Un Conte de Noël (2008) de Arnaud Desplechin
6ème long métrage de fiction pour Arnaud Desplechin depuis "La Sentinelle" (1992), et il aborde une nouvelle fois ses sujets de prédilections, entre les méandres toujours complexes des liens intra-familiaux, le théâtre et la psychologie/psychiatrie comme dans "Esther Khan" (2000), "Rois et Reines" (2005) et plus récemment son dernier film en date "Frère et Soeur" (2022). Pour cette histoire le cinéaste s'inspire librement de l'essai "La Greffe" (2004) de Jacques Ascher et Jean-Pierre Jouet. Le titre officiel du film est "Un Conte de Noël - Roubaix !", bien que la postérité est occultée la dite ville d'où est originaire le réalisateur. Desplechin co-signe le scénario avec Emmanuel Bourdieu, réalisateur-scénariste de ses films "Candidature" (2001), "Les Amitiés Maléfiques" (2006) ou "Intrusions" (2008), mais qui retrouve surtout Desplechin après avoir déjà collaboré sur les films "Comment je me suis Disputé... (ma Vie Sexuelle)" (1996), "Esther Khan" (2000) et "Léo, en jouant "Dans la Compagnie des Hommes" (2003). Le film aura un joli succès avec en prime pas moins de 9 nominations aux Césars dont une statuette pour le Meilleur acteur dans un seconde rôle pour Jean-Paul Roussillon... Abel et Junon ont eu d'abord deux enfants, Joseph et Elizabeth mais Joseph avait un cancer qui nécessitait une greffe de moelle osseuse. Elizabeth n'était alors pas compatible, les parents ont alors eu Henri en espérant qu'il soit compatible mais ça n'a pas été le cas et Joseph n'a pas survécu. Les parents ont eu un quatrième enfant mais la mort prématurée de l'aîné alors tout petit a toujours été une ombre au sein de la famille. Des années après, Elizabeth sauve d'une faillite judiciaire son frère Henri mais en imposant à la famille le banissement de ce dernier sans que personne ne comprenne et sans que personne y oppose un véto éventuel. Mais un jour, la mère, Junon s'avère avoir à son tour besoin d'une greffe et tous les membres de la famille passent des examens pour savoir qui pourrait être compatible...
Au casting, le réalisateur a surtout fait appel à des acteurs fidèles, qui se connaissent tous très bien pour la plupart. Les parents Adel et Junon sont incarnés par Jean-Paul Roussillon surtout connu au théâtre mais qu'on voit au cinéma depuis "La Chair et le Diable" (1954) de Jean Josipovici et "Voici le Temps des Assassins" (1956) de Julien Duvivier, et qui retrouve Desplechin après "Léo, en jouant "Dans la Compagnie des Hommes" (2003) et "Rois et Reines" (2004), retrouvant donc également après ce dernier film sa partenaire Catherine Deneuve qui joue là aux côtés de sa fille Chiara Mastroianni, qui ne joue pourtant pas sa fille dans cette histoire après avoir été mère-fille devant la caméra dans "Ma Saison Préférée" (1993) de André Téchiné et "Le Temps Retrouvé" (1999) de Raoul Ruiz, notons que les deux actrices ont à ce jour été à l'affiche de 12 films de "A Nous Deux" (1979) de Claude Lelouch à "La Dernière Folie de Claire Darling" (2019) de Julie Bertuccelli. Chiara Mastroianni qui retrouve le réalisateur après "Comment je me suis Disputé... (ma Vie Sexuelle)" (1996) à l'instar de Mathieu Amalric avec qui elle a tourné 6 films et acteur fétiche de Desplechin dans 8 films à ce jour, l'actrice a tourné également beaucoup avec Melvil Poupaud (9 films) qui a joué dernièrement dans le "Frère et Soeur" du réalisateur, n'oublions pas Emmanuelle Devos qui joua et jouera plusieurs fois avec les acteurs précédemment cités et muse de Desplechin, puis Hippolyte Girardot également acteur récurrent chez Desplechin et qui retrouve les acteurs de cette famille de cinéma. N'oublions pas Anne Consigny qui retrouve le réalisateur après "Léo, en jouant "Dans la Compagnie des Hommes", qui retrouvera la plupart des acteurs notamment dans les films "Les Herbes Folles" (2009) et "Vous n'avez encore Rien Vu" (2012) tous deux de Alain Resnais, puis Samir Guesmi dans un petit rôle, alors surtout connu pour des seconds rôles mais qui va ensuite retrouver la plupart de ses partenaires dans des films comme "Bancs Publics (Versailles Rive-Droite)" (2009) de Bruno Podalydès, "Camille Redouble" (2012) de et avec Noémie Lvovsky, "Brèves de Comptoir" (2014) de Jean-Michel Ribes, et aussi "Les Fantômes d'Ismaël" (2017) de Desplechin et "La Dernière Folie de Claire Darling". Parmi les nouveaux dans l'univers de Desplechin, Laurent Capelluto vu dans "Le Tango des Rashevski" (2003) de Sam Garbarski, "L'Enquête" (2014) de Vincent Garenq ou "Un Monde" (2021) de Laura Wandel, Emile Berling (fils de Charles) vu ensuite dans "Les Hauts Murs" (2008) de Christian Faure, "L'Heure d'Eté" (2008) de Olivier Assayas et dernièrement dans "Selon la Police" (2022) de Frédéric Videau. Et enfin citons Hélène Roussel dans un petit rôle, soeur de la star Michèle Morgan qui retrouve Desplechin après son court métrage "La Vie des Morts" (1991), et un caméo du réalisateur Romain Goupil...
Les premières minutes sont à la fois surprenantes et intrigantes où comment le réalisateur-scénariste crée un malaise familial qui paraît gratuit tout en présentant des membres d'une famille bobo parisienne qui va s'avérer malheureusement très caricaturale alors même qu'on est à priori à Roubaix ! Jamais on se dit qu'on est dans le Nord tant cette famille a tout du 16ème parisien, comme les décors par ailleurs, Roubaix n'étant pas franchement mis en valeur. Un passé douloureux et traumatisant pèse sur la famille comme une chape de plomb mais finalement ce premier drame n'est qu'une amorce tant cette famille est dysfonctionnelle quasi tous les membres ont un soucis, perso et/ou vis à vis d'un autre membre. Ca fait beaucoup pour une même famille, ça fait beaucoup même pour une durée de film assez longue de 2h30. Mais Desplechin arrive à nous y intéresser grâce à une narration inventive, une écriture vive, des dialogues ciselés même s'ils paraissent parfois trop littéraires (un plaisir mais pas toujours très "réaliste"), et au final une sorte d'introspection psycho-traumatique intra-familiale. Les acteurs sont excellents (bien que désolé M. Roussillon mais on ne croit pas un seul instant à son couple avec Mme Deneuve), et même au diapason dans cette dynastie roubaisienne mais le film pêche surtout par des personnages certes bien écrits mais beaucoup trop antipathiques pour qu'on s'y attache. Sans parler de l'ineptie de la vengeance, la décision de maudire son frère étant sans consistance voir même particulièrement gratuite ce qui arrive trop souvent chez Desplechin d'ailleurs comme son dernier film "Frère et Soeur". Alors qu'à sa sortie votre serviteur avait adoré ce film, quelques années après la magie n'est plus. On aime la forme et l'écriture générale mais sur le fond c'est lourd avec des personnages dont on se fout un peu.
Note :