Alien le Huitième Passager (1979) de Ridley Scott

par Selenie  -  31 Mai 2022, 08:52  -  #Critiques de films

Le projet est avant tout celui de deux hommes, Dan O'Bannon et Ronald Shusett qui ont regroupé en fait leurs deux histoires respectives. Les deux hommes qui signeront aussi plus tard le scénario de "Total Recall" (1990) de Paul Verhoeven, écrivent donc une histoire qu'ils décriront comme "Les Dents de la Mer dans l'espace" d'après une variation horrifique de "Dark Star" (1974) de John Carpenter qui a été écrit par O'Bannon et d'après une histoire sur un équipage d'un bombardier durant 39-45 harcelé par des aliens imaginée par Shusett. Après avoir proposé le projet à plusieurs studios ils signent avec Brandywine Productions, société créée avec leur premier film "Love" (1969) de Ken Russell par David Giler, Gordon Carroll et surtout Walter Hill scénariste réputé entre autre de "Guet-Apens" (1972) de Sam Peckinpah ou "Le Piège" (1973) de John Huston et qui vient de réaliser son premier film avec "Le Bagarreur" (1975). Hill n'est pas un fan de Science-Fiction mais il appuie le projet car il est particulièrement impressionné par la scène prévue d'un alien qui jaillit d'un corps humain et, mine de rien, le succès planétaire de "Star Wars" (1977) de George Lucas a placé le genre SF en première ligne sur les bureaux des studios. Néanmoins, les producteurs-scénaristes de Brandywine imposent quelques modifications, et pas des moindres puisqu'ils ajoutent notamment le chat Jonesy et l'androïde Ash. Au départ, les deux auteurs Dan O'Bannon et Ronald Shusett avaient surtout peur du choix du réalisateur tant ils ne voulaient pas que leur film devienne "un simple film de série B de monstres". Les producteurs choisissent finalement un débutant mais qui a impressionné avec son premier long métrage, "Duellistes" (1977) de Ridley Scott. Ce dernier va faire sien ce projet ambitieux et audacieux. Notons que Brandywine Productions va être pour la saga "Alien" ce qu'est EON Productions pour les James Bond, à savoir une société presque essentiellement focaliser sur les films de la franchise suite au succès de ce premier film, futur monument du 7ème Art. Attention ! Il existe désormais deux versions, celle de sa sortie ciné 1979, puis une version Director's Cut 2003 qui voit un petit rallongement de durée avec de nouvelles scènes avec une dispute entre les deux femmes et la découverte du cocon. Etonnemment, s'ils agit de officiellement d'un Director's Cut, Ridley Scott a déclaré préféré la version orignale de 79... 

Alors que le vaisseau spatial Nostromo et son équipage en hibernation sont en route pour la Terre avec une cargaison de minerai. Mais l'ordinateur de bord réveille l'équipage très en avance suite à un appel S.O.S. d'un autre vaisseau stationné sur une planète à priori déserte. Un des membres d'équipages est agressé par une entité inconnue et doivent rentrer en catastrophe sur le Nostromo. Soudain une forte tension envahit l'équipage car une entité extraterrestre s'est accroché au visage de leur collègue. Après quelques tentatives, leur collègue semble sauver jusqu'à une mort tragique et choquante qui voit un monstre extraterrestre devenir un huitième passager aussi dangereux qu'effroyable... À noter que le casting est composé d'acteurs solides et expérimentés mais qui ne deviendront des stars qu'après "Alien" et en confirmant durant les années 80, seule Sigourney Weaver est au moment du tournage quasi inconnue. Le capitaine du Nostromo est interprété par Tom Skerritt vu dans "M.A.S.H." (1970) de Robert Altman et qu'on verra dans "Dead Zone" (1984) de David Cronenberg ou "Top Gun" (1986) de Tony Scott. L'officier scientifique est joué par Ian Holm vu dans "Les Griffes du Lion" (1972) de Richard Attenborough et "La Rose et la Flèche" (1976) de Richard Lester mais qui deviendra surtout populaire pour son rôle de Bilbo le Hobbit dans la saga "Le Seigneur des Anneaux" (2001-2014) de Peter Jackson. L'officier en second Ripley est incarnée par Sigourney Weaver aperçue dans "Annie Hall" (1977) de et avec Woody Allen et qui est alors la moins connue du casting, qui retrouvera Ridley Scott dans "1492, Christophe Colomb" (1992) et "Exodus : Gods and Kings" (2014), elle retrouevra également Walter Hill pour "Revenger" (2016). Le reste de l'équipage est composé de Veronica Cartwright remarquée d'abord dans "La Rumeur" (1961) de William Wyler et "Les Oiseaux" (1963) de Alfred Hitchcock et qui venait de jouer dans "L'Invasion des Profanateurs" (1978) de Philipp Kaufman, Harry Sean Stanton grand second rôle de "L'Ouragan de la Vengeance" (1965) de Monte Hellman à "Lucky" (2017) de Carroll Lynch en passant par "Paris, Texas" (1984) de Wim Wenders ou "Une Histoire Vraie" (1999) de David Lynch, John Hurt qui venait de jouer dans "Midnight Express" (1978) de Alan Parker et qui va grimper encore d'un cran juste après avec "Elephant Man" (1980) de David Lynch et "La Porte du Paradis" (1980) de Michael Cimino, et enfin Yaphet Kotto vu dans "L'Affaire Thomas Crown" (1968) de Norman Jewison et surtout "Vivre ou Laisser Mourir" (1973) de Guy Hamilton... Précisons que Veronica Cartwright devait jouer Ripley, mais finalement c'est la moins connue du casting qui obtient ce rôle à priori dû à son physique singulier. Dès le départ il était question de composer un casting pour des rôles hommes-femmes "interchangeables", car dans l'idée l'équipage du Nostromo devait ressembler à "des camionneurs dans l'espace"... Notons que la musique culte et si caractéristique est signée de Jerry Goldsmith, compositeur majeur sur plus de 250 films entre 1957 et 2003 dont un autre film de SF cette même année avec "Star Trek, le Film" (1979) de Robert Wise... Ce qui frappe d'emblée sont les décors dont un Nostromo qui est un vaisseau spatial qui paraît peu moderne ou vieux ce qui était une volonté de Ridley Scott car à l'instar de l'équipage de "camionneurs", il voulait un "futur usé". Le Nostromo semble donc effectivement "usé", un vaisseau qui ne mérite pas le terme de "fleuron" qui est souvent usité dans les films de SF.

Pour en revenir au casting et aux personnages, on constate que le choix s'est porté en majorité sur des acteurs expérimentés qui ne sont plus des jeunes, l'idée étant de composer un équipage de travailleurs, de "camionneurs", des ouvriers plutôt que des soldats ou mercenaires comme c'est souvent le cas dans le genre horreur ou SF. Le film mêle film d'horreur et SF, mais dans le style on est surtout et plutôt dans un thriller. Le début est lancinant, l'histoire se met en place doucement, en prenant le temps de disséminer quelques actions et dialogues qui permet de présenter les membres de l'équipages, mais aussi de mettre en place une atmosphère pesante et anxiogène. Il faut attendre la découverte des oeufs (pour anecdote, le rideau de brume et de laser dans le "nid" a été créé via une machine de concert empruntée au groupe The Who !) pour que l'intrigue débute vraiment et surtout l'arrivée d'un membre au visage emprisonné par un "facehugger". Une scène qui marque les esprits à jamais, un malaise s'installe car si sur le moment on y pense pas forcément en quelques minutes cet extraterrestre renvoie à deux facettes de l'humanité : la vie avec tout ce qui se rapporte à la maternité et la grossesse avec l'oeuf, l'embryon, le bébé "facehugger" avant sa mue, puis la mort amené par l'agression et la symbolique du viol le "facehugger" pénétrant de force le corps humain pour y pondre. L'horreur grimpe alors soudainement et graduellement, en instillant la peur, l'angoisse de l'inconnu d'abord puis ensuite de savoir ce qui va arriver jusqu'à le massacre à proprement parler. En filigrane le film est pourtant une véritable critique du capitalisme, ou plutôt de la mondialisation et du pouvoir incroyable des multinationales qui sont de fait des entités déshumanisées d'où leur intérêt pour un Alien comme prédateur impitoyable. L'autre choix de Ridley Scott est de laisser une place importante à l'improvisation. La plupart des dialogues n'ont pas été écrits, seules les grandes lignes du scénario étaient précisées. Sur ce point la scène la plus marquante et choquante reste la séquence de l'éventration ("accouchement" pour en revenir à la symbolique vie et mort), le réalisateur n'avait pas informé ses acteurs du déroulement précis et réel de cette scène, ainsi l'actrice Veronica Cartwright crie réellement d'effroi lors de l'éclosion du bébé alien ! Une séquence devenue aussi culte que mythique et une des scènes les plus effroyables et effrayantes du cinéma. On reste aujourd'hui encore impressionné par les effets spéciaux et ce pour un film de 1979 ! Le film remporte d'ailleurs logiquement l'Oscar des meilleurs Effets Visuels. Il y a bien quelques erreurs ou incohérences (par exemple comment se fait-il que l'acide sanguin du xénomorphe ne dissout pas le câble eu harpon ?!) mais ça reste des détails tant le film est saisissant, spectaculaire particulièrement angoissant. Le film sera un succès mondial remportant plus de 10 fois son budget et, surtout, qui ouvre une franchise parmi les plus mythique du 7ème Art. Chef d'oeuvre !

 

Note :      

 

20/20

 

Pour info bonus, Note de mon fils de 13 ans :               

12/20
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