Léon (1994) de Luc Besson

par Selenie  -  20 Janvier 2025, 09:57  -  #Critiques de films

Après le documentaire "Atlantis" (1991) le réalisateur Luc Besson revient à la fiction avec de nouvelles ambitions après les succès mérités pour "Le Grand Bleu" (1988) et "Nikita" (1990). En effet, le cinéaste a déjà en tête un projet de SF alors encore impossible à financer, et avant tout de concurrencer les américains sur leurs propres territoires, chez eux et dans leurs genres de prédilection. Ainsi le réalisateur-scénariste imagine une histoire qui se déroule aux Etats-Unis et en langue anglaise et qui s'inspire de "Nikita" dans une variation plus "humaine", avec une jeune fille qui veut devenir tueuse à gages et un nettoyeur qui aurait un cousin américain. La première version a une durée de 110 minutes, mais une version "Director's cut" en 1996 de 130 minutes avec 20 minutes supplémentaires dont une bonne partie accentue l'idée d'une relation amoureuse entre Léon et Matilda. Le film a une interdiction au moins de 12 ans en France, au moins de 17 ans non accompagné aux Etats-Unis. Néanmoins, si les critiques restent relativement mitigées le public est au rendez-vous avec plus de 3,5 millions d'entrées France et près de 20 millions de dollars au box-office américain. Nommé à 7 reprises aux Césars le film repart par contre bredouille. Néanmoins, la vrai réussite est que le film connait une belle réputation aux Amériques, la réputation du réalisateur est alors au sommet et lui permet de lancer son futur projet sous les meilleures auspices, le futur "Le Cinquième Elément" (1997)... Un tueur à gages, Léon fait tout pour rester dans l'ombre et ne vit que pour sa plante verte. Mais un jour, des hommes font un massacre chez son voisin de palier, la jeune fille de la famille, Matilda se réfugie alors chez Léon bien malgré lui. Devenue orpheline, Matilda s'impose dans le quotidien de Léon qui finit par la prendre sous son aile. Le couple interroge, mais surtout Matilda engage Léon pour lui apprendre le métier afin qu'elle puisse se venger des tueurs, qui s'avèrent être des policiers ripoux... 

Le tueur à gages Léon est incarné par Jean Reno, qui est de tous les films du cinéaste depuis son premier long métrage "Le Dernier Combat" (1983), et alors qu'il étoffe en quelques sortes son "petit" rôles de "Nikita" l'acteur est surtout auréolé du succès important de la comédie "Les Visiteurs" (1993) de Jean-Marie Poiré. Matilda est joue par Natalie Portman, alors âgée de 12 ans pour son premier rôle au cinéma et qui va aussitôt confirmée son talent avec "Heat" (1995) de Michael Mann, "Tout le monde dit I love You" (1996) de Woody Allen et "Mars Attacks !" (1996) de Tim Burton. Citons ensuite Danny Aiello habitué du genre avec entre autre "Le Parrain II" (1974) de Francis Ford Coppola ou "Il était une fois en Amérique" (1984) de Sergio Leone, les parents de Matilda interprétés par Ellen Greene apparue dans "Petite Boutique des Horreurs" (1986) de Frank Oz ou "Y a-t-il un Flic pour sauver Hollywood ?" (1994) de Peter Segal, et Michael Badalucco aperçu dans "Raging Bull" (1980) de Martin Scorcese ou "Miller's Crossing" (1990) des frères Coen, le couple se retrouvera dans "Un Beau Jour" (1996) de Michael Hoffman dans lequel sera également George Martin vu dans "Le Cercle des Poètes Disparus" (1989) de Peter Weir ou "Président d'un Jour" (1993) de Ivan Reitman. Parmi les ripoux citons Gary Oldman lui aussi en pleine ascension après ses performances marquantes dans "Dracula" (1992) de F.F. Coppola, "True Romance" (1993) de Tony Scott et "Ludwig Van B." (1994) de Bernard Rose et qui retrouvera Luc Besson pour "Le Cinquième Elément" (1997), Peter Appel apparu dans "Jours de Tonnerre" (1990) de Tony Scott ou "Basic Instinct" (1992) de Paul Verhoeven, Don Creech vu plus tard dans "Good Night and Good Luck" (2005) de et avec George Clooney ou "Rampart" (2012) de Oren Moverman, Luc Bernard apparu dans "Mon Oncle d'Amérique" (1980) de Alain Resnais ou "Hiver 54, l'Abbé Pierre" (1989) de Denis Amar. Citons encore Frank Senger vu ensuite dans "Risque Maximum" (1996) de Ringo Lam ou "13" (2010) de Gela Babluani, Joseph Malerba qui retrouvera son réalisateur pour "Jeanne d'Arc" (1999), puis enfin et surtout Maïwenn, alors toute jeune épouse du réalisateur, déjà vu enfant dans "L'Eté Meurtrier" (1983) de Jean Becker ou "Lacenaire" (1990) de Francis Girod, qui se verra remplacer dans le coeur de Luc Besson durant le tournage de "Le Cinquième Elément" (1997) et qui deviendra une grande réalisatrice notamment avec "Polisse" (2011) ; d'ailleurs, l'actrice affirmera que le film a été inspiré à Besson par leur histoire... ATTENTION, nous avons choisit la version longue de 1996 ! Précisons que les scènes ajoutées n'ont jamais été doublé en français. Ajoutons que certrains scènes ont été coupées après une projestion-test mais aussi sur demande des parents de Natalie Portman car jugées trop équivoques... Les premières minutes sont aussi simples qu'efficaces, où on nous présente les protagonistes. Evidemment Léon/Reno tueur à gages réputé et secret, la famille de Matilda/Portman qui reste une famille problématique pas aidé par un père escroc, puis un groupe de policier qui n'ont rien des forces de l'ordre qui semblent tous plus psychopathes que ceux qu'ils sont censés pourchasser. Le film prend un premier tournant avec la première scène de massacre qui est plutôt audacieuse... ATTENTION SPOILERS !... un massacre de famille qui n'est pas édulcoré dont un enfant, de quoi secouer les plus durs... FIN SPOILERS !... C'est ensuite une sorte de comédie de moeurs singulière entre un tueur façon ours mal léché resté paradoxalement enfantin et une jeune orpheline plus mature que son âge pourrait le laisser penser. 

