Entre la Vie et la Mort (2022) de Giordano Gederlini
Il aura fallu pas moins de 20 ans pour voir revenir au cinéma le réalisateur de l'oubliable "Samouraïs" (2002) à l'exception notable du téléfilm "La Guerre des Saintes" (2009). Entre temps le cinéaste franco-chilien Giordano Gederlini a surtout écrit pour les autres, pour les films "L'Envahisseur" (2011) de Nicolas Provost, "Tueurs" (2017) de François Troukens et Jean-François Hensgens, "Duelles" (2018) de Olivier Masset-Depasse et surtout l'excellent "Les Misérables" (2019) de Ladj Ly. Le cinéaste avoue deux inspirations. D'abord sa ppropre expérience en pensant au personnage principal : "Il est en exil, ce que j'ai vécu avec mes parents. Leo Castaneda est sûrement lié à la figure de mon père qui a été abîmé par le coup d'état au Chili puis a reconstruit sa vie en Europe." Puis par le film "Little Odessa" (1994) de James Gray : "J'ai été marqué par Little Odessa de James Gray. C'est un film qui reste modeste dans sa mise en scène, qui n'est pas spécialement spectaculaire, mais qui pose la question de la survie."... Leo est espagnol mais vit à Bruxelles où il est devenu conducteur de métro sur la ligne 6. Alors qu'il travaille il retrouve son fils disparu depuis 2 ans et qui disparaît aussitôt tragiquement. Leo, anéanti, découvre alors que son fils était impliqué dans un braquage sanglant. Il va alors faire face et chercher les raisons de tout ce gâchis...
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Co-production franco-belge-espagnole oblige, la grande partie du casting est composé de français et de belges, et d'un unique espagnol incarné par Antonio de la Torre, star du cinéma hispanique avec une multitude de très bons films avec pêle-mêle "Volver" (2006) de Pedro Almodovar, "Balada Triste" (2010) de Alex de La Iglesia, "La Isla Minima" (2014) de Alberto Rodriguez, "Que Dios nos Perdone" (2016) et "El Reino" (2018) tous deux de Rodrigo Sorogoyen, "La Colère d'un Homme Patient" (2016) de Raul Arevalo et plus récemment "Une Vie Secrète" (2020) de Aitor Arregi, Jon Garano et "Jose Mari Goenaga. La jeune officier de police est interprétée par Marine Vacth remarquée chez François Ozon dans "Jeune et Jolie" (2013) et "L'Amant Double" (2017) et vue dans "Pinocchio" (2020) de Matteo Garrone et "ADN" (2020) de et avec Maïwenn. Son supérieur est joué par l'excellentissime Olivier Gourmet, acteur fétiche des frères Dardenne depuis "La Promesse" (1996), et qui retrouve deux partenaires, Tibo Vandenborre après "Tueurs" (2017) co-scénarisé justement par leur réalisateur, acteur vu entre autre dans "Bullhead" (2011) de Michaël R. Roskam, "De Rouille et d'Os" (2012) de Jacques Audiard ou "L'Économie d'un Couple" (2016) de Joachim Lafosse, puis après "Quand la Mer monte" (2004) de et avec Yolande Moreau et Gilles Porte et "Grand Froid" (2017) de Gérard Pautonnier, Olivier Gourmet retrouve Wim Willaert vu aussi dans "Polina" (2016) de Olias Baco et "Cargo" (2017) de Gilles Coulier. Citons encore Fabrice Adde vu dans "The Revenant" (2016) de Alejandro Gonzales Inarritu, "Les Magnétiques" (2021) de Vincent Maël Cardona et "Petite Fleur" (2022) de Santiago Mitre, Sandra Zidani vue dans "JCVD" (2008) de Mabrouk El Mechri, "Le Grand Partage" (2015) de Alexandra Leclère ou "Ma Reum" (2018) de Frédéric Quiring, puis enfin n'oublions pas un second rôle pour la première fois au cnéma du rappeur français Nessbeal... Le film instaure d'emblée un climax dans la veine des thrillers musclés belges ou avoisinant, on se retrouve un peu entre "Les Ardennes" (2016) de Robin Pront et "Bluebird" (2018) de Jérémie Guez. Le climax est toujours aussi efficace pour un tel genre, anxiogène et terne, comme si la poisse sera forcément de la partie avec une prime un héros pas forcément bodybuildé mais charismatique et assez mystérieux pour intriguer. Malheureusement le scénario reprend pas les ficelles du genres mais les cordes entières. Ainsi le passé de cet héros est attendu dès les premières secondes, les tentatives de suspense restent au stade de la tentative, mais surtout toute la partie autour des armes du gang, le lien avec la police... etc... crée un trou béant dans le scénario tant rien n'est crédible et/ou cohérent avec le reste de l'intrigue.
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Sans parler des coïncidences entre l'enquête d'ouverture et l'accident de métro, le passage comme de par hasard devant le matelas tandis qu'on s'agace encore de cet énième héros au passé similaire à tous forcément taciturne, au passé top secret, seul et quasi alcoolique et/ou marginal... Bref rien de bien neuf sous la grisaille de Bruxelles. D'ailleurs sur la capitale belge on est également un peu déçu, d'abord parce que le cinéaste nous vend l'idée : "Ca sent une esthétique urbaine très particulière qui fait panser à Berlin, avec ses friches industrielles et ses no man's land. C'est une ville très graphique." Malheureusement le cinéaste semble surtout obnubilé par l'Atomium (monument façon atome géant) filmé dès que possible et si possible de nuit pour plus d'effets, mais sans cela on pourrait être n'importe où, Bruxelles aurait donc dû être un personnage à part entière il en est rien. Et pourtant on a envie d'aimer ce film, d'abord à cause du casting, Antonio de la Torre dans un nouveau registre et enfin hors de sa zone de confort et qui s'en sort génialement bien, un Olivier Gourmet toujours impeccable et une Marine Vacth qui manque sans doute un peu de crédibilité, mais pas aidé par une sous-intrigue familiale dont on se fout un peu. Ensuite, la réalisation permet quelques bons moments de nervosité et de tension pour un ensemble qui reste efficace. Mais on bloque sur trop de choses qui ne vont pas, trop de facilités pour convaincre pleinement. Pas un moment désagréable, plutôt divertissant mais un film qui ne marquera pas les annales.
Note :