Le Temps d'Aimer (2023) de Katell Quilévéré
Nouveau film de la réalisatrice Katell Quillévéré après "Un Poison Violent" (2010), "Suzanne" (2013) et "Réparer les Vivants" (2016) et qui a entre temps écrit aussi les films "Vandal" (2013) et "De nos Frères Blassés" (2022) tous deux de Hélier Cisterne. Pour ce nouveau projet la cinéaste s'est inspirée de sa grand-mère : "Pendant l'occupation, elle a eu une relation avec un soldat allemand dont elle est tombée enceinte. Elle s'est retrouvée mère célibataire à 17 ans. Elle a rencontré mon grand-père quatre ans plus tard, sur une plage en Bretagne. Il était d'un milieu social beaucoup plus aisé que le sien. Il l'a épousée contre l'avis de ses parents et a adopté son enfant. Le secret de la vraie paternité de cet enfant, a été découvert très tard. Ma grand-mère avait plus de quatre-vingts ans et mon grand-père était mort depuis très longtemps. Leur couple et son mystère me questionnera toujours... Il y a donc ce point de départ très personnel, puis l'imagination a totalement pris le relais et le scénario est devenu une fiction..." La réalisatrice-scénariste co-signe le scénario avec Gilles Taurand qu'elle retrouve après "Réparer les Vivants" (2016), scénariste ayant écrit plusieurs fois pour André Téchiné et plus récemment pour "L'Homme de la Cave" (2021) de Philippe Le Guay et "Twist à Bamako" (2022) de Robert Guédiguian. Katell Quillévéré avoue une inspiration du réalisateur Douglas Sirk, roi du mélo hollywoodien évoqué d'ailleurs dès son titre...
1947, sur une plage Madeleine, serveuse et mère d'un petit garçon, fait la connaissance de François, étudiant riche et cultivé. Leur histoire d'amour est alors évidente mais le secret de Madeleine va devoir se mêler au secret de François... Madeleine est incarnée Anaïs Demoustier vue dans "Novembre" (2022) de Cédric Jimenez et "La Bête dans la Jungle" (2023) de Patric Chiha, et retrouve après "Fumer fait Tousser" (2022) de Quentin Dupieux et "Coma" (2022) de Bertrand Bonello son partenaire Vincent Lacoste vu cette année dans "Le Parfum Vert" (2023) de Nicolas Pariser et "Un Métier Sérieux" (2023) de Thomas Lilti. Le jeune Daniel est interprété par trois jeunes acteurs, Josse Capet et Hélios Karyo pour leur premier rôle et Paul Beaurepaire aperçu dans "Mon Crime" (2023) de François Ozon. Citons ensuite Ambre Gollut apparue dans "Le Livre des Solutions" (2023) de Michel Gondry, Simon Rérolle aperçu dans "Les Liaisons Dangereuses" (2022) de Rachel Suissa, Romain Francisco vu entre autre dans "Canailles" (2022) de Christophe Offenstein et "Les Sans-Dents" (2022) de Pascal Rabaté, Marc Brunet vu dans "L'Amour est une Fête" (2018) de Cédric Anger ou "Les Algues Vertes" (2023) de Pierre Jolivet et retrouve Vincent Lacoste après "De nos Frères Blessés" (2020) de Hélier Cisterne à l'instar de Vincent Sornaga vu dernièrement dans "Mon Légionnaire" (2021) de Rachel Lang et "Tori et Lokita" (2022) des frères Dardennes, puis Eugène Marcuse aperçu dans "Les Fauves" (2018) de Vincent Mariette et "Venise n'est pas en Italie" (2019) de Ivan Calbérac... Le film s'ouvre sur des images d'archives terribles si imposantes qu'on s'attend donc à un drame et à un secret qui risque forcément d'être central. Mais on constate vite que ce n'est pas vraiment le cas, un mélo à la manière d'un Douglas Sirk avec deux personnages, un couple, deux secrets et trois personnes plus ou moins brisées par la vie sur un récit qui se déroule sur une petite vingtaine d'années. D'ailleurs niveau chronologie on remarque quelques râtés... ATTENTION SPOILERS !... au départ on se doute que l'enfant a dû naître en 44-45, ellipse, l'enfant doit avoir 5-6 ans mais après on se dit que ça devait plutôt être 3-4 car à un moment on nous dit qu'il a dix ans donc on est en 1955, puis grosse ellipse, une petite soeur qui a 12 ans donc 1967 mais l'aîné est un ado alors qu'il devrait déjà avoir 22-23 ans... FIN SPOILERS !...
Bref pas bien grave, un détail mais qui parasite toujours un récit qui passe au crible des destins sur une génération, sans compter que le temps ne semble jamais agir sur les corps et les visages. Une femme et un homme se trouve comme une évidence, deux êtres qui se rapprochent aussi par deux secrets difficiles à assumer ne ces années d'après-guerre qui raconte aussi un pan de France qu'on aimait cacher. Une histoire sur plus de 20 ans qui permet à la réalisatrice d'user les ellipses qu'elle affectionne comme on a pu le voir dans ses précédents films. Cette fois le poids de l'Histoire, du double secret, imposent des ellipses nécessaires forcément mais pas toujours judicieux ou des passages un peu facile pour ne pas dire racoleur comme la partie du GI et une ellipse beaucoup trop importante en nombre d'années. On reste frustré par un secret qui s'avère finalement pas si présent malgré la promesse, presque vampirisé par le second qui va finalement avoir plus de conséquence sur le quotidien du couple. Mais le couple Demoustier-Lacoste fonctionne très bien, ils jouent tous les deux à merveille l'amour plus ou moins platonique, la tendresse, les failles et la confiance. Un joli couple mais n'oublions pas aussi l'enfant "bâtard" touchant avec un lien intéressant avec sa mère. Katell Quillévéré signe un mélo sur un fond historico-sociologique plein d'acuité et de justesse qui pêche juste un peu par une conctruction narrative pas toujours au point. Un bon et beau moment.
Note :