Amour (2012) de Michael Haneke

par Selenie  -  2 Juillet 2024, 09:10  -  #Critiques de films

Après des années sur les mêmes sujets et thématiques, avec sa période autrichienne close avec "Funny Games" (1997), puis avec une période française avec entre autre "La Pianiste" (2001), le réalisateur Michael Haneke semble évoluer et modifier un peu son art, outre son auto-remake hollywoodien un peu inutile "Funny Games U.S." (2007) il a surtout signé son chef d'oeuvre avec "Le Ruban Blanc" (2009) qui a surpris avec ce drame historique en Noir et Blanc et l'émotion était aussi plus palpable et sincère que dans ses précédents films. Un tournant qui va encore se vérifier avec ce nouveau film, ce nouveau drame où le réalisateur n'aura jamais été aussi humain et proche du public dans ses émotions. Le réalisateur-scénariste s'inspire de sa propre histoire, d'une deuil personnel et de sa tante qui l'a élevé ce qui se ressent car jamais le cinéaste n'aura signé une ouvre plus personnelle. Le film devient son plus gros succès au box-office et reçoit un accueil dithyrambique avec en prime une seconde Palme d'Or après "Le Ruban Blanc" (2009), et devient également son film le plus primé recevant entre autre le Golden Globe, l'Oscar et le BAFTA du meilleur film étranger (le premier film à réussir le triplé) ainsi que les 5 Césars majeurs, soit le second à réussir cet exploit après "Le Dernier Métro" (1981) de François Truffaut... 

Georges et Anne son octogénaires. Professeurs de musique à la retraite ce sont des gens cultivés qui vivent désormais à l'écart du monde. leur fille Eva est devenue également musicienne mais vit à l'étranger avec sa famille. Un jour Anne est victime d'une attaque cérébrale qui la rend hémiplégique. Dans le huis clos de leur appartement parisien l'amour qui unit ce vieux couple est mis à rude épreuve par la dégradation de santé d'Anne, surtout que Georges lui a promis de ne jamais la renvoyer à l'hôpital... Le couple est incarné par deux grands acteurs du cinéma, Emmanuelle Riva révélée par "Hiroshima, mon Amour" (1959) et "Kapo" (1961) de Gillo Pontecorvo et juste avant dans "Le Skylab" (2011) de Julie Delpy, et contemporaine de son partenaire Jean-Louis Trintignant révélé dans "Et Dieu... créa à la Femme" (1956) de Roger Vadim ou "Un Homme et une Femme" (1966) de Claude Lelouch et qui n'avait plus tourné depuis "Janis et John" (2002) de Samuel Benchetrit et avec sa fille Marie Trintignant malheureusement morte de façon tragique en 2003. Leur fille est jouée par Isabelle Huppert qui retrouve son réalisateur de "La Pianiste" (2001) et "Le Temps du Loup" (2003), tandis que son mari est joué par William Shimell, chanteur d'opéra et acteur remarqué aux côtés de Juliette Binoche dans l'excellent "Copie Conforme" (2010) de Abbas Kiarostami. Citons ensuite Alexandre Tharaud pianiste réputé qui reviendra au cinéma dans "Boléro" (2024) de Anne Fontaine, Rita Blanco actrice portugaise surtout connue chez nous pour "La Cage Dorée" (2013) de Ruben Alves, Carole Franck vue juste avant dans "le Nom des Gens" (2010) de Michel Leclerc et "Polisse" (2011) de et avec Maïwenn, Dinara Drukarova vu dans "Depuis qu'Otar est parti..." (2003) de Julie Bertucceli ou "Gainsbourg (Vie Héroïque)" (2010) de Joann Sfar, Damien Jouillerot vu dans "Monsieur Batignole" (2001) de et avec Gérard Jugnot et "Malabar Princess" (2003) de Gilles Legrand, Laurent Capelluto vu dans "Un Conte de Noël" (2008) de Arnaud Desplechin ou "Simon Werner a disparu" (2010) de Fabrice Gobert, et enfin Walid Afkir qui retrouve Haneke après "Code Inconnu" (2000) et "Caché" (2005)... Peu de temps après la sortie du magnifique "Quelques heures de printemps" de Stéphane Brizé le lien presque filial entre les deux film s'avère évident (la fin de vie). Haneke surprend son monde en quittant le cynisme et la violence abrupte pour un huis clos épuré et porté par un couple d'acteurs absolument magnifiques. Néanmoins Haneke offre un film qui a les défauts de ses qualités.

Là où, par exemple, Stéphane Brizé évitait de décortiquer le cheminement vers la fin le réalisateur autrichien choisit de tout nous montrer, de décortiquer chaque instant comme autant d'actes (bonne utilisation des ellipses) aussi nécessaires qu'évidents (du repas assisté à la toilette la plus intime...). Cette description minutieuse donne un constat assez incroyable : s'il évite l'écueil du sentimentalisme facile Haneke n'évite pas pour autant une certaine dose de pathos que la succession de ces scènes du quotidien finit par rendre obligatoire et pesant. Un film assez minutieux mais dont le scénario place trop facilement le spectateur en simple voyeur sans laisser à ce dernier la moindre imagination ni le moindre échapattoire. Pourtant l'interprétation des acteurs qui touche au sublime, l'empathie obligatoire avec un sujet aussi difficile que pour le film de Brizé (bizarrement avec moins de polémique ?!) et une mise en scène toujours aussi millimétrée touchent à la perfection. Malgré quelques réserves ça reste un film sensible et d'une réelle finesse qu'on ne peut que conseiller bien que trop clinique et dénué du moindre soupçon de légèreté. 

 

Note :    

15/20
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R
Michael Haneke & le cinéma sur le temps qui passe, tout ce que je déteste. ;-)
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T
Décidément tu ne parles que de films dont Maman me parle :-) A voir !
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