Le vrai et seul soucis du film réside dans la relation justement équivoque et volontairement ambigüe entre Léon et Matilda. Il faut avouer que dans la version originale la relation est ambigüe mais reste correcte et rien ne peut laisser penser à mal, par contre dans la version longue la relation est plus malaisante car Matilda/Portman semble prendre les choses en main... ATTENTION SPOILERS !... elle déclare avoir 18 ans, elle boit et fume, demande d'abord à Léon de l'embrasser, puis plus tard de lui faire l'amour, ils dorment enfin dans le même lit... FIN SPOILERS !... Et ce même si Léon/Reno ne franchit jamais le pas fatidique. Mais la version longue permet aussi de traiter plus en profondeur le désir de vengeance de Matilda, forçant la main à Léon afin d'apprendre le métier quitte à agir sans lui. L'apprentissage n'est pas dénué de tendresse et de professionnalisme jusque dans l'erreur. La tension est palpable tant le flic/Oldman cocaïné fait froid dans le dos, et si on devine que les méchants ne vont pas gagné on pressent que le happy end pur n'est pas une option. Le dernier acte du film est une des meilleures fins du genre, explosif, décomplexé et tragique - pour l'anecdote, un véritable braqueur surgi hors d'un commerce s'est retrouvé entouré des comédiens alors vêtus en policiers, paniqué il s'est rendu croyant être cerné par de vrais policiers ! - Le cinéaste place aussi quelques clins d'oeil ou références plutôt sympa, le plus malin est le pseudo choisit par Matilda à l'hôtel, "Macguffin" qui renvoie évidemment au concept phare de Alfred Hitchcock, le petit caméo de Jean-Hugues Anglade, acteur de "Nikita" qui était alors en tournage à proximité dans "La Reine Margot" (1994) de Patrice Chéreau. Le film est une vraie réussite, optant pour un équilibre parfait entre l'horreur de la violence assumée et la tendresse naïve d'un couple mal assorti qui fonctionne d'ailleurs parce que Léon/Reno est montré en grand benêt immature mais doté d'une conscience morale. Luc Besson signe avec ce film le dernier de ses trois chefs d'oeuvres, à voir et à revoir.

 

Note :                 

19/20
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Le meilleur film de Luc Besson pour moi personnellement ! La bonne époque du réalisateur avec Nikita, le grand bleu...
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