Le Discours (2021) de Laurent Tirard
Déjà réalisateur de deux adaptations de bandes dessinées avec "le Petit Nicolas" (2009) et "Les Vacances du Petit Nicolas" (2014), le réalisateur Laurent Tirard a lu la BD "Za¨Zaï Zaï Zaï" (2015) de Fabcaro alias Fabrice Caro et le joint pour lui faire part de son admiration mais les droits étaient déjà vendus. Mais les deux hommes sont restés en contact jusqu'à ce que le cinéaste s'intéresse à une autre oeuvre de l'auteur. Plus pour une BD mais pour un roman, "Le Discours" (2018) mais il a fallu persuadé Fabcaro qui pensait que son livre était inadaptable comme le précise Fabcaro : "Je lui ai dit que c'était inadaptable ! Un texte aussi introspectif allait être ennuyeux à l'écran. Tout se passe dans la tête d'Adrien et, en plus, tout tourne autour d'un repas." Si le cinéaste a réussi à convaincre l'auteur du livre, la tâche s'est avéré plus ardue auprès des distributeurs jusqu'à l'enthousiasme d'un certain Jean Labadie, grand producteur actuellement chez Le Pacte qu'il a fondé. Laurent Tirard est à la fois le réalisateur et le scénariste comme toujours notamment sur ses derniers films "Un Homme à la Hauteur" (2016) et "Le Retour du Héros" (2018), mais cette fois en solo, sans Grégoire Vigneron son co-scénariste de tous ses précédents films...
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Adrien est coincé à un repas familial alors qu'il attend impatiemment un message de Sonia, sa future-ex ou pas. Dans l'attente et l'angoisse il doit subit un repas de famille qui se déroule toujours de la même façon : maman a préparé le même gigot habituel, papa sort la même anecdote, sa soeur Sophie est en admiration devant son futur époux comme s'il était Einstein. Mais le pire arrive quand son futur beau-frère lui demande de faire le discours du mariage ! Une angoisse, puis deux, Adrien stresse encore plus, le repas va être long... Adrien est incarné par Benjamin Lavernhe vu récemment dans "Délicieux" (2021) de Eric Besnard et "The French Dispatch" (2021) de Wes Anderson. Sa petite amie qui ne répond pas est interprétée par Sara Giraudeau vue dans "Les Traducteurs" (2020) de Régis Roinsard et "Médecin de Nuit" (2021) de Elie Wajeman. Ses parents sont joués pat Guilaine Londez vue dans "Eléonore" (2020) de Amro Hamzawi et "Benedetta" (2021) de Paul Verhoeven, puis François Morel vu dans "Pourris Gâtés" (2021) de Nicolas Cuche et "Kaamelott : Premier Volet" (2021) de Alexandre Astier. La soeur et son fiancé sont interprétés par Julia Piaton vue dans "Les Choses qu'on dit, les Choses qu'on fait" (2020) de Emmanuel Mouret et "C'est la Vie" (2020) de Julien Rambaldi, et Kyan Khojandi vu dans "Adieu les Cons" (2020) de et avec Albert Dupontel et "Les Méchants" (2021) de Mouloud Achour et Dominique Baumard. Citons aussi plusieurs seconds couteaux dont on oublie jamais les visages mais toujours des noms avec Laurent Bateau, Sarah Suco, Sébastien Chassagne, Marilou Aussilloux, Sébastien Pouderoux... Le réalisateur-scénariste avoue trois influences principales : "Annie Hall" (1977) de et avec Woody Allen "pour sa liberté incroyable", "Un Air de Famille" (1996) de Cédric Klapisch "un classique sur les rapports familiaux", et "Eternal Sunshine of the Spotless Mind" (2004) de Michel Gondry "pour son inventivité visuelle et sa poésie". Le vrai écueil est de rester dans un acte théâtral alors que l'essentiel du récit se déroule dans une salle à manger en huis clos, sans compter que Adrien/Laverhne est souvent en simple monologue.
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Mais il faut avouer que Laurent Tirard a plutôt été bien inspirée. D'abord il a fallu briser la "4ème mur", système casse-gueule où le personnage principal s'adresse directement au spectateur en regardant fixement la caméra. Le plus intéressant est que lors de ces "entrevues", les quatre autres membres de la famille continue à converser, mine de rien. Le cinéaste explique : "Nous avons fait des essais avec des perchmans autour de la table pour voir jusqu'à quel point les quatre acteurs pouvaient continuer leur conversation en baissant le ton pendant que Benjamin, lui, parlait à la caméra. Et c'est fou comme ils ont chopés le truc ! Ils étaient capables de détimbrer légèrement leur voix en un clin d'oeil." Le concept fonctionne à merveille, le décalage entre Adrien et sa famille est aussi drôle qu'absurde mais tout tient la route tant le fond laisse un goût de sérieux qui sert finalement de colle à l'ensemble. D'autres idées ne sont pas pour rien dans le charme de l'ensemble comme les interprètes façon Nations Unies, ou l'interaction avec Sonia/Giraudeau. Malheureusement, il y a d'autres points plus gênants, d'abord les enjeux de Adrien, puis Adrien lui-même. En effet, si Adrien stresse parce que Sonia peut le quitter ok, mais angoisser encore plus et de façon plutôt agressive pour un simple discours c'est un peu too much (un discours ne peut faire que 2mn ?! Possibilité d'y réfléchir ou d'en parler plus tard... etc...), mais surtout Adrien est plutôt antipathique ce qui fait que ses palabres égocentriques ne nous touchent pas beaucoup jusqu'à espérer que Sonia le quitte vraiment ! Laurent Tirard signe une comédie originale, intelligente et savoureuse sur bien des points, les acteurs sont investis et offrent une vraie symbiose, et quelques passages sont franchement drôles. Dommage que Adrien soit un personnage auquel on ne s'attache pas vraiment.
Note :