Juin 2025, 07:54  -  #Critiques de films

Réalisateur allemand culte de films comme "Métropolis" (1924) ou "M le Maudit" (1931), Fritz Lang a fui l'Allemagne Nazie pour une nouvelle carrière hollywoodienne où il s'est d'ores et déjà fait remarquer avec "Furie" (1936) et "J'ai le Droit de Vivre" (1937). Mais si le réalisateur est aux commandes il s'agit avant tout d'un projet de Nunnally Johnson, producteur chez Universal et scénariste réputé notamment pour le chef d'oeuvre "Les Raisins de la Colère" (1940) de John Ford et qui signera encore quelques titres importants comme "La Cible Humaine" (1950) de Henry King ou "Les 12 Salopards" (1967) de Robert Aldrich. Le producteur-scénariste assume donc cette adaptation du roman "Once off Guard" (1942) de J.H. Wallis... Un soir, le professeur-criminologue Richard Wanley admire un tableau représentant une très belle femme dont il rencontre par hasard le modèle, Alice. Ils font connaissance, elle l'invite chez lui mais un homme fait irruption et tente d'étrangler le professeur qui le tue en légitime défense. Alice panique, le professeur qui est marié pense rapidement que leur histoire ne sera jamais crue. Wanley se débarasse du corps tandis que Alice nettoie à fond son appartement, puis ils décident de ne plus jamais se revoir... 

Le professeur Richard Wanley est incarné par Edward G. Robinson vu entre autre dans "Le Vaisseau Fantôme" (1940) de Michael Curtiz, "Obsession" (1943) de Julien Duvivier ou "Assurance sur la Mort" (1944) de Billy Wilder, la belle Alice est jouée par Joan Bennett remarquée dans "Les Quatre Filles du Docteur March" (1933) de George Cukor et est surtout une fidèle de Fritz Lang après "Chasse à L'homme" (1941), avant "Le Secret derrière la Porte" (1948) et surtout elle le retrouvera encore dans "La Rue Rouge" (1945) ainsi que Edward G. Robinson et leur autre partenaire Dan Duryea vu dans "La Vipère" (1941) de William Wyler, "Boule de Feu" (1941) de Howard Hawks et "Espions sur la Tamise" (1944) également de Fritz Lang. Citons ensuite Arthur Loft qui retrouve Fritz Lang entre "Les Bourreaux meurent Aussi" (1943) et "La Rue Rouge" (1945), Raymond Massey vu dans "Le Prisonnier de Zenda" (1937) de John Cromwell, "Les Naufrageurs des Mers du Sud" (1942) de Cecil B. De Mille ou "Arsenic et Vieilles Dentelles" (1944) de Frank Capra, Edmond Breon connu comme l'inspecteur Juve dans la série des "Fantomas" (1913-1914) et vu ensuite dans "Au Revoir Mr. Chips" (1939) de Sam Wood ou "Hantise" (1944) de George Cukor, Dorothy Peterson apparue dans "L'Île au Trésor" (1934) de Victor Fleming ou "Cinquième Colonne" (1942) de Alfred Hitchcock, Iris Adrian aperçue la même année dans "Barbe Bleue" (1944) de Edgar Georg Ulmer et "Million Dollar Kid" (1944) de Wallace Fox, puis enfin Robert Blake vu surtout plus tard dans "Le Trésor de la Sierra Madre" (1948) de John Huston ou "De Sang Froid" (1967) de Richard Brooks... Le film débute un peu facilement et maladroitement, il sous-entend que le professeur a évidemment les armes pour commettre un crime parfait (alors que dans le livre il n'est "que" prof d'anglais), et montre le professeur en bon époux et bon père de famille alors même que l'acteur Edward G. Robinson n'est clairement pas crédible dans ce rôle. D'ailleurs, à peine est-il séduit qu'il accepte une invitation qui n'est évidemment pas anodine surtout venant d'une femme en 1944. On s'attend donc justement à ce que Richard Wanley/Robinson soit un peu plus ambigu et complexe mais malheureusement ça ne sera pas le cas.

Mais le récit prend réellement son envol avec l'attaque et le crime (ou pas !), la tension monte d'un cran et tout l'intérêt de l'intrigue se dessine soudain, à savoir qui du professeur/Robinson ou de Alice/Bennett va craquer ou trahir l'autre, est-elle même tout à fait sincère et honnête ?! La position d'ami du procureur accentue le malaise comme les maladresses finalement très amatrices du professeur, tandis qu'on savoure la performance de Dan Duryea en parfait maître-chanteur vénéneux à souhait. Quand on arrive à la fin la tension grimpe encore de façon particulièrement efficace avant un petit râté facile... ATTENTION SPOILERS !... le professeur se réveille et on comprend qu'il a tout rêvé ! Alors même qu'il se suicide vraiment dans le roman, apparemment Fritz Lang se sera battu avec son Nunnally Johnson pour ne pas utilise ce stratagème aussi facile que éculé, d'ailleurs Fritz Lang précisera dans le livre d'entretiens avec Peter Bogdanovich : "Vous savez aussi bien que moi que le rêve est un "truc" tellement éculé qu'on ne devrait pratiquement plus oser s'en servir. Mais j'ai eu l'idée -et je crois que cela sauve l'ensemble - de montrer que les personnages du rêve étaient tous des ge,s que l'homme connaît - mais que nous n'avions pas encore vus - et qui nous sont révélés quand le héros se réveille."... FIN SPOILERS !... Une fin décevante donc, et si on comprend la justification de Fritz Lang elle en convainc pas pleinement, surtout avec une tentative de fantaisie à la toute fin qui est loin d'être judicieuse quand il s'agit officiellement d'un Film Noir. En conclusion, un Film Noir de petite facture, la faute aux premières minutes et aux dernières mais ça reste un très bon moment cinéma.

 

Note :                 

14/20
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :