La Grande Lessive (1968) de Jean-Pierre Mocky
Tourné entre ses films "Les Compagnons de la Marguerite" (1967) et "L'Etalon" (1970) le cinéaste Jean-Pierre Mocky offre cette petite comédie 100% style Mocky avec une histoire qui devait paraître presque en avance sur son temps. Le réalisateur-scénariste co-écrit avec Alain Moury fidèle co-scénariste pour une quinzaine de films de "Un Couple" (1960) à "Les Ballets Ecarlates" (2007), puis avec Claude Pennec scénariste de "Les Pieds Nickelés" (1964) de Jean-Claude Chambon... Le professeur Saint-Just, enseignant à Paris, s'inquiète de l'irruption de la télévision dans les foyers français et ne peut que constater que ses élèves dorment en cours, épuisés par leur soirée familiale devant le petit écran. Le service public chevillé au corps, Saint-Just ne peut laisser ses ouailles continuer ainsi et organise une sorte de terrorisme civique. Avec des amis il forme un petit groupe qui met au point un produit qui permet de neutraliser les antennes ce qui s'avère particulièrement efficace mais lea Brigade radiophonique veille...
Saint-Just est incarné par le génial Bourvil qui joue-là son 3ème film sur 4 sous la direction de Mocky alors qu'il est au sommet du box-office français avec entre autre "Le Corniaud" (19645) et "La Grande Vadrouille" (1966) tous deux de Gérard Oury. Bourvil se retrouve ainsi en tête d'un casting qui est entièrement composé d'acteurs fidèles de Mocky, pour qui ils ont déjà joué et joueront encore pour lui avec Francis Blanche (8 films avec Mocky) vu aussi dans "Ah ! les Belles Bacchantes" (1954) de Jean Loubignac, "Les Tontons Flingueurs" (1963) de Georges Lautner ou "Belle de Jour" (1967) de Luis Bunuel, Roland Dubillard (3 films avec Mocky) vu plus tard dans "Peur sur la Ville" (1975) de Henri Verneuil ou "L'Amour Braque" (1984) de Andrzej Zulawski, Jean Tissier (5) vu dans "L'Assassin habite au 21" (1942) de Henri-Georges Clouzot ou "Notre Dame de Paris" (1956) de Jean Delannoy, Michael Lonsdale (10) vu auparavant dans "Le Procès" (1962) de Orson Welles ou "La Mariée était en Noir" (1967) de François Truffaut, R.J. Chauffard (6) vu dans "French Cancan" (1955) de Jean Renoir ou "La Guerre est Finie" (1965) de Alain Resnais, Jean Poiret (5) qui retrouvera encore Bourvil dans "Le Mur de l'Atlantique" (1970) de Marcel Camus à l'instar de Rudy Lenoir qui était déjà dans "La Grande Vadrouille" (1966) et qui retrouve Mocky et donc son partenaire Roger Legris après "La Tête contre les Murs" (1958) de Georges Franju. Citons encore Pierre Durou (10) vu dans "En Cas de Malheur" (1957) de Claude Autant-Lara ou "La Vérité" (1960) de Henri-Georges Clouzot, Marcel Pérès (8) vu dans "Les Yeux sans Visage" (1960) de Georges Franju ou "La Fiancée du Pirate" (1969) de Nelly Kaplan et il retrouvera sa partenaire Alix Mahieux (3) dans "Le Fantôme de la Liberté" (1973) de Luis Bunuel, Karyn Balm (2) vue dans "Une Femme est une Femme" (1961) de Jean-Luc Godard, Jean-Claude Rémoleux vu dans "Le Procès" (1962) de Orson Welles ou "Bande à Part" (1964) de Jean-Luc Godard, Micha Bayard (4) vu dans "Le Feu Follet" (1963) de Louis Malle et "La Fiancée des Pirates" (1969), Philippe Castelli (3) vu dans "Cartouche" (1962) de Philippe De Broca ou "Borsalino" (1970) de Jacques Deray, Simone Duhart (3) vue dans "Gervaise" (1956) de René Clément ou "Zazie dans le Métro" (1960) de Louis Malle, puis encore de nombreux petits rôles tenus par des acteurs récurrents dans l'univers de Mocky comme Philippe Brizard (4) et Christian Chevreuse (6)... Le film commence avec un générique savoureux composé d'images d'archives de l'époque sur les familles devant leur téléviseur, puis ensuite une petite immersion dans un collège pré-Mai 68. Ainsi, alors que le tournage se déroule pendant la période Mai 68 Jean-Pierre Mocky se permet un film ancré dans son époque tout en étant visionnaire où comment le cinéaste perçoit dès 68 que les écrans seront un problème aussi insidieux qu'omniprésent. Rien que pour ça le film vaut le détour.
Evidemment, Mocky c'est aussi la satire, le poils à gratter, l'absurde et le cynisme mais toujours pour faire rire tout en posant les bonnes questions. D'emblée on ressent le jeu réellement plein d'entrain de Bourvil qui s'amuse comme un gosse sans doute lui rappelant aussi la comédie "Un Drôle de Paroissien" (1963), et, choses plus rare on a aussi plaisir à voir un Bourvil au physique athlétique alors qu'il venait d'apprendre qu'il était condamné par un cancer). A ses côtés notons un Francis Blanche en dentiste pervers qui ferait sans doute hurler les féministes d'aujourd'hui. Les trublions aspergent donc un produit anti-ondes télévisuelles et se retrouvent poursuivis par la Police radiophonique. Le scénario est parasité par l'esprit anar et anti-flic primaire de Mocky, par exemple non la police de terrain n'est pas aux ordres d'un patron de télévision, et la stupidité des policiers restent d'une caricature qui ne fait pas spécialement rire car gratuit au vu du récit, en effet les gags reposent avant tout sur le "gang", les aléas des opérations de sabotages ou les quiproquos au domicile de l'aristocrate voir les magouilles du dentiste. Comme pour "Un Drôle de Paroissien" (1963) on constate que les déguisements sont trop ridicules pour y adhérer, un minimum de sérieux techniques amènent souvent à des gags plus solides. Néanmoins, cet énième variation autour du jeu du chat et de la souris reste une comédie populaire amusante qui fait mouche avec ne prime, et pour toujours l'atout Bourvil.
Note